Liens entre immigration légale et illégale et l'intégration des migrants

2004/2137(INI)

En adoptant par 431 voix pour, 124 contre et 49 abstentions, le rapport d’initiative de M. Patrick GAUBERT (PPE-DE, F), le Parlement européen se prononce en faveur d’une réelle politique d’intégration à l’échelle européenne. Il estime que la politique d'immigration de l'Union doit se fonder sur une approche globale et non sectorielle, basée non pas seulement sur les exigences du marché du travail dans les États membres mais surtout sur des politiques d'accueil et d'intégration et sur la définition d'un statut précis pour les migrants légaux. Pour le Parlement, la coordination des politiques nationales ne peut remplacer une politique européenne d'intégration : en conséquence, le Parlement appelle les États membres à élaborer des critères minima en la matière.

Déplorant que le Conseil ne soit pas parvenu à définir une politique commune d'immigration en maintenant l'unanimité sur les questions d’immigration légale, le Parlement invite la Commission à lancer avec lui une réflexion de fond sur la gestion des flux migratoires et sur la bonne utilisation des programmes financiers existants. Le Parlement insiste pour souligner son propre rôle dans la mise en place future d'une politique commune efficace d'immigration.

Il regrette que jusqu'à présent les mesures adoptées par le Conseil et les États membres aient été des mesures essentiellement répressives pour le contrôle des vagues migratoires et non proactives dans les pays tiers. Il rappelle dès lors son point de vue selon lequel les stratégies visant à réduire la pauvreté, à améliorer les conditions de vie et de travail, à créer des emplois et à développer la formation dans les pays d'origine, contribuent à long terme à normaliser les flux migratoires. Pour le Parlement, il est également primordial de tenir le plus grand compte du potentiel de l'immigration dans un contexte de co-développement. Dans ce contexte, il encourage l'intégration de la question migratoire dans la politique extérieure de l'Union tout en rappelant que le recours à l'aide au développement ne suffit pas pour s'attaquer aux causes profondes de l'émigration.

Sur la question de l’immigration clandestine, le Parlement estime que la mise en place d’un système intégré de gestion des frontières extérieures doit s'appuyer sur l'harmonisation poussée de la politique des visas, sur une implication active de l'Agence européenne des frontières et sur la création d'un fonds communautaire relatif aux frontières. Il faut en outre plus de solidarité entre États membres et avec les nouveaux États membres en matière de gestion des frontières tout en garantissant le respect des droits fondamentaux des individus qui sont refoulés.

Réaffirmant que l'immigration légale ne supprimera pas l'immigration illégale, le Parlement se dit convaincu que des efforts intenses doivent intervenir en vue de lutter contre le trafic des êtres humains et contre le travail illégal. Par conséquent, le Parlement invite l'Union et ses États membres à prévoir un arsenal de sanctions répressives contre les entreprises qui exploitent les êtres humains et attend des mesures pour protéger les victimes. Des mesures sont notamment attendues contre les réseaux de passeurs et contre l'emploi irrégulier, en particulier dans les secteurs des services domestiques et de l'aide familiale.

Parallèlement, le Parlement réitère sa position ferme contre tous les centres d’accueil et de rétention d'immigrants sans papiers, qui sont des zones de non-droit. Le Parlement rejette expressément la création de camps aux frontières de l'UE. Il s’insurge également contre la création dans les pays de la Méditerranée de centres de premier accueil pour les immigrés cherchant à gagner le territoire de l'Union qui n'offrent aucunes garanties minimales aux personnes concernées en termes de droits fondamentaux. Il  partage toutefois le point de vue de la Commission selon lequel la régularisation de masse des immigrés illégaux n'est pas une solution au problème de l'immigration illégale. Cette régularisation doit tenir compte d'évaluations économiques, démographiques et culturelles et doit garder un caractère exceptionnel et unique.

Sur la question de l’immigration aux fins d’emploi, le Parlement regrette que la proposition portant sur ce thème n'ait pu aboutir et soutient l'option proposée par la Commission dans son Livre vert visant à créer un cadre commun de normes minimales pour l'admission des ressortissants de pays tiers pour les emplois tant salariés qu'indépendants. Il est également favorable à l'assouplissement des modalités d'entrée des immigrants à des fins de travail. Il demande à la Commission de procéder à une prévision à court et à moyen terme des besoins de main-d'œuvre additionnelle dans les différents États membres et invite les États membres à fournir à la Commission une estimation statistique dans ce domaine afin d’avoir une vision claire des besoins.

Pour le Parlement, il est urgent de parvenir à des politiques d'immigration plus adaptables aux marchés de l'emploi afin d'éviter que le marché intérieur du travail soit déréglementé par les travailleurs à bas coût et les travailleurs clandestins. Il invite dès lors les États membres à travailler avec les organisations concernées pour déterminer le nombre de travailleurs étrangers à admettre. C’est dans ce contexte que le Parlement se dit également favorable à la création d’un permis de séjour et de travail spécifiques combinés facilitant le recrutement de travailleurs saisonniers.

L’immigration aux fins d’emploi doit toutefois se doubler de mesures complètes pour les immigrés légaux afin de leur garantir des droits sociaux, économiques et politiques. Il faut en outre réfléchir à promouvoir la citoyenneté de ces personnes, notamment en leur garantissant des mécanismes de consultation et de représentation adéquats. Le Parlement insiste également sur le fait que les immigrés doivent être encouragés à apprendre la langue du pays d'accueil.

Parallèlement, le Parlement réitère son rejet inconditionnel de toute forme de discrimination, de racisme et de xénophobie : il importe donc relancer au plus vite la proposition de décision-cadre concernant la lutte contre le racisme et la xénophobie actuellement bloquée au Conseil.

Enfin, le Parlement se dit consterné par l'augmentation des crimes d'honneur, des persécutions et des violations graves des droits des immigrées pour motifs de fanatisme religieux et appelle la Commission et le Conseil à intervenir plus résolument contre ces phénomènes.