Conception addictive des services en ligne et protection des consommateurs sur le marché unique de l’UE

2023/2043(INI)

La commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs a adopté un rapport d’initiative de Kim VAN SPARRENTAK (Verts/ALE, NL) sur la conception addictive des services en ligne et la protection des consommateurs sur le marché unique de l’UE.

Conception addictive des services en ligne

Dans l’économie de l’attention qui prévaut aujourd’hui, certaines entreprises technologiques se servent de la conception et des fonctionnalités des systèmes pour tirer profit des vulnérabilités des utilisateurs et des consommateurs, dans le but de capter leur attention et de maximiser le temps qu’ils passent sur les plateformes numériques et l’argent qu’ils y dépensent.

Les jeunes de 16 à 24 ans passent en moyenne plus de sept heures par jour sur l’internet. De plus, on constate chez un enfant ou jeune sur quatre une utilisation «problématique» ou «dysfonctionnelle» de son smartphone, c’est-à-dire que ses schémas comportementaux indiquent une dépendance.

Dans ce contexte, les députés estiment que l’addiction numérique et les technologies persuasives sont des problèmes qui nécessitent une réponse réglementaire complète de l’Union, assortie de diverses initiatives stratégiques de soutien, afin de lutter de manière tangible contre l’addiction numérique.

Étant donné que la conception addictive peut causer un préjudice matériel aux consommateurs et être néfaste pour leur santé physique et psychologique, le rapport invite la Commission à évaluer d’urgence et, le cas échéant, à combler les lacunes réglementaires existantes en ce qui concerne les vulnérabilités des consommateurs, les interfaces truquées et les caractéristiques addictives des services numériques.

Si le sujet n’est pas traité, le Parlement devrait jouer un rôle moteur et faire usage de son droit d’initiative législative.

La Commission est invitée à :

- examiner les initiatives stratégiques nécessaires et à proposer, le cas échéant et si nécessaire, une législation contre la conception addictive;

- garantir un niveau élevé de protection dans l’environnement numérique en veillant à s’attaquer aux problèmes croissants liés à la conception addictive, comportementale et manipulatrice des services en ligne dans le cadre de sa révision de la directive sur les pratiques commerciales déloyales, de la directive sur les droits des consommateurs et de la directive sur les clauses contractuelles abusives;

- évaluer d’urgence la nécessité d’interdire les pratiques les plus préjudiciables, qui ne figurent pas encore sur la liste noire des pratiques commerciales trompeuses de l’annexe I de la directive relative aux pratiques commerciales déloyales ou d’autres actes législatifs de l’Union;

- évaluer et à interdire les techniques de dépendance nocives qui ne sont pas couvertes par la législation existante telles que la fonction de défilement infini et la fonction de lecture automatique par défaut, les notifications «push» constantes ou les notifications de réception ou de lecture.

La Commission devrait envisager de renverser la charge de la preuve pour les pratiques dont la Commission ou les autorités nationales ont constaté ou supposent qu’elles sont addictives. Les entreprises devraient pour leur part avoir l’obligation de mettre au point des produits et services numériques éthiques et équitables qui soient exempts d’interfaces truquées et de conception trompeuse ou de dépendance. Il s’agit là d’une diligence professionnelle raisonnable.

En outre, la Commission devrait évaluer les effets sur la dépendance et la santé mentale des systèmes de recommandation basés sur l’interaction, en particulier les systèmes hyperpersonnalisés, qui maintiennent les utilisateurs sur la plateforme le plus longtemps possible au lieu de leur fournir des informations de manière plus neutre.

Conception éthique des services en ligne

Le rapport exige que, dans le cadre de sa révision de la législation européenne existante sur la création de dépendance, la Commission propose un «droit numérique de ne pas être dérangé» pour donner aux consommateurs le pouvoir de désactiver toutes les fonctions qui attirent l’attention et de permettre aux utilisateurs de choisir d’activer ces fonctions par des moyens simples et facilement accessibles, éventuellement accompagnés d’un avertissement obligatoire sur les dangers potentiels de l’activation de ces fonctions.

La Commission est invitée à :

- promouvoir une conception éthique des services en ligne par défaut;

- dresser une liste de bonnes pratiques en matière de caractéristiques de conception qui ne créent pas de dépendance ou de manipulation et qui garantissent que les utilisateurs ont pleinement le contrôle et peuvent prendre des mesures conscientes et éclairées en ligne sans être confrontés à une surcharge d’informations ou être soumis à des influences subconscientes.

Les députés estiment que toute réponse au niveau de l’Union européenne devrait viser à créer une consultation, une coopération et une collaboration significatives avec et entre les parties prenantes, et impliquer en particulier les législateurs, les organismes de santé publique, les professionnels de la santé, l’industrie, en particulier les PME, ainsi que les régulateurs des médias, les organisations de consommateurs et les ONG. La Commission est invitée à faciliter un dialogue substantiel entre toutes les parties prenantes concernées.

Enfin, la Commission est invitée à déployer des efforts internationaux supplémentaires pour promouvoir la réglementation de la conception addictive en ligne. Les députés insistent sur la nécessité de promouvoir et de mettre en œuvre des initiatives politiques et des normes industrielles sur la sécurité dès la conception dans les services et produits numériques destinés aux enfants qui peuvent favoriser le respect des droits de l’enfant.