Normes et procédures communes applicables au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Directive "retour"
OBJECTIF : fixer des règles claires et transparentes pour le retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.
ACTE PROPOSÉ : Directive du Parlement européen et du Conseil.
CONTEXTE : Depuis 2001, la Commission a présenté plusieurs communications dans lesquelles elle expose la nécessité d’une politique commune en matière d'immigration clandestine et notamment la mise en place d’une politique commune en matière de retour, comme part indispensable de la lutte contre l'immigration clandestine. Cette politique doit notamment se caractériser par un renforcement de la coopération entre les États membres et par la mise en place de normes communes visant à faciliter le retour opérationnel des personnes en séjour irrégulier (voir COS/2002/2054).
Répondant à ces propositions, le Conseil s’est prononcé en novembre 2002 sur un programme d'action sur le retour, préconisant un renforcement de la coopération opérationnelle entre États membres, une intensification de la coopération avec les pays tiers et la définition de normes communes afin de faciliter le retour. Dans la foulée, le «Programme de La Haye» de novembre 2004 a recommandé la définition de normes communes afin que les personnes concernées soient rapatriées d'une façon humaine et digne dans leur pays d’origine. Il a également préconisé la présentation d’une proposition allant dans ce sens pour le courant de l’année 2005.
C’est pour répondre à cette demande que la Commission propose maintenant de définir des règles communes claires, transparentes et équitables en matière de retour, d’éloignement, de recours à des mesures coercitives, de garde temporaire et de réadmission des personnes en séjour irrégulier.
CONTENU : La proposition vise à arrêter un ensemble horizontal de règles applicables à tout ressortissant de pays tiers en séjour irrégulier. La proposition s’insère dans le contexte de 2 groupes de mesures législatives déjà en vigueur :
- des mesures visant à organiser la coopération en matière de retour avec les directives 2003/110/CE (assistance en transit dans le cadre de mesures d’éloignement par voie aérienne) et 2004/573/CE (organisation de vols commun pour l’éloignement de personnes en séjour irrégulier) ;
- des mesures visant à la reconnaissance mutuelle des décisions d’éloignement avec la directive 2001/40/CE (que la présente proposition viendra remplacer) associée à la décision 2004/191/CE (compensations financières entre États membres résultant de l’application de la directive 2001/40/CE).
Les principaux points de la proposition de directive peuvent se résumer comme suit :
.champ d’application : la proposition vise – en tant que mesure concernant l’immigration clandestine fondée sur l’article 63, premier alinéa, point 3) b), du traité – à définir un ensemble de règles horizontales, applicables à tout ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier, quel que soit le motif de l’illégalité de son séjour (par exemple, l’expiration de son visa ou de son titre de séjour, la révocation ou le retrait de son titre de séjour, une décision finale rejetant une demande d’asile, le retrait du statut de réfugié, une admission illégale). Elle ne concerne pas les motifs justifiant la cessation d’un séjour régulier ni les procédures y afférentes ;
.une procédure en 2 étapes : la proposition prévoit une procédure en deux étapes, ayant pour objet de mettre fin au séjour irrégulier : une fois la décision sur le retour prise par un États membre à l’égard d’un ressortissant de pays tiers en séjour irrégulier, la priorité doit être accordée à son retour sur une base volontaire. Si ledit ressortissant d’un pays tiers ne retourne pas de son plein gré, les États membres exécutent alors l’obligation de retour au moyen d’une décision d’éloignement. La proposition précise que les États membres sont libres de prendre la décision de retour et la décision d'éloignement au moyen d’un seul et même acte ou d’une seule et même décision afin d’accélérer les procédures.
La proposition prévoit également l’instauration d’une «interdiction de réadmission», empêchant la réadmission sur le territoire de l’ensemble des États membres et qui accompagnera les décisions d’éloignement. Cette « européanisation» des conséquences des mesures nationales de retour devrait avoir un effet préventif et renforcer la crédibilité d’une politique de retour véritablement européenne. La durée de l’interdiction de réadmission sera déterminée en tenant dûment compte de toutes les circonstances propres à chaque cas. Elle ne devrait normalement pas dépasser 5 ans. L’interdiction de réadmission ne pourra être décrétée pour une durée plus longue que dans les cas de menace grave à l’ordre public ou à la sécurité nationale ;
.droit de recours : la proposition prévoit un droit de recours juridictionnel effectif contre les décisions de retour et d’éloignement. Ce recours aura un effet suspensif ou conférera au ressortissant d’un pays tiers le droit de demander le sursis à l’exécution de la décision de retour ou d’éloignement, auquel cas l’exécution de la décision sera reportée jusqu’à ce qu’elle soit confirmée ou jusqu’à ce qu’elle ne soit plus susceptible d’un recours suspensif ;
.garde temporaire : la proposition prévoit de limiter le recours à la garde temporaire des personnes à éloigner et à le subordonner au respect du principe de proportionnalité. La garde temporaire ne sera utilisée que si elle est nécessaire pour prévenir le risque de fuite et si l’application de mesures moins coercitives ne suffit pas. Les motifs justifiant le maintien en garde temporaire devront faire l'objet d'un réexamen régulier par une autorité judiciaire. Les durées maximales fixées en la matière permettront d’éviter toute prolongation excessive de la garde temporaire. Cette harmonisation des dispositions nationales relatives à la garde temporaire vise aussi à empêcher les mouvements secondaires entre États membres de personnes en séjour irrégulier faisant l’objet des mesures d’éloignement ;
.reconnaissance et application mutuelles des décisions d’éloignement : la proposition prévoit un ensemble de règles souples, applicables lorsqu’un ressortissant d’un pays tiers sous le coup d’une décision d’éloignement ou de retour prise dans un État membre (le «premier État membre») est appréhendé sur le territoire d’un autre État membre (le «second État membre»). Les États membres peuvent alors choisir entre plusieurs possibilités, en fonction des circonstances de chaque cas :
- d’une part, le second État membre peut reconnaître la décision de retour ou d’éloignement prise par le premier État membre. Le mécanisme de compensation financière arrêté dans la décision 2004/191/CE s’appliquera alors ;
- d’autre part, le second État membre pourra demander au premier État membre de reprendre un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier, ou décider d’engager une nouvelle procédure de retour, autonome, en vertu de sa législation nationale.
.lien avec le SIS II : le partage d’informations avec les autres États membres sera fondamental pour la mise en œuvre rapide et efficace des dispositions de la proposition. C’est pourquoi, il est prévu que les États membres disposent d’un accès rapide aux informations relatives aux décisions de retour et d’éloignement et aux interdictions de réadmission édictées par les autres États membres. Ce partage d’informations aura lieu conformément aux dispositions relatives à l’établissement, au fonctionnement et à l’utilisation du système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II : CNS/2005/0103 et COD/2005/0106).
.dispositions territoriales : la Norvège, l’Islande et la Suisse seraient associées à la mise en œuvre de la présente directive conformément aux accords bilatéraux conclus avec l’UE sur l’acquis Schengen. Le Danemark ne participerait pas à sa mise en œuvre de la directive, conformément au protocole annexé au Traité UE mais pourrait décider dans un délai de 6 mois après son adoption d’y être ou non associé. Enfin, les nouveaux États membres ne seraient associés à la directive qu’après une décision ad hoc du Conseil, conformément au traité d’adhésion de ces pays.
À noter qu’à compter de son entrée en vigueur, la directive remplacerait la directive 2001/40/CE sur la reconnaissance mutuelle des décisions d’éloignement (CNS/2000/0819) ainsi que les articles pertinents (23 et 24) de la Convention d’application Schengen.