Le Parlement européen a décidé de reporter le vote final sur les rapports de Kinga GÁL (PPE-DE, HU) et Magda KÓSÁNÉ KOVÁCS (PSE, HU) portant sur la création de l'Agence européenne des droits fondamentaux de l'UE en vue d'insister sur la nécessité d’étendre la compétence de l’Agence à la coopération intergouvernementale pour les questions de maintien de l'ordre, de justice, d'immigration et de lutte contre le terrorisme. Ce faisant, les députés ont voulu laisser du temps à la Commission pour négocier un compromis avec le Conseil au sein duquel plusieurs délégations repoussent l’idée que l'Agence puisse traiter non seulement de questions relevant du 1er pilier mais aussi celles du 3ème de pilier (voir aussi CNS/2005/0125)
Le Parlement s’est donc totalement rallié à la position de sa commission au fond et a repris, en bloc, les 43 amendements de sa commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures. Il a en outre massivement rejeté (par 113 voix pour, 489 voix contre et 16 abstentions) une proposition de rejet de la proposition de la Commission, présentée par le groupe IND/DEM.
Sur le fond, la Plénière amende largement la proposition pour que celle-ci voie les tâches de l’Agence élargies. Parmi les amendements les plus importants, on relèvera notamment ceux qui visent à :
- faire en sorte que l’Agence reprenne les tâches de l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes en focalisant également ses activités sur la défense des minorités ;
- inclure dans les tâches de l’Agence, outre la collecte d'informations, une fonction de conseil destinée à l'UE et à ses États membres ainsi que la publication de rapports annuels sur les questions des droits fondamentaux ;
- prévoir la possibilité pour toutes les institutions de l’Union de demander des avis sur leurs propositions législatives ou la compatibilité des textes européens avec les droits fondamentaux et la possibilité spécifique pour le PE, le Conseil et la Commission de demander une expertise technique à l’Agence dans le cadre de la procédure engagée par l’article 7 du TUE (situation des droits de l’homme dans un État membre) ;
- ouvrir son champ d’action à la sensibilisation du public aux droits fondamentaux et à la publicité de ses propres activités ;
- envisager la possibilité pour l’Agence de coopérer avec les États membres qui nommeraient dans ce contexte des agents de liaison nationaux pour mieux coopérer ;
- s’assurer que l’Agence puisse également recueillir des informations auprès des organes compétents du Conseil de l’Europe ou d’autres organismes internationaux au niveau approprié ;
- prévoir que l’Agence puisse promouvoir le dialogue avec la société civile et coopérer avec les ONG et les institutions de la société civile qui oeuvrent dans le domaine des droits fondamentaux : dans ce contexte, le Parlement suggère la mise en place d’une « plateforme des droits fondamentaux » ou réseau de coopération avec toutes les parties pertinentes (incluant toute une série d’organes représentatifs dont les syndicats, les églises et des experts en droits fondamentaux universitaires ou non) ;
- asseoir les activités de l’Agence sur les compétences d’un comité scientifique à désigner et composé de 11 experts indépendants garantissant la qualité du travail scientifique de l’Agence ;
- prévoir une juste représentation des femmes dans les instances délibératives et décisionnelles de l’Agence ;
- mieux définir les compétences des personnes devant faire partie du conseil d’administration de l’Agence, leurs mandats (5 ans, non renouvelable) ainsi leurs fonctions en général. Le Parlement revoit notamment le mode de fonctionnement des organes de gestion de l’Agence et de ses activités internes. Il modifie également en profondeur le mode de désignation du directeur de l’Agence.
Par ailleurs, le Parlement prévoit un net renforcement de la prise en compte de ses avis dans le développement des activités de l’Agence. Il demande notamment à être consulté avant l’adoption du cadre pluriannuel de l’Agence et lors de la nomination de son directeur. Ce cadre devrait s’étaler sur 5 ans et être compatible avec les objectifs stratégiques de l’Union.
Le Parlement n’est pas favorable à la création d’un forum consultatif qu’il supprime (il lui préfère la « plateforme des droits fondamentaux » nettement plus investie dans les choix de l’Agence). Il demande en outre que l’Agence traite non seulement des questions des droits fondamentaux dans les États membres mais soit également ouverte à la participation des pays candidats et des pays avec lesquels la Communauté européenne a conclu un accord de stabilisation et d'association.
Il étend également le statut des fonctionnaires des CE aux agents de l’Agence et modifie les règles comitologiques liées au processus décisionnel au sein de l’Agence. Il attend de cette dernière qu’elle analyse en profondeur son champ d’action et ses méthodes de travail pour savoir s’il n’est pas nécessaire de les modifier. Cette évaluation (externe et indépendante) devrait intervenir au plus tard le 31 décembre 2011 plutôt que le 31 décembre 2009 comme l’avait prévu la Commission. Des mesures de transparence sont également réclamées dans les activités et les documents publiés par l’Agence.
Enfin, le Parlement demande que l’Agence maintienne son siège à Vienne dans le prolongement de l’Observatoire des phénomènes racistes et xénophobes.