Lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme: informations concernant le donneur d'ordre accompagnant les virements de fonds, transposition de la recommandation spéciale VII sur les «virements électroniques» (RS VII) du Groupe d’action financière (GAFI) dans le droit communautaire
AVIS DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE sur la proposition de règlement relatif aux informations concernant le donneur d'ordre accompagnant les virements de fonds.
La BCE formule les observations suivantes :
Obligations des prestataires de services de paiement intermédiaires (PSP): seuls devraient se voir imposer des obligations les établissements de crédit qui entretiennent des contacts directs avec la clientèle ou les entités financières qui font partie de la chaîne de paiements pour l'exécution des virements de fonds, puisque ces entités disposeraient des informations nécessaires. A cet égard, la BCE recommande d'insérer une disposition excluant expressément tant les opérateurs de systèmes de paiement, de compensation et de règlement que les prestataires de services de messagerie du champ d'application du règlement proposé.
En outre, l'article 13 (2) du règlement concerne les obligations d'un PSP intermédiaire dans les cas où il ne reçoit pas les informations complètes sur le donneur d'ordre. La BCE met en garde contre la proposition de mettre à la charge du PSP intermédiaire l'obligation d'informer le PSP du bénéficiaire du caractère incomplet des informations. Il serait plus approprié que cette obligation incombe aux parties qui sont directement impliquées, à savoir le PSP du donneur d'ordre et le PSP du bénéficiaire.
Définitions :
- les définitions retenues à l'article 4 de la proposition de directive concernant les services de paiement dans le marché intérieur devraient être cohérentes avec les définitions énoncées dans le règlement proposé, et en particulier en ce qui concerne la définition de l'«utilisateur de services de paiement»
- la définition du «prestataire de services de paiement» devrait contenir une référence aux services de remise de fonds
- il conviendrait en outre d'ajouter une définition de la notion d'«identifiant unique», qui devrait refléter les différentes combinaisons possibles de données requises pour identifier le donneur d'ordre.
Opérations commerciales : le considérant 6 du règlement proposé concerne l’exclusion du champ d'application, dans certaines conditions, des virements de fonds résultant de «transactions commerciales», entre autres. L'article 2, paragraphe 2, alinéa premier précise par ailleurs que le règlement «n'est pas applicable aux virements de fonds résultant d'une opération commerciale effectuée à l'aide d'une carte de crédit ou de débit ou d'un instrument de paiement similaire».
La BCE suggère de modifier la rédaction de ces dispositions afin d'assurer une plus grande cohérence avec la note interprétative qui énonce que lorsque les cartes de crédit ou de débit sont utilisées comme système de paiements pour effectuer un virement, elles entrent dans le champ d'application de la Recommandation Spéciale VII du GAFI et les informations nécessaires devraient être incluses dans le message. La RS VII établit en effet une distinction entre l'utilisation de cartes pour le paiement de biens et de services (qui n'est pas couverte par la RS VII) et l'utilisation de cartes pour effectuer des virements (qui est couverte).
De manière générale, le règlement proposé semble reposer sur l'hypothèse selon laquelle le PSP du donneur d'ordre ou du bénéficiaire serait toujours en mesure de déterminer si les cartes de crédit ou de débit ont été utilisées pour le paiement de biens et de services ou pour effectuer des virements. Toutefois, cette hypothèse n'est pas toujours correcte. Bien que la BCE comprenne le désir d'exonérer les opérations effectuées à l'aide d'une carte de crédit ou de débit pour payer des biens et des services, de l'obligation d'inclure des informations complètes sur le donneur d'ordre, la proposition semble impraticable dans la mesure où les entités soumises au règlement ne disposent d'aucun moyen pour déterminer, en toutes circonstances, la raison sous-jacente du paiement. Dans un souci de sécurité juridique, la BCE suggère à la Commission de clarifier ses intentions sur ce point dans le règlement proposé.
Virements par lot à destination de bénéficiaires de pays tiers : il s'agit de virements individuels depuis un donneur d'ordre unique à destination de différents bénéficiaires, qui ont été groupés et sont ensuite généralement «séparés» par le premier PSP intervenant dans le processus ou par un opérateur de système de paiement, et ultérieurement classés selon le PSP du bénéficiaire. En conséquence, ni le bénéficiaire ni son PSP ne pourront remarquer que les fonds reçus ont, à l'origine, été virés dans le cadre d'un virement par lots. Si le bénéficiaire est situé dans un pays membre du GAFI, le pays en question doit également appliquer la RS VII. C'est pourquoi le PSP du bénéficiaire devrait contacter le PSP du donneur d'ordre à l'intérieur de la Communauté ou le premier PSP intermédiaire, pour obtenir les informations pertinentes. Il convient par conséquent de noter que le recours à des virements par lots au niveau transfrontalier occasionnera un grand nombre de demandes de fourniture d'informations sur le donneur d'ordre.
Accords avec des territoires ou des pays ne faisant pas partie de la Communauté : le règlement proposé dispose que la Commission européenne peut autoriser, sous réserve de certaines conditions, des accords entre États membres et pays ou territoires extérieurs à la Communauté, qui contiennent des dérogations au règlement. Étant donné la concentration des marchés financiers de l'UE et le développement d'un espace unique de paiement en euros, les première et troisième conditions (c'est-à-dire que le pays ou le territoire soit lié à l'État membre concerné par une union monétaire ou fasse partie de la zone monétaire de cet État membre et qu'il impose aux PSP relevant de sa juridiction l'application de règles identiques à celles instituées par le règlement proposé) semblent être suffisantes pour atteindre les objectifs de l'obligation d'autorisation. Par conséquent, la deuxième condition (que le pays ou le territoire soit membre des systèmes de paiement et de compensation de l'État membre concerné) pourrait être supprimée.
L'annexe jointe à l’Avis contient des suggestions de rédaction au cas où les considérations qui précèdent conduiraient à modifier le règlement proposé.