Résultat de l'examen des propositions législatives en instance devant le législateur

2005/2214(INI)

En adoptant le rapport d’initiative de Mme Sylvia-Yvonne KAUFMANN (GUE/NGL, DE) sur l’examen des propositions législatives en instance, le Parlement européen se rallie très largement à la position de sa commission des affaires constitutionnelles et accueille favorablement la communication de la Commission. Il estime donc avec elle que le retrait ou la modification de la grande majorité des propositions en instance et bloquées contribuera à simplifier l'environnement législatif communautaire. Ce faisant, le Parlement se félicite que la Commission ait, avant d'arrêter sa position définitive, réexaminé ses propositions à la lumière des objections formulées par le Parlement et qu’elle ait chaque fois motivé son refus (allant même jusqu’à identifier de nouvelles initiatives potentielles susceptibles de répondre aux préoccupations du Parlement).

Le Parlement estime qu'à l'avenir, la Commission devrait exposer les raisons motivant le retrait ou la modification des différentes propositions et qu'elle ne devrait pas s'en tenir à invoquer des principes généraux pour le retrait de certains dossiers, comme elle l’a fait encore cette fois.

Á la faveur d’un amendement socialiste adopté en Plénière, le Parlement a vivement regretté que la Commission ait retiré la proposition de directive portant statut de la mutualité européenne qui constitue un des éléments clés de la stratégie de Lisbonne. Pour justifier ce retrait, la Commission avance l'argument de la diversité des législations nationales comme obstacle aux initiatives communautaires. Mais le Parlement estime que cette position n’est pas pertinente et qu’une nouvelle initiative portant sur l'élaboration d'un statut de la mutualité européenne et de l'association européenne devrait être proposée avant la fin 2006.

Sur un plan plus technique, le Parlement estime qu’à l’avenir la Commission devrait présenter au Parlement et au Conseil une liste des propositions législatives présentées par la Commission précédente mais qu'elle propose de maintenir, tout de suite après son investiture. La Commission devrait également intégrer dans son programme législatif et de travail annuel une liste des propositions qu'elle entend retirer ou modifier, afin de permettre au Parlement d'exprimer son avis, conformément aux prérogatives que lui confèrent les traités.

Le Parlement rappelle à cette occasion qu'aucune disposition des traités en vigueur ne confère à la Commission la faculté de retirer une proposition législative, alors que celle de modifier une proposition législative est couverte par le principe, expressément prévu à l'article 250, paragraphe 2, du traité CE. Ce principe prévaut également pour la procédure de codécision prévue à l'article 251 et la procédure de coopération, définie à l'article 252. Il reconnaît toutefois que, dans certaines limites bien définies, la faculté de la Commission de retirer une proposition législative :

  • découle de son droit d'initiative législative et complète logiquement sa faculté de modifier une proposition,
  • peut contribuer à renforcer son rôle dans la procédure législative,
  • peut être considérée comme un élément positif garantissant que les procédures qui conduisent à l'adoption d'un acte communautaire et que le dialogue interinstitutionnel sont destinés à favoriser l’ »intérêt de la Communauté ».

Il affirme toutefois que cette faculté devrait être réexaminée à la lumière des prérogatives dont jouissent, en vertu des traités, les diverses institutions de l’Union dans le processus législatif.

Parallèlement, le Parlement indique que les facultés de retrait ou de modification de certaines propositions ne sauraient remettre en cause l'équilibre institutionnel en changeant le rôle joué par chaque institution dans le processus législatif, et que ces facultés de retrait ne reviennent pas à reconnaître une forme de "droit de veto" à la Commission. Pour le Parlement, le fait que le retrait ou la modification de propositions législatives soit régi par les même principes généraux que ceux qui s'appliquent à la présentation de propositions par la Commission reste incertain et uniquement dicté par l'intérêt communautaire. Il importe donc que la Cour de justice précise le champ d'application et les limites des prérogatives conférées aux institutions par les traités ainsi que des orientations communes pour le retrait ou la modification de propositions législatives par la Commission. Ces orientations viendraient compléter les principes pertinents déjà fixés dans l'accord-cadre sur les relations entre le Parlement et la Commission et dans l'accord interinstitutionnel "Mieux légiférer" et constituerait une étape importante vers la simplification du processus législatif et la relance du dialogue entre les institutions.

Il propose en conséquence que l’on applique les orientations suivantes pour le retrait et la modification des propositions législatives présentées par la Commission:

a)      la Commission peut, en principe, retirer ou modifier une proposition législative tout au long des procédures conduisant à l'adoption d'un acte communautaire, tant que le Conseil n'a pas statué (donc, la Commission n'est plus habilitée à le faire dans les procédures de codécision et de coopération, dès lors que le Conseil a adopté sa position commune);

b)      la Commission s'engage à tenir dûment compte de la position du Parlement et donc du rejet d'une proposition législative par le Parlement, de l'invitation de ce dernier à la modifier de façon substantielle, ainsi que de toute demande du Parlement de retirer ou de modifier de façon substantielle une proposition législative. Si, pour des raisons majeures, la Commission décide de ne pas suivre la position exprimée par le Parlement, elle doit en exposer les raisons dans une déclaration au Parlement;

c)      la Commission s'engage, si elle envisage de sa propre initiative de retirer ou de modifier une proposition législative, d'en informer au préalable le Parlement; il y a lieu d'effectuer cette notification en temps utile pour que le Parlement puisse exprimer son avis sur la question (cette notification devant exposer clairement les raisons qui amènent la Commission à retirer ou à modifier le texte et si la Commission décide de ne pas tenir compte de l’avis du PE, de justifier sa position dans une déclaration au Parlement).

Le Parlement indique enfin que si la Commission venait à retirer ou à modifier de manière substantielle une proposition législative, de sorte que les prérogatives législatives du Parlement en seraient affectées, il saisirait les organes politiques appropriés en son sein pour un examen politique (si par exemple la Commission vient à retirer une proposition législative affectant en particulier les prérogatives des deux branches de l'autorité législative, le Parlement pourrait considérer ce retrait comme nul et non avenu et poursuivre la procédure).