Sécurité et santé au travail: exposition des travailleurs au bruit

1992/0449A(COD)

OBJECTIF : fixer des prescriptions minimales en matière de protection des travailleurs contre les risques résultant d'une exposition au bruit.

ACTE LÉGISLATIF : Directive 2003/10/CE du Parlement européen et du Conseil concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé relatives à l'exposition des travailleurs aux risques dus aux agents physiques (bruit). Dix-septième directive particulière au sens de l'article 16, paragraphe 1, de la directive 89/391/CEE.

CONTENU : La présente directive complète la directive 89/391/CEE du Conseil du 12 juin 1989 visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé au travail et s'applique plus spécifiquement  à l'exposition des travailleurs au bruit.

Pour rappel, cette directive est la deuxième étape d'un processus initié en 1992 avec la présentation par la Commission d'une proposition de directive sur l'exposition des travailleurs aux agents physiques qui incluait l'exposition des travailleurs à 4 types d'agents: le bruit, les vibrations mécaniques, les champs électromagnétiques et les rayonnements optiques. Cette proposition fut toutefois abandonnée au profit d'un texte se penchant sur chacun des agents concernés.

Champ d'application et principe de la directive :

La directive fixe des prescriptions minimales laissant aux États membres la possibilité de maintenir ou d'adopter des dispositions plus favorables en la matière. Elle vise à réaménager les mesures déjà prévues par la directive 86/188/CEE sur la protection des travailleurs exposés au bruit pendant le travail, en tenant compte des progrès techniques et scientifiques mis en lumière depuis son adoption. Toutefois, le niveau actuel des connaissances ne permettant pas de définir des niveaux précis d'exposition, la directive se borne à définir les objectifs à atteindre afin de permettre l'application d'un socle minimal en matière d'exposition des travailleurs au bruit.

Dans ce contexte, la directive fixe 3 types de seuils d'exposition au bruit calculés en fonction de paramètres physiques qui sont la pression acoustique de crête (valeur maximale de la pression acoustique instantanée), le niveau d'exposition quotidienne au bruit et le niveau d'exposition hebdomadaire. Ces seuils d'exposition sont :

- la valeur limite d'exposition quotidienne fixée à 87 décibels (dB) avec une pression acoustique de crête de 200 Pa;

- des valeurs déclenchant l'action fixées respectivement à 80 dB pour la valeur la plus basse (et pression acoustique de crête limitée à 112 Pa) et 85 dB pour la valeur supérieure (et pression acoustique de crête limitée à 140 Pa, conformément au vœu du Parlement européen). Ces deux valeurs doivent s'entendre comme des valeurs au-delà desquelles l'employeur devra prendre des mesures prescrites dans la directive. La valeur limite d'exposition ne pourra par contre pas être dépassée et devra être calculée en tenant compte de mesures d'atténuation du bruit telles que le port de protecteurs auditifs individuels par les travailleurs.

Des mesures dérogatoires à l'application de ces mesures sont prévues mais le seuil de 87 dB ne pourra pas être dépassé.

Obligations de l'employeur : la directive prévoit 6 types d'obligations:

1) Détermination et évaluation des risques : l'employeur devra évaluer et si nécessaire mesurer les niveaux de bruit auxquels les travailleurs sont exposés. Lors de cette évaluation et dans le contexte des mesures déjà prévues par la directive 89/391/CEE, l'employeur devra tenir compte d'une série de paramètres dont notamment le niveau, le type et la durée d'exposition, les valeurs limites d'exposition et les valeurs déclenchant l'action, l'exposition de travailleurs appartenant à des groupes à risques, les interactions éventuelles entre le bruit et les vibrations, l'existence d'équipements de travail de remplacement conçus pour réduire les émissions sonores, la prolongation de l'exposition au bruit au-delà des heures de travail, des informations sur la surveillance de la santé ou la mise à disposition de protecteurs auditifs. Une fois en possession de cette évaluation, l'employeur devra prendre une série de mesures fixées par la directive et consigner les résultats sur un support approprié pour en permettre la consultation ultérieure;

2) Réduction des risques : tout doit être fait pour réduire au maximum ou supprimer le risque d'exposition au bruit à sa source. Outre les mesures déjà prévues à la directive cadre, il est prévu de mettre en place une série de mesures techniques et/ou organisationnelles en vue de réduire l'exposition au bruit (choix d'équipements de travail appropriés ; agencement des lieux de travail; information et formation des travailleurs; utilisation de moyens techniques pour réduire le bruit ; meilleure organisation du travail). Ces mesures s'appliquent tout particulièrement si le seuil de 85dB est dépassé (en particulier, signalisation et limitation de l'accès aux lieux de travail exposés);

3) Protection individuelle : conformément au souhait du Parlement européen, si d'autres moyens ne permettent pas d'éviter les risques, des protecteurs auditifs individuels sont mis à la disposition des travailleurs lorsque le bruit dépasse 85 dB ;

4) Limitation de l'exposition : si en dépit des mesures prises pour mettre en oeuvre la directive, le seuil de 87dB est dépassé, l'employeur prend immédiatement des mesures pour réduire l'exposition et pour adapter les mesures prévues;

5) Information et formation des travailleurs : l'employeur devra veiller à ce que les travailleurs exposés à un niveau sonore égal ou supérieur à 80 dB et/ou leurs représentants reçoivent des informations et une formation adéquate sur l'exposition au bruit notamment sur les risques encourus, les mesures en vue de les supprimer, l'existence de valeurs limites d'exposition et de valeurs déclenchant l'action, l'utilisation correcte de protecteurs auditifs; la façon de dépister des symptômes d'altération de l'ouïe, etc.;

6) Consultation et participation des travailleurs : les travailleurs et/ou leurs représentants devront être consultés sur l'évaluation des risques et les mesures à prendre. Ils devront également être consultés sur le choix des protecteurs auditifs individuels.

Surveillance de la santé : outre ces 6 obligations générales, la directive prévoit des mesures spécifiques sur la surveillance de la santé des travailleurs en vue de préserver leur ouïe. Conformément au vœu du Parlement européen, lorsque les niveaux de bruit dépassent 85 dB, les travailleurs ont le droit à un contrôle de leur ouïe et si le niveau d'exposition dépasse 80 dB, ils ont droit à un examen audiométrique préventif. Ces contrôles ont pour objectif de diagnostiquer précocement toute perte auditive et à préserver l'ouïe des travailleurs. Ceux-ci pourront bénéficier d'un dossier médical personnel qu'ils pourront consulter ultérieurement.

Des dispositions sont prévues pour définir les modalités de cet examen audiométrique. Le travailleur devra être informé du résultat de l'examen et si une exposition excessive est avérée, des mesures devront être prises pour supprimer ou réduire les risques (ex. : en changeant le travailleur de poste).

Dérogations : dans des cas exceptionnels et si l'utilisation de protecteurs auditifs individuels peut entraîner un risque plus grand pour la santé ou la sécurité du travailleur que leur non-utilisation, les États membres peuvent déroger à l'obligation de protection individuelle. Ces dérogations font l'objet d'un réexamen tous les 4 ans.

Dans les secteurs de la musique et du divertissement, les États membres seront autorisés à recourir à une période transitoire de 2 ans pour élaborer un code de conduite permettant aux travailleurs et employeurs de ces secteurs de respecter la directive.

Tous les 5 ans, les États membres devront soumettre un rapport à la Commission sur la mise en oeuvre de la directive. Sur la base de ces rapports, la Commission procèdera à une évaluation d'ensemble. Des modifications techniques pourront en outre être apportées  à la directive en fonction du progrès techniques ou des connaissances portant sur le bruit.

ENTRÉE EN VIGUEUR : 15.02.2003. La directive 86/188/CEE est abrogée.

TRANSPOSITION DANS LES ÉTATS MEMBRES : 15.02.2006 sauf pour le secteur du divertissement et de la musique (15.02.2008) et pour le personnel embarqué sur les navires de mer (15.02.2011).