OBJECTIF : proposer une nouvelle directive relative à la protection de l’environnement par le droit pénal.
ACTE PROPOSÉ : Directive du Parlement européen et du Conseil.
CONTEXTE : la présente proposition vise à remplacer la proposition de directive du Parlement et du Conseil relative à la protection de l’environnement par le droit pénal de 2001 (voir fiche de procédure COD/2001/0076 et fiche de synthèse s’y rapportant) en vue de mettre en œuvre les conclusions formulées par la Cour de justice des Communautés dans son arrêt du 13 septembre 2005 (C-176/03, Commission contre Conseil).
Pour rappel, la Cour avait annulé la décision-cadre 2003/80/JAI proposée par le Danemark (et concurrente de la proposition de la Commission de 2001), décision-cadre finalement adoptée par le Conseil en lieu et place de la proposition de directive pour des raisons juridiques. Refusant l’option du Conseil, la Commission avait alors porté l’affaire devant la Cour qui avait finalement donné raison à la Commission. Da ns son arrêt de 2005, celle-ci disposait en effet que « la Communauté pouvait prendre des mesures en relation avec le droit pénal des États membres […] pour garantir la pleine effectivité des normes qu’elle édicte en matière de protection de l’environnement », comme le prévoyait la proposition de la Commission de 2001.
Outre la nécessité de légiférer dans ce domaine, l’arrêt de la Cour impliquait également le retrait de la proposition de 2001 et la présentation d’une nouvelle proposition intégrant plusieurs modifications destinées à tenir compte de l’évolution de la législation communautaire en matière d’environnement. C’est précisément l’objet de la présente proposition de directive.
CONTENU :
Principe : la directive proposée définit un ensemble minimal d’infractions graves en matière d’environnement qui doivent être considérées comme des infractions pénales dans toute la Communauté lorsqu’elles sont commises de propos délibéré ou par négligence au moins grave. La participation à de telles activités et l’incitation à les exercer doivent également être considérées comme des infractions pénales.
Les infractions envisagées devront être passibles de sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives lorsqu’elles seront commises par des personnes physiques et, de sanctions pénales ou non pénales lorsqu’elles le sont par des personnes morales.
Base juridique : les dispositions de la présente directive portent sur la protection de l’environnement. En conséquence, la base juridique choisie est l’article 175, paragraphe 1, du traité CE.
Définition des infractions : les définitions correspondent en grande partie à celles énoncées dans la décision-cadre 2003/80/JAI (voir CNS/2000/0801) et prennent également en considération certains amendements du Parlement européen apportés à la proposition de directive originale (2001) et acceptés par la Commission à la suite de la 1ère lecture (voir COD/2001/0076).
Pour l’essentiel, les infractions concernent : le rejet, l’émission ou l’introduction dans l’environnement de matières illicites (la nouvelle proposition ayant préféré le terme de « matières » plutôt que de « substances » comme prévu à la décision-cadre du Conseil dans la mesure où le terme «matières» est plus général) ainsi que du traitement, de l’élimination, du stockage et du transport illicites de déchets dangereux susceptibles de causer des dommages substantiels à l’environnement ou aux personnes.
La plupart des infractions dépendent du résultat des activités mises en œuvre, notamment du fait que celles-ci nuisent ou sont susceptibles de nuire gravement aux personnes ou à l’environnement.
Toutes les infractions (sauf une) supposent la commission d’actes «illicites», le terme «illicite» désignant ce qui viole les textes de loi communautaires ou nationaux, les règlements administratifs ou les décisions d’une autorité dans le domaine de la protection de l’environnement. Dans la seule infraction autonome (article 3, point a), le résultat, à savoir le décès d’une personne ou toute lésion sérieuse causée à une personne, est d’une gravité telle que l’exigence d’illégalité n’est pas nécessaire pour justifier la criminalisation.
Une infraction concernant la dégradation substantielle illicite d’un habitat protégé a été ajoutée. En outre, une infraction spécifique relative aux transferts illicites de déchets a été incorporée, qui tient compte de la nouvelle législation communautaire. Les transferts illicites de déchets ne doivent être considérés comme des infractions pénales que dans les cas graves, lorsqu’ils portent sur des quantités non négligeables et sont effectués à des fins lucratives.
Á noter que plusieurs infractions sont associées à des termes relativement vagues, tels que «dommages substantiels» ou «graves lésions». Ces termes ne sont pas définis, le soin étant laissé aux États membres de les interpréter en fonction de leurs traditions et de leur système juridique.
Responsabilité des personnes morales : les États membres devront faire en sorte que les personnes morales puissent être tenues pour responsables des infractions commises pour leur compte par certaines personnes agissant en leur nom ou lorsque le défaut de surveillance ou de contrôle a rendu possible l’intervention de ces personnes. On ne précise pas si la responsabilité des personnes morales doit être pénale. Les États membres qui ne reconnaissent pas la responsabilité pénale des personnes morales dans leur droit national ne sont donc pas obligés de modifier leur dispositif.
Sanctions : les sanctions appliquées à l’égard des infractions commises au détriment de l’environnement doivent être effectives, proportionnées et dissuasives, tant pour les personnes physiques que pour les personnes morales. En complément de cette exigence, compte tenu des différences notables qui existent d’un État membre à l’autre entre les sanctions définies dans la législation, un rapprochement des niveaux de sanction a été prévu, au moins pour les cas particulièrement graves : ainsi il est proposé que les États membres rapprochent leurs législations pour que les peines obéissent à une échelle à 3 niveaux :
Cette échelle à 3 niveaux est conforme aux conclusions du Conseil «Justice et affaires intérieures» des 25 et 26 avril 2002 et tient compte de l’élément moral (négligence grave ou propos délibéré) et de la circonstance aggravante correspondante.
Le régime d’amendes applicable aux personnes morales suit également une approche à 3 niveaux correspondant à celle mise au point par le Conseil «Justice et affaires intérieures» pour les peines d’emprisonnement. La fourchette des amendes prévues pour les personnes morales est similaire à celle adoptée par le Conseil dans la décision-cadre 2005/667/JAI sur la pollution causée par les navires (à savoir, en fonction de la gravité de l’infraction de 300.000 à 500.000 EUR –cas de négligence grave; de 500.000 à 750.000 EUR-négligence grave entraînant la mort ou des lésions aux personnes ; de 750.000 à 1,5 Mios EUR –actes délibérés entraînant la mort ou des lésions graves).
Les circonstances aggravantes pour lesquelles un rapprochement des sanctions est prévu sont définies par le résultat particulièrement grave d’une infraction, comme le décès d’une personne ou toute lésion grave causée à une personne, tout dommage substantiel à l’environnement ou bien encore la commission de l’infraction dans le cadre d’une organisation criminelle. Ces circonstances sont en général déjà considérées comme particulièrement graves dans le droit pénal des États membres et font déjà l’objet d’autres instruments communautaires.
Des sanctions alternatives sont suggérées tant pour les personnes physiques que pour les personnes morales. Ces sanctions, qui peuvent se révéler plus efficaces que des peines d’emprisonnement ou des amendes dans de nombreux cas, incluent l’obligation de réparer les dommages causés à l’environnement, le placement sous surveillance judiciaire, l’interdiction d’exercer des activités commerciales et la publication des décisions judiciaires.
Même si, dans bien des cas, la confiscation des objets en rapport avec le crime se révèle un moyen précieux, il n’a pas été considéré nécessaire de prévoir une disposition spécifique à cet égard, étant donné que la plupart des infractions graves commises au détriment de l’environnement relèvent du champ d’application de la décision-cadre 2005/212/JAI relative à la confiscation des produits, des instruments et des biens en rapport avec le crime.
Période de mise en œuvre : celle-ci est fixée pour les États membres à [18] mois, compte tenu du fait que les articles 3, 4 et 6, notamment, reprennent dans une large mesure le contenu des articles 2 à 6 de la décision-cadre 2003/80/JAI annulée. La période de mise en œuvre de cette décision-cadre s’est terminée le 27 janvier 2005, de sorte que les États membres auront déjà effectué une part non négligeable du travail de mise en œuvre requis pour la présente directive.