OBJECTIF : favoriser la mobilité des chercheurs à l'heure de la mondialisation.
CONTEXTE : la mondialisation de l'économie appelle davantage de mobilité pour les chercheurs, ce que le sixième programme-cadre de recherche de la Communauté européenne a reconnu en ouvrant davantage ses programmes aux chercheurs de pays tiers. Le nombre de chercheurs dont la Communauté devra disposer afin de répondre à l'objectif de 3% du PIB à investir dans la recherche fixé par le Conseil européen de Barcelone est évalué à 700 000 personnes. Comme il est vraisemblable que l'Union européenne ne trouvera pas en son sein ce nombre considérable de chercheurs, des mesures doivent être prises pour attirer davantage de chercheurs de pays tiers, ce qui permettra notamment de multiplier les réseaux de coopération et de partenariat scientifiques au niveau mondial. Cette volonté de favoriser l'admission et la mobilité des chercheurs doit par ailleurs prendre en compte la nécessité de prévoir des mesures d'accompagnement pour éviter de développer de nouvelles formes de fuite des cerveaux au détriment des pays moins développés.
L'initiative de la Commission comporte à la fois une proposition de directive et deux propositions de recommandation (voir également CNS/2004/0062 et CNS/2004/0063) visant à faciliter l'admission des ressortissants de pays tiers aux fins de recherche scientifique dans la Communauté européenne.
CONTENU : la présente proposition de directive a pour objet une procédure spécifique pour l'entrée et le séjour des ressortissants de pays tiers qui viennent réaliser dans la Communauté européenne un projet de recherche pendant plus de trois mois. Elle est axée sur les éléments suivants :
1) Le rôle central des organismes de recherche : il est proposé de mettre en place un mécanisme d'admission spécifique aux chercheurs de pays tiers, dont la particularité est de confier aux organismes de recherche préalablement agréés un rôle dans la procédure aboutissant à la délivrance du titre de séjour. Les organismes de recherche joueront un rôle essentiel dans la procédure d'admission en signant avec le ressortissant de pays tiers concerné une convention d'accueil garantissant à la fois son aptitude à mener à bien les recherches envisagées et les conditions, en particulier d'ordre financier, dans lesquelles celles-ci se dérouleront ;
2) La répartition des rôles entre les organismes de recherche et les Etats membres : la procédure d'admission envisagée préserve les compétences des autorités des Etats membres compétentes en matière d'immigration dont l'intervention reste indispensable pour l'admission d'un chercheur. L'organisme de recherche sera amené à vérifier les conditions qui doivent être remplies pour la signature d'une convention d'accueil, à savoir l'existence d'un projet de recherche satisfaisant accepté par l'organisme d'accueil et la possession par le chercheur de ressources suffisantes et d'une assurance-maladie pendant son séjour ainsi que de la délivrance par l'organisme de recherche d'une attestation de prise en charge des frais de séjour, de santé et de retour du chercheur. Les Etats membres vérifieront l'identité du ressortissant de pays tiers et ses documents de voyage, ainsi que l'absence de menace pour l'ordre public, la sécurité publique ou la santé publique ;
3) La responsabilisation des organismes de recherche : la directive prévoit que les organismes devront se faire agréer avant de pouvoir faire usage de la procédure spécifique. En contrepartie des prérogatives qui lui sont attribuées, l'organisme de recherche sera financièrement responsable pour les frais de séjour, de santé et de retour du chercheur au cas où celui-ci tomberait à charge de l'Etat d'accueil ou continuerait à séjourner illégalement dans l'Union européenne après l'expiration de son titre de séjour. Enfin, les Etats membres pourront refuser de renouveler ou retirer l'agrément d'un organisme de recherche qui ne répond plus aux conditions exigées à cet effet ;
4) Une conception large de la notion de chercheur, axée sur les besoins de l'Union européenne : la procédure n'est pas limitée aux personnes ayant déjà la qualité de chercheurs dans leur pays d'origine. L'accent est plutôt mis sur l'accomplissement d'un projet de recherche, ce qui devrait permettre à l'Union européenne d'accueillir temporairement comme chercheur des professionnels ou experts de haut niveau, mais qui n'exercent pas forcément pour autant la profession de chercheur dans leur pays d'origine, ou des jeunes diplômés dont l'Union européenne a besoin, en particulier dans les sciences exactes. La directive prévoit que son champ d'application peut être étendu à des personnes susceptibles d'être admises aux fins de donner des cours dans un établissement d'enseignement supérieur afin de conforter les pratiques des Etats membres concernés ;
5) Un titre de séjour indépendant du statut du chercheur : il est proposé de créer une voie d'admission propre aux chercheurs grâce à laquelle les ressortissants de pays tiers pourront être admis indépendamment de la nature de la relation juridique (contrat de travail, boursier…) les unissant à l'organisme de recherche qui les accueille. Les chercheurs qui seront admis sur la base d'un contrat de travail ne devront plus obtenir de permis de travail dans les Etats membres qui en exigent encore dans leur cas alors que l'état du marché ne le justifie plus pour le secteur de la recherche. De même, les voies d'admission traditionnelles des chercheurs (travailleur salarié ou indépendant, étudiant, stagiaire, boursier, etc.) continueront à subsister parallèlement à la nouvelle procédure d'admission spécifique et pourront être utilisées par les organismes de recherche ou les ressortissants de pays tiers ne répondant pas aux conditions de la présente directive ;
6) La mobilité des chercheurs dans l'Union européenne : la directive prévoit, d'une part, que le chercheur peut, sous le couvert de son titre de séjour et d'un passeport ou document de voyage, poursuivre pendant la durée de validité de son titre de séjour, les activités liées à son projet de recherche dans un second Etat membre, sous réserve de l'ordre public, la sécurité publique ou la santé publique. D'autre part, s'il souhaite se rendre dans un second Etat membre dans le cadre d'un autre projet de recherche, le chercheur ne sera pas obligé de retourner dans son pays d'origine pour déposer une demande visant à prolonger leur séjour dans un autre Etat membre. La procédure d'admission simplifiée prévue par la présente directive peut être aisément recommencée auprès de l'Etat membre sur le territoire duquel le chercheur souhaite prolonger ses recherches, via la signature d'une nouvelle convention d'accueil ;
7) Une procédure simplifiée et accélérée : la proposition autorise l'introduction d'une demande de titre de séjour sur place alors que le ressortissant de pays tiers se trouve déjà sur le territoire de l'Etat membre d'accueil pour autant qu'il y soit légalement présent. Elle laisse aux Etats membres le soin de régler si la demande de permis de séjour sera introduite par le chercheur ou l'organisme de recherche. Les Etats membres devront délivrer le titre de séjour dans les 30 jours du dépôt de la demande. Enfin, dans le but de promouvoir dans les pays tiers les possibilités de recherche offertes en Europe, il est demandé aux Etats membres de faire des efforts supplémentaires en matière de transparence afin d'assurer l'accès depuis les pays d'origine à des informations concernant la procédure d'admission spécifique.
En vertu du principe de subsidiarité, la directive laisse aux Etats membres le soin de régler comme ils l'entendent plusieurs questions relatives aux chercheurs des pays tiers : les ressources financières dont les chercheurs doivent disposer pour être admis ne sont pas déterminées dans la directive; la durée du titre de séjour pourra, selon la volonté des Etats membres, être limitée à une année ou adaptée à la durée du projet de recherche ; les Etats membres seront appelés à déterminer si les demandes de titre de séjour doivent être introduites par les organismes de recherche ou les ressortissants de pays tiers ; enfin, ils pourront régler les conséquences de l'absence de décision dans le délai prescrit de 30 jours qui leur est imparti pour statuer sur les demandes d'admission. Par ailleurs, les Etats membres conservent le droit d'adopter des dispositions plus favorables.