Rapport sur le rapport annuel sur les droits de l'homme dans le monde en 2005 et sur la politique de l'Union

2005/2203(INI)

En adoptant par 522 voix pour, 32 contre et 15 abstentions, le rapport d’initiative de M. Richard HOWITT (PSE, UK), le Parlement européen estime que beaucoup reste à faire pour favoriser les droits de l’homme dans le monde et pour faire en sorte que la voix de l’Union soit entendue. Contrairement aux années précédentes, le rapport ne porte pas seulement sur la situation des droits de l'homme dans le monde mais il évalue spécifiquement les actions de l'Union européenne dans ce domaine. Il met en évidence les actions du Conseil méritant d'être saluée ou critiquée ainsi que les activités menées spécifiquement par le Parlement. Globalement, le Parlement s’est félicité du fait que l’UE soit de plus en plus active sur la scène internationale en vue de renforcer les droits de l’homme mais ces efforts restent l’apanage de quelques spécialistes et il n’existe toujours pas d’approche systématique ou durable de l’UE sur la question du respect des droits de l’homme dans les pays tiers : il importe donc que celle-ci intègre ce principe dans ses politiques commerciales d’aide au développement et dans sa politique extérieure en général. Pour le Parlement, l’urgence est de définir une politique commune et cohérente de promotion des droits de l’homme, mise en œuvre par tous les États membres et que l’Union mette sur pied une structure intégrée qui rende contraignante la Charte des droits fondamentaux.

Les autres questions abordées par le Parlement peuvent se résumer comme suit

  • Rapport annuel du Conseil : globalement, le Parlement se félicite de la présentation publique du rapport par le Conseil lors de sa séance plénière de décembre 2005. Il suggère qu’à l’avenir la priorité soit accordée à l’analyse et à la mise en œuvre des lignes directrices de l’Union en la matière et que le rapport se concentre sur la manière dont les droits de l’homme sont pris en compte dans la dimension extérieure de l’Union (développement, commerce, etc.).
  • Activités des présidences : Le Parlement se réjouit des efforts déployés par la Présidence britannique pour faire avancer l'abolition de la peine de mort dans le monde et pour promouvoir la liberté d'expression. Il salue les efforts de la Présidence autrichienne pour poursuivre la pratique des démarches auprès de tous les partenaires internationaux de l'UE en vue de la ratification des conventions internationales interdisant l'usage de la torture.
  • Actions de l’Union en faveur des droits de l’homme sur la scène internationale : le Parlement se félicite de voir les questions relatives aux droits de l'homme intégrées dans la Politique européenne de voisinage (PEV) et recommande une efficacité accrue des activités de l'UE en matière d'observation d'élections. Il félicite le Conseil pour avoir imposé des sanctions à l'Ouzbékistan et réaffirme sa condamnation de la violente répression intervenue en Éthiopie ou des violations des droits de l'homme commises en Tunisie. Le Parlement s'inquiète de la détérioration de la situation au Darfour sur le plan de la sécurité, des rapports continuels énumérant la longue liste des violations des droits de l'homme en Chine, des exécutions extrajudiciaires, des disparitions et des tortures de détenus en Tchétchénie, ainsi que du maigre bilan de l'Iran dans le domaine des droits de l'homme. Le Parlement fait également état de craintes concernant des violations des droits de l'homme en Irak, mais salue l'aide apportée par l'UE au nouveau gouvernement en place dans ce pays. Le Parlement invite le Conseil et la Commission européenne à demander au gouvernement américain de fermer immédiatement le centre de détention de Guantanamo et de garantir aux prisonniers de ce centre un procès équitable. Il précise qu'il attend le rapport et les conclusions de la commission d'enquête temporaire créée par le Parlement pour examiner les accusations d'implication de la CIA et, éventuellement, d'États membres de l'UE ou d'États candidats à l'adhésion, dans le processus de « reddition extraordinaire », ce qui implique le transfert de détenus vers des sites secrets dits "black sites", où ils peuvent être soumis à la torture.

Le Parlement déplore encore que l'Union européenne ne s'attaque pas, de manière systématique et permanente, aux problèmes relatifs aux droits de l'homme et le fait que les "activités" déployées par l'UE dans ce domaine dans le cadre des Nations unies soient beaucoup trop introverties. Il souhaite qu'une part plus significative des fonds affectés à l'Initiative européenne pour la démocratie et les droits de l'homme soit investie dans des projets de base sur le terrain.

Sur la scène internationale toujours, le Parlement souhaite que l’Union renforce sa voix dans des enceintes essentielles comme celle des Nations Unies : il demande en particulier que le Conseil et la Commission refusent systématiquement d’attribuer la présidence du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies aux pays qui ne les respectent pas. Pareillement, le Parlement appelle tous les pays tiers à ratifier toutes les conventions de l’OIT, la convention sur les droits des handicapés et le Statut de Rome sur la CPI.

  • Rôle du Parlement renforcé : le Parlement souhaite être étroitement associé à toutes les questions liées à la mise en œuvre d’une politique efficace de promotion des droits de l’homme : il en va ainsi de la question des dialogues bilatéraux de l’Union avec les pays tiers et de l’évaluation générale de ce dialogue.  Parallèlement, le Parlement souhaite que les rapports annuels à venir comportent une liste de "pays particulièrement préoccupants" au regard des lignes directrices de l'UE en matière de droits de l'homme. Des sanctions vis-à-vis de ceux qui bafouent régulièrement ces droits fondamentaux devraient être envisagées (en particulier, quand il s’agit des droits des enfants). Des mesures de transparence sont également envisagées : ainsi le Parlement demande la mise au point avec lui d’un système confidentiel d’information sur les pays qui font l’objet de démarches de la part de l’Union (26 cas en 2005). Le Parlement devrait être impliqué de manière plus directe dans l'élaboration des rapports annuels afin que ces documents reflètent les vues des trois grandes institutions européennes. Il estime toutefois qu’il doit continuer à publier son propre rapport en vue d'évaluer la politique des droits de l'homme de l'UE et d'exercer ainsi son contrôle parlementaire.
  • Programmes d’assistance extérieure de l’UE : le Parlement réaffirme qu’il faut créer pour la période 2007-2013 un instrument individuel et spécifique pour la promotion des droits de l’homme. En effet, même si cette dimension doit faire partie intégrante des 4 grands programmes d’action extérieure, il faut un 5ème instrument spécifique pour compléter la programmation thématique. Constatant que l’initiative IEDDH a permis d’engager quelque 125 mios EUR en projets divers, le Parlement estime que ce montant reste mince face aux besoins existants. En outre, une attention particulière devrait être accordée aux petits projets menés par des petites ONG locales. Le FED devrait également renforcer son volet « droits de l’homme ».
  • Clause « droits de l’homme » dans les accords : le Parlement reconnaît que la clause « droits de l’homme » introduite dans les accords bilatéraux constitue un engagement positif des pays tiers vis-à-vis de l’amélioration de la situation sur leur territoire. S’il accepte le principe d’une suspension temporaire de l’aide dans les pays qui bafouent les droits de l’homme, le Parlement réitère son point de vue selon lequel il faut échelonner les sanctions et appliquer un panel de mesures graduelles. Il demande en particulier, l’extension du vote à la majorité qualifiée sur les décisions de suspension de l’aide ainsi qu’une meilleure association du Parlement sur cette question
  • Intégration de la dimension droits de l’homme : le Parlement demande à la BEI d’incorporer les préoccupations de droits de l’homme lorsqu’elle octroie des prêts à des pays tiers et que la Commission réévalue régulièrement les pays qui bénéficient du SPG+ : Venezuela, Moldavie, Sri Lanka, Mongolie, Salvador, Guatemala et Colombie, notamment. La dimension « droits de l’homme » doit également être réévaluée dans les études stratégiques par pays et par régions et dans les différentes actions thématiques. De son côté, la politique interne de l’Union se doit d’être particulièrement exemplaire en la matière.
  • Efficacité des interventions du PE : le Parlement se félicite des activités de sa sous-commission « droits de l’homme » et souhaite que ses activités soient renforcées à l’avenir. Il souhaite, par ailleurs, contrôler plus intensivement les actions menées par le Conseil et la Commission et évaluer l’impact des actions menées sur le terrain. Les travaux des commissions du PE pourraient à cet égard, servir d’ »Observatoire des développements politiques dans les pays tiers », en collaboration avec les Parlement nationaux.

Ressources octroyées à la politique de défense des droits de l’homme : en guise de conclusion, le Parlement demande à la Commission de :

Ø      désigner dans chaque délégation des pays tiers où elle est présente, un « Monsieur droits de l’homme » chargé de suivre l’application des droits fondamentaux dans le pays concerné,

Ø      renforcer l’unité « droits de l’homme » de la Direction générale RELEX de la Commission en prévoyant du personnel supplémentaire,

Ø      octroyer des crédits supplémentaires à cette politique notamment pour des actions sur le terrain,

Ø      renforcer l’unité « droits de l’homme » au sein du Secrétariat général du Conseil,

Ø      mettre à la disposition des représentants spéciaux de l’Union dans les pays tiers un expert « droits de l’homme » dûment formé.