Le Parlement européen a adopté par 545 voix pour, 26 voix contre et 32 abstentions, une résolution sur la cohérence des politiques au service du développement (CPD).
Contexte
Le rapport d'évaluation externe de 2018 pour la Commission a révélé de graves lacunes dans la mise en uvre de la CPD, y compris un rôle limité pour les délégations de l'UE. En outre, une étude récente commandée par le Parlement a révélé que des problèmes majeurs persistent. L'absence de réponse adéquate aux conclusions du rapport d'évaluation externe et le manque de preuves que des mesures appropriées ont été prises nuisent à la crédibilité des actions de l'UE en matière de coopération au développement. Le Conseil n'a plus d'échanges réguliers avec la Commission sur la CPD.
Le contexte géopolitique mondial actuel est marqué, en particulier, par les effets de la pandémie de COVID-19, l'invasion illégale de l'Ukraine par la Russie et ses conséquences, notamment une grave crise énergétique, la crise des réfugiés, le surendettement mondial et les menaces qui pèsent sur la sécurité alimentaire et la biodiversité, ainsi que le changement climatique, et ces problèmes menacent gravement la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) au niveau mondial, de sorte qu'une réponse globale s'impose. Cela accroît encore la nécessité d'une mise en uvre efficace de la CPD et d'une cohérence entre les différentes politiques, comme dans le cas du lien entre l'humanitaire et le développement.
Le Parlement a souligné que la responsabilité, la visibilité et la transparence sont des aspects importants de la coopération au développement et doivent être appliqués à la CPD. En tant que co-législateur et contributeur à l'élaboration des politiques, le Parlement porte une grande part de responsabilité dans la mise en uvre de la CPD par l'UE. Pour que la CPD fonctionne correctement, une approche «globale» impliquant tout le Parlement est nécessaire, avec des contributions actives de toutes les commissions parlementaires impliquées dans les différentes politiques.
Le nouveau contexte géopolitique et politique de la CPD
Le Parlement a affirmé que la CPD est une exigence substantielle afin d'éviter que les politiques de l'UE aient des impacts négatifs sur les personnes pauvres et vulnérables dans les pays en développement et de rechercher et d'exploiter les possibilités de synergies et de poursuivre l'objectif de développement de réduction et, à long terme, d'éradication de la pauvreté. Il est rappelé que toutes les institutions de l'UE et les États membres doivent respecter leurs obligations en matière de CPD en vertu des traités dans toutes les initiatives législatives et politiques susceptibles d'avoir un impact sur les pays en développement.
La Commission est invitée à publier, d'ici le 31 décembre 2023, une communication qui clarifie l'application de la CPD dans le contexte des ODD.
Soulignant que la CPD doit rester un élément clé des relations extérieures de l'UE, le Parlement a appelé à lui donner plus de visibilité et à ce que l'UE joue un rôle de premier plan dans la promotion de la CPD au niveau mondial. Il a recommandé la mise en place d'une plateforme de l'UE pour la CPD afin de permettre une meilleure coordination entre les institutions européennes et multilatérales concernées, les acteurs non étatiques et les pays en développement afin dassurer l'alignement et la coopération en matière de CPD.
Une stratégie commune de lUnion pour la CPD et des mesures différenciées de la Commission, du Conseil et du Parlement
La résolution souligne que la CPD devrait être appliquée de manière cohérente à toutes les propositions pertinentes. Elle souligne la nécessité d'un engagement politique clair et de haut niveau en faveur de la CPD et invite la Commission à :
- s'assurer que la sensibilisation, l'expertise et les ressources nécessaires à la mise en uvre efficace de la CPD sont présentes de manière cohérente dans toutes ses directions générales (DG) et au Secrétariat général;
- examiner, à un stade précoce et de manière transparente, toutes les initiatives politiques et législatives prévues par la Commission, ainsi que les accords commerciaux, afin d'en déterminer l'impact éventuel sur les pays en développement;
- recourir largement à un suivi systématique et transparent et procéder à des évaluations ex post de l'impact des politiques existantes de l'UE et des accords internationaux sur la poursuite des objectifs de la politique de développement;
- reprendre la publication d'un rapport annuel spécifique sur les performances de l'UE et de ses États membres par rapport à leurs engagements en matière de politique de développement, en veillant à ce que ce rapport couvre de manière adéquate la mise en uvre de la CPD et les défis rencontrés dans ce contexte, augmentant ainsi la transparence et la responsabilité vis-à-vis du public et du Parlement.
Tout en soulignant le rôle essentiel de la direction générale des partenariats internationaux (DG INTPA) pour assurer la mise en uvre de la CPD au sein de la Commission, le Parlement a demandé à la DG INTPA de rétablir une équipe dédiée à la CPD au sein de la DG INTPA afin de coordonner et de renforcer le travail de CPD au sein des unités thématiques de la DG, et d'assurer le soutien continu de la DG INTPA pour développer et maintenir la sensibilisation et la compétence en matière de CPD dans d'autres DG et au sein du Secrétariat général.
La Commission et le Service européen pour l'action extérieure (SEAE) sont invités à veiller à ce que les délégations disposent de l'expertise et des ressources nécessaires pour participer activement, dès le départ, à la préparation de la politique et de la législation de l'UE concernant les pays en développement. Le Parlement et le Conseil devraient évaluer soigneusement l'impact sur les pays en développement de leurs amendements aux propositions législatives de la Commission.
Le Conseil et les États membres sont invités à :
- consacrer l'expertise et les ressources appropriées, et établir des mécanismes de coordination, dans leurs administrations nationales pour mettre en uvre efficacement la CPD et rendre compte de sa mise en uvre;
- établir une meilleure coordination entre les États membres et leurs ministères compétents en matière de CPD, à organiser des évaluations régulières par les pairs et à mettre en uvre les recommandations formulées dans les précédents rapports et évaluations sur la CPD;
- adopter des conclusions du Conseil sur chacun des rapports annuels de responsabilité de la Commission demandés par le Parlement;
- veiller à ce que, au début de chaque présidence du Conseil, les questions relatives à la CPD fassent l'objet d'une sensibilisation;
- organiser des échanges significatifs et réguliers sur la CPD entre le Conseil, le Parlement et la Commission.
Enfin, le Parlement a déclaré qu'il s'engageait à améliorer ses propres travaux en matière de CPD et, à cette fin, il a :
- chargé le Service de recherche du Parlement européen (EPRS) d'examiner régulièrement le programme de travail de la Commission pour les questions relatives à la CPD, en analysant systématiquement la manière dont la CPD est traitée dans les évaluations d'impact de la Commission et les propositions pertinentes;
- demandé qu'une plus grande attention soit accordée à la CPD dans les processus de prise de décision stratégiques et budgétaires;
- exprimé son intention de renforcer sa propre sensibilisation et son expertise en matière de CPD au niveau politique en fournissant une formation et des informations sur la CPD aux nouveaux membres et aux membres en exercice, ainsi qu'au niveau administratif, en particulier au sein du personnel des organes impliqués dans la législation.