Réduction de l’impact de l’aviation sur le changement climatique

2005/2249(INI)

En adoptant par 439 voix pour, 74 contre et 102 abstentions le rapport d’initiative de Mme Caroline LUCAS (Verts/ALE, UK), le Parlement européen se rallie largement à la position de sa commission au fond et salue la communication de la Commission sur la réduction de l'impact de l'aviation sur le changement climatique.

Ce faisant, le Parlement se félicite que la Commission européenne ait pris conscience de la nécessité de prendre des mesures étendues dans ce domaine incluant des instruments juridiques, économiques, technologiques et opérationnels, afin de traiter en totalité les impacts environnementaux de l'aviation, en appliquant le principe du pollueur-payeur et en assurant une internalisation totale des coûts.

Estimant que l'objectif global des instruments politiques doit viser la réduction, de manière efficace au niveau des coûts, de l'impact de l'aviation sur les changements climatiques, le Parlement considère que ces instruments doivent d’abord être choisis de manière à veiller à ce que la réduction des émissions de gaz à effet de serre soit aussi élevée que possible tout en limitant la distorsion de la concurrence entre les transporteurs aériens européens et les transporteurs aériens des pays tiers. Le Parlement estime qu’il faut réduire les émissions polluantes tout en évitant la concurrence inéquitable entre le secteur du transport aérien et les autres types de transport.

Le Parlement soutient pleinement l'intention de la Commission d’instaurer une taxe sur le kérosène, et appelle celle-ci à agir rapidement en demandant une taxe sur tous les vols domestiques et intracommunautaires et en prévoyant la possibilité d'en exempter tous les transporteurs opérant sur des routes fréquentées par des transporteurs extracommunautaires. Par la même occasion, il invite la Commission à élaborer les modalités de cette introduction au niveau planétaire. Pour le Parlement, il est urgent d'obtenir des résultats dans ce domaine dans le cadre des renégociations en cours sur les accords de service aérien, notamment avec les États-Unis afin de permettre une taxation du carburant fourni aux transporteurs communautaires et extracommunautaires sur une base équitable.

Il rappelle que toute exemption de taxes sur le transport aérien aboutit à une distorsion de concurrence entre l'aviation et les autres secteurs de transport et défavorise tout particulièrement le transport ferroviaire, soumis non seulement à des taxes, mais également au système communautaire d'échange de quotas d'émission (SCEQE) qui rend ce mode de transport particulièrement onéreux. Il encourage donc l'instauration de redevances permettant de faire progresser l'internalisation totale des coûts.

Á la faveur d’un amendement PPE-DE approuvé en Plénière, le Parlement demande que l'on accorde une attention particulière à la situation des territoires les plus isolés, particulièrement tributaires des services de transport aérien et, plus spécialement, aux régions insulaires ou ultrapériphériques où les solutions de remplacement sont limitées voire inexistantes.

Le Parlement estime qu’il est urgent d'améliorer la gestion du trafic aérien pour réduire les émissions de CO2, la formation de traînées de condensation et de cirrus et appelle à une intensification des efforts de recherche dans le domaine des effets de l'aviation sur le changement climatique. Il s’inquiète tout particulièrement des effets des traînées de condensation des aéronefs (vapeur d'eau) et de la question de savoir dans quelle mesure le fait de voler à basse altitude pourrait réduire les émissions polluantes.

Parallèlement, le Parlement invite la Commission à promouvoir l'introduction de biocarburants pour l'aviation en tant que contribution à la réduction des répercussions sur le changement climatique. Il estime également qu’il faut accorder la priorité à la recherche dans le contexte du 7ème programme-cadre en matière de RDT en vue de développer des technologies de moteurs propres et de carburants de substitution. Dans ce contexte, le Parlement invite la Commission à améliorer le contrôle et la gestion du trafic aérien dans le cadre du système européen de nouvelle génération pour la gestion du trafic aérien (SESAR) et de la législation relative au ciel unique européen.

Le Parlement fait, par ailleurs, d’autres propositions plus techniques :

  • Inclusion de l'aviation dans le SCEQE de l'Union européenne : conscient que l'échange d'émissions peut jouer un rôle essentiel dans le contexte des mesures traitant des impacts de l'aviation sur le climat, le Parlement estime que ce système ne sera vraiment efficace que si son champ d'application géographique est suffisamment large, que si un plafond strict est imposé, que si l'allocation initiale fait l'objet d'une vente aux enchères, que le niveau technologique et les actions prises à un stade précoce sont pris en considération dans l'allocation et que l'impact climatique est intégralement pris en charge. Il propose en particulier l'instauration d'un système distinct applicable aux émissions de l'aviation, sachant que le secteur de l'aviation serait en réalité incapable de les vendre dans le cadre du SCEQE en raison de l'absence d'obligations contraignantes en matière d'émissions de l'aviation internationale dans le cadre de la CCNUCC et du protocole de Kyoto.

Á la faveur d’un amendement PPE-DE approuvé en Plénière avec l’appui de M. Chris DAVIES (ALDE, RU), le Parlement demande à la Commission de présenter une étude d'impact sur les paramètres spécifiques de ses propositions (niveau des limites pour l'aviation, respect des dispositions, choix des entités participantes comme les opérateurs de transport aérien, les compagnies aériennes ou les aéroports) et de présenter des propositions destinées à assurer que les SCEQE soient applicables aux compagnies aériennes des pays tiers. Le Parlement suggère qu’une phase pilote, sous forme de système séparé, soit instaurée pour la période 2008-2012 avant l'intégration finale de l'aviation dans un SCEQE global. Dans l'optique de l'intégration finale de l'aviation dans le SCEQE global, le Parlement propose encore l'application de conditions particulières afin d'empêcher toute distorsion du marché par rapport à des secteurs moins protégés. Il pourrait s’agir d’un plafond applicable au nombre de droits d'émission qu'il serait possible d’acheter sur le marché ainsi que d'une norme rendant obligatoire la réalisation d'une partie des réductions d'émissions nécessaires sans recourir au trading avant de pouvoir acheter des permis. D’autres instruments politiques pourraient être proposés, fondés sur le principe de précaution, en vue de lutter par exemple contre la pollution atmosphérique et sonore pendant les décollages et les atterrissages des avions.

  • Champ d'application du système propre à l'aviation : comme 1ère étape, le système propre à l'aviation devrait couvrir tous les vols à destination et en provenance de l'Union (et, si possible, également les vols intercontinentaux transitant par l'espace aérien de l'Union), indépendamment du pays d'origine de la compagnie aérienne concernée, afin d'éviter les distorsions du marché en faveur de vols à destination de pays extracommunautaires. Le Parlement invite la Commission et le Conseil à défendre cette position contre les objections soulevées éventuellement par des pays tiers au sein d'organisations internationales.
  • Allocation initiale : le Parlement estime que cette allocation initiale devrait être fonction de l'objectif découlant de l'engagement de Kyoto et ne devrait, en aucun cas, permettre une augmentation des émissions par rapport à l'année de référence. Celle-ci devrait être fixée au niveau communautaire et ne devrait pas être conçue pour sanctionner, directement ou indirectement, les compagnies ayant déjà mis en place des aéronefs efficaces.
  • Méthode d'allocation : pour le Parlement, la vente aux enchères est le meilleur mode de distribution des quotas, étant donné qu'il reflète la nature dynamique du secteur. Elle satisfait également le principe du pollueur-payeur et récompense automatiquement les bonnes performances passées et à venir des opérateurs. Une éventuelle allocation gratuite partielle des droits ne devrait pas discriminer les opérateurs entrant dans le système ou conduire à des bénéfices inattendus pour le secteur aux dépens du consommateur.