Lutte contre la traite des êtres humains: infractions, sanctions et responsabilité au pénal. Décision-cadre
2001/0024(CNS)
OBJECTIF : rapprocher les dispositions des États membres en vue de punir la traite des êtres humains.
CONTENU : Le 24 février 1997, le Conseil adoptait l'Action commune 97/154/JAI relative à la lutte contre la traite des êtres humains et l'exploitation sexuelle des enfants engageant les États membres à revoir leur législation respective en vue d'ériger la traite des êtres humains et l'exploitation des enfants en infractions pénales.
Étant donné la persistance des approches juridiques des États membres dans ce domaine et la référence expresse du Traité d'Amsterdam (art. 29 du traité) et du Conseil européen de TAMPERE d'adopter des dispositions législatives complémentaires contre la traite des êtres humains, la Commission propose une décision-cadre visant à renforcer les objectifs de l'Action commune de 1997 et de combler les lacunes de la législation existante.
Il s'agit en particulier de rapprocher les dispositions de droit pénal des États membres, notamment en matière de sanctions, dans le domaine de la traite des êtres humains et de prévoir des dispositions horizontales telles que la compétence et la coopération entre États membres.
La proposition s'applique à la traite de êtres humains à des fins d'exploitation de leur travail ou d'exploitation sexuelle mais ne porte pas sur l'exploitation sexuelle des enfants qui fait l'objet d'une proposition séparée (voir CNS/2001/0025).
Les principales dispositions de la proposition sont les suivantes:
- obligation faite aux États membres de l'Union de punir la traite des êtres humains à des fins d'exploitation de leur travail : il s'agit en particulier de sanctionner le recrutement, le transport ou le transfert, y compris l'hébergement, l'accueil et le contrôle exercé sur une personne en violation continue de ses droits fondamentaux, afin de l'exploiter pour la production de biens ou la prestation de services. L'exploitation du travail est définie comme une violation de la réglementation du travail en matière de conditions de travail, de salaires, de santé et de sécurité sur le lieu de travail sous la contrainte de la force ou de la menace, la tromperie, la fraude, l'abus d'autorité, la pression ou toute autre forme d'abus;
- obligation faite aux États membres de punir la traite des êtres humains à des fins d'exploitation sexuelle, à savoir l'exploitation à des fins de prostitution, de spectacles pornographiques ou de production de matériel pornographique. Á noter que l'infraction décrite dans ces articles n'exige pas que la victime ait franchi ou non une frontière (de manière à couvrir tant les ressortissants communautaires que ceux des pays tiers);
- l'instigation, la complicité ou la tentative d'une personne à commettre ce type d'infractions seraient également passibles de sanctions.
Les infractions visées seraient passibles de sanctions pénales comprenant des peines maximales d'emprisonnement d'au moins 6 ans dans tous les États membres. Dans les circonstances aggravantes de comportement cruel vis-à-vis des victimes, de génération d'un profit substantiel pour les personnes à la source de la traite des êtres humains ou de l'implicationd'une organisation criminelle, la peine pourrait être portée à 10 ans maximum.
Des dispositions sont également prévues en vue d'incriminer les personnes morales impliquées dans la traite des humains via une personne agissant à titre individuel ou en tant que membre d'un organe d'une personne morale. La responsabilité d'une personne morale pourrait également être envisagée lorsqu'il y a défaut de surveillance ou de contrôle à l'égard des victimes.
La proposition de décision-cadre comporte également un important chapitre relatif à la compétence des États membres et à l'extradition afin de s'assurer que les personnes incriminées n'échappent aux poursuites prévues. Un État membre devrait établir sa compétence dans 3 cas :
1) lorsque l'infaction est commise, en tout ou partie sur son territoire indépendamment du statut ou de la nationalité de la personne impliquée (principe de la territorialité);
2) lorsque l'auteur de l'infaction est un ressortissant de cet État membre (principe de la personnalité active) et donc indépendamment de la loi du lieu où l'infraction est commise ;
3) lorsque l'infaction est commise pour le compte d'une personne morale établie sur le territoire de cet État membre.
Des dérogations sont toutefois prévues pour les États membres qui ne reconnaissent la compétence extraterritoriale des infractions commises. Il est également prévu de couvrir les cas où les États membres n'extraderaient pas leurs ressortissants présumés coupables.
Des dispositions spécifiques sont prévues pour protéger et assister les victimes.
Des dispositions classiques d'entraide, de coordination et de coopération judiciaires sont en outre prévues en vue de s'assurer de l'application effective de la proposition (ex.: échange d'informations pertinentes, utilisation du réseau judiciaire européen et des magistrats de liaision, établissement de points de contacts nationaux pour les échanges d'informations et association d'EUROPOL à la mise en place de cette coopération).
La décision-cadre devrait entrer en vigueur le 31.12.2002 pour tous les États membres. L'action commune 97/154/JAI serait abrogée à cette date.
Un rapport de mise en oeuvre serait rédigé par la Commission endéans le 30.06.2004 sur l'application de la décision-cadre.
À noter que la présente proposition n'aura pas d'incidence financière sur le budget communautaire.�