Reconnaissance des qualifications professionnelles
2002/0061(COD)
En adoptant le rapport de M. Stefano ZAPPALA·(PPE-DE, I) portant sur la simplification des qualifications professionnelles, le Parlement européen a approuvé la proposition de directive moyennant 218 amendements dont une part importante d'entre eux a été approuvée et réajustée en Plénière.
Remplaçant les 15 textes actuellement en vigueur, cette directive a pour ambition de simplifier les démarches administratives pour les diplômés de l'Union élargie qui décideront de s'installer ou de fournir des services dans un autre État membre que le leur.
L'approche préconisée par le Parlement suit les grandes lignes de la proposition de la Commission européenne mais durcit par ses amendements à la fois techniques et de fond, le principe de la reconnaissance des qualifications pour certaines professions à risque, comme les professions médicales. Ainsi, le Parlement réaffirme dans les visas de la proposition, les objectifs du Traité en la matière qui précisent en ses articles 152 et 153 que l'Union doit pouvoir disposer d'un niveau élevé de santé humaine et de protection des consommateurs.
Pour autant, le Parlement réaffirme-t-il sa volonté d'appliquer le principe de reconnaissance des qualifications sans discrimination afin de garantir la libre prestation de services aux professionnels voulant s'installer dans un autre État membre sans imposer de contraintes insurmontables.
Dans cet esprit, les principales modifications touchent aux points suivants :
- reconnaissance des qualifications: : le Parlement stipule que le niveau de qualification doit être équivalent à celui exigé dans l'État membre d'accueil et non "au moins équivalent au niveau immédiatement inférieur à celui exigé dans l'État membre d'accueil", comme le suggérait la Commission. Pour le Parlement, le principe de base est celui d'une approche de la reconnaissance orientée vers "le haut".
La Plénière réaménage le chapitre de la proposition consacré aux niveaux de qualifications. En se ralliant au principe des 5 niveaux de reconnaissance proposés par la Commission, la Plénière réaffirme que l'accès à une profession réglementée ne doit être autorisé que là où les qualifications exigées sont d'un même niveau, de façon à décourager le "dumping" des qualifications. Cependant, le Parlement précise que si le niveau de formation exigé pour être admis à exercer une profession a été relevé dans l'État membre hôte, l'État membre de destination doit autoriser des professionnels qui ont été admis à exercer cette profession en vertu d'une qualification obtenue à un niveau plus bas, à être reconnus comme ayant le niveau plus élevé.
Dans un amendement approuvé en Plénière, le Parlement exige que ce système en 5 niveaux soit évalué dans les 5 ans qui suivent l'entrée en vigueur de la directive afin de s'assurer de son efficacité concrète. Si, dans la pratique, le niveau de qualification lié aux diplômes varie visiblement d'un État membre à l'autre, la Commission devrait alors présenter des propositions en vue d'un système de points et d'unités de valeur lié à la qualité et au contenu de l'enseignement et de la formation professionnelle dans les différents États membres, systèmecomparable à celui qui existe déjà pour le programme ERASMUS.
Dans une série d'amendements ciblés, la Plénière a apporté des modifications techniques aux niveaux de qualification, en précisant entre autre que le niveau 5, ou niveau universitaire pouvait aussi se concrétiser par une durée équivalente (soit 4 ans) sur la base du temps partiel dans une université ou dans un établissement de niveau similaire et, éventuellement, de la formation exigée en plus de cet enseignement supérieur.
De même, elle a précisé que le niveau 2 (ou niveau secondaire) pouvait être complété par une formation professionnelle ou un stage pratique.
Outre le principe de la reconnaissance des qualifications, la Plénière suggère la mise en place d'une carte professionnelle individuelle permettant de suivre l'évolution des professionnels qui s'établissent dans différents États membres. Cette carte contiendrait des informations sur la formation, l'expérience professionnelle ou les éventuelles sanctions imposées dans le contexte professionnel des intéressés;
- droit d'établissement et activités "temporaires" : un des apports de la directive est la clarification de la différence entre libre prestation de services et droit d'établissement. Alors que pour la Commission la libre prestation de services signifie que les professionnels exercent leur activité dans l'État membre d'accueil pour une période n'excédant pas 16 semaines sans inscription, le Parlement, comme sa commission au fond, considère que ce critère n'est pas approprié. Pour lui, les critères pertinents pour définir le caractère temporaire de l'activité sont, notamment, la présence d'installations fixes, la durée et l'essence de l'activité, ainsi que sa fréquence, sa périodicité et sa continuité. La Plénière a également durci les conditions d'accès "temporaire" au marché lorsque la responsabilité professionnelle est en cause, comme dans le cas des professions médicales. Il a notamment précisé que ces prestataires devaient être soumis aux "mêmes droits et obligations" que les praticiens établis dans l'État d'accueil (autrement dit : s'inscrire à une organisation professionnelle et à un organisme de sécurité sociale). Ainsi, si une profession soumise à un régime particulier de responsabilité professionnelle est réglementée dans l'État d'accueil mais pas dans le pays d'origine du prestataire, l'État d'accueil pourrait exiger l'inscription complète auprès des autorités compétentes avant le début de la prestation. Pour le Parlement, l'enregistrement complet est nécessaire dans l'intérêt de l'harmonisation des qualifications et la protection du bénéficiaire du service;
- accès aux professions médicales : pour la Plénière, ces professions spécifiques sont soumises à des obligations particulières telles que la déclaration préalable aux autorités de l'État d'accueil, l'enregistrement "pro forma" à l'ordre professionnel ou à l'organisme similaire compétent dans certains cas, etc. Le Parlement a également décidé de durcir les conditions d'octroi d'une "reconnaissance automatique" de certains titres de formation médicale. Ainsi, les infirmiers responsables des soins généraux devraient avoir obtenu une formation dûment rémunérée ; les titres de vétérinaires nepourraient être reconnus que s'ils sont issus d'instituts supérieurs et à condition que ces instituts soient régulièrement soumis à des audits externes.
Le Parlement maintient toutefois la possibilité de reconnaître automatiquement de nouvelles spécialisations médicales mais à condition qu'elles soient officiellement reconnues dans plusieurs États membres.
Soucieux de garantir la meilleure protection des citoyens, le Parlement demande également à la Commission d'examiner la possibilité de créer une base de données sur tous les professionnels de la santé interdits dans un État membre.
À noter encore des dispositions particulières demandées pour le secteur de la pharmacie hospitalière et de la plupart des professions médicales (dentiste, sage-femme ou encore psychothérapeute dont le niveau de qualification a été redéfini).
Le Parlement rappelle au passage que la directive ne s'applique pas aux notaires;
- langue : le Parlement stipule que l'État d'accueil pourrait demander à une personne migrante d'apporter "la preuve" de ses connaissances linguistiques alors que la Commission était plus souple en la matière;
- ordres professionnels et consultation des professionnels : le Parlement demande que les autorités compétentes de l'État d'accueil ou à défaut, les organismes ou ordres professionnels reconnus de cet État, se chargent de demander dans l'État d'établissement la preuve que le prestataire de service exerce légalement ses activités. Si ces autorités n'existent pas dans l'État d'établissement, c'est l'association responsable de la profession du prestataire qui pourrait jouer ce rôle. La fourniture de ces preuves ne pourrait toutefois pas retarder l'exécution de la prestation de services.
La Plénière apporte également des aménagements aux articles de la proposition touchant à la représentation des spécialisations médicales auprès de la Commission.
Afin de favoriser la libre circulation, le Parlement suggère encore que des plates-formes communes soient mises en place pour faciliter la tâche de reconnaissance des qualifications : ces plates-formes seraient matérialisées par des organismes européens reconnus des ordres professionnels ou des associations représentant un corps professionnel au niveau européen. Elles devraient en outre obtenir la légitimité démocratique des pays dont elles sont issues et n'auraient qu'un avis consultatif sur la législation. La Plénière prévoit en particulier qu'une plate-forme de ce type soit créée pour les ingénieurs afin qu'à un stade ultérieur, ils puissent être inclus dans le champ d'application de la directive.
Pour faciliter encore la reconnaissance professionnelle, la Plénière suggère la mise en place d'une enceinte consultative renforcée au niveau européen qui servirait à promouvoir le développement d'un cadre communautaire de reconnaissance des qualifications.
Sur un plan plus général, le Parlement appelle aussi tous les acteurs de la reconnaissance à poursuivre leur tâche sur une base de coopération volontaire, de transparence et de confiancemutuelle en citant en exemple les orientations définies dans le cadre du processus de Bologne (mise en place progressive d'un espace européen uniforme de l'enseignement supérieur) ou de Bruges (coopération européenne renforcée en matière de formation professionnelle).�