Espace de liberté, de sécurité et de justice: stratégie pour la dimension externe, plan d'action mettant en oeuvre le programme de La Haye

2006/2111(INI)

La Commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures a adopté à la quasi unanimité, le rapport d’initiative de M. Bogdan KLICH (PPE-DE, PL) sur la dimension extérieure de l'Espace de liberté, de sécurité et de justice (ELSJ). Ce faisant, les députés ont présenté une liste de recommandations au Conseil et à la Commission destinées à renforcer la stratégie externe de l’Union dans le domaine de l’ELSJ. Ces recommandations peuvent se résumer comme suit :

Accroître la responsabilité démocratique : dans ce domaine, les députés demandent :

  • que l’on améliore la consultation du Parlement sur tout accord international ayant un lien avec l'ELSJ ;
  • que l’on active la clause passerelle au titre de l'article 42 du TUE parallèlement au maintien du processus constitutionnel afin de renforcer le contrôle démocratique et judiciaire sur les matières concernées par la JAI et que la Commission présente une proposition formelle de décision activant l'article 42 du TUE ;
  • l’adoption de décisions-cadres relatives au stockage, à l'utilisation et à l'échange d'informations sur les condamnations pénales et à la codification des droits procéduraux dans le cadre des procédures pénales dans l'UE.

Principaux objectifs de la stratégie : pour les députés, l’Union et les États membres devraient :

  • utiliser les relations et les instruments qui lient traditionnellement l’UE à des pays tiers pour les inciter à adopter les normes et obligations pertinentes en matière de JAI ;
  • coordonner leurs actions respectives afin de garantir une réponse cohérente aux relations de l'UE avec les pays tiers et d'éviter les doubles emplois ;
  • accroître la cohérence des activités en matière de relations extérieures et intégrer systématiquement dans les politiques menées, les variables « droits de l'homme », « gouvernance démocratique » et « État de droit » dans les relations avec les pays tiers ;
  • renforcer la coordination entre les piliers du TUE et éviter les cas de doubles emplois entre les différents instruments relevant de l'ELSJ, de la PESD, de la PESC et de la Communauté ;
  • renforcer la coopération transatlantique en matière de liberté et de sécurité (ex. : dans les domaines de la lutte contre le trafic de drogue, la criminalité organisée et le terrorisme) : à cet égard, les députés ont réitéré leur appel à la fermeture de la prison de Guantánamo ;
  • favoriser individuellement ou avec les enceintes internationales appropriées, la résolution diplomatique et pacifique des conflits dans le monde ;
  • améliorer la coopération entre l'UE avec le Conseil de l'Europe et l'OSCE ;
  • renforcer la coopération régionale en matière de justice, de liberté et de sécurité avec l'Union africaine, le Moyen Orient et l'Europe de l'Est.

Pour sa part, la Commission est appelée à évaluer cette stratégie tous les 18 mois ainsi que des fonds utilisés dans ce domaine.

Renforcer la sécurité et les droits de l'homme : les députés ont également appelé le Conseil, la Commission et les États membres à :

  • promouvoir les droits de l'homme dans les relations entre l'UE et les pays tiers ;
  • garantir que les droits fondamentaux font partie intégrante de tout instrument, programme ou mesure opérationnelle en rapport avec la lutte contre le terrorisme ou la criminalité organisée, la migration, l’asile et la gestion des frontières ;
  • inclure une clause « droits de l'homme» dans les accords conclus avec les pays tiers et en évaluer l'efficacité ;
  • inclure dans toutes les initiatives ou documents de politique extérieure en matière de ELSJ, un rapport sur le respect des droits de l'homme à soumettre au Parlement européen ;
  • compléter les actions financées dans le domaine de l’ELSJ par des crédits spécifiques pour des projets liés à la protection et au respect des droits de l'homme ;
  • respecter le principe de non-extradition vers des pays où les personnes extradées risqueraient la torture et/ou la peine de mort.

Parallèlement, les parlementaires se sont inquiétés des protections juridiques insuffisantes accordées aux citoyens de l'UE en cas de transfert de leurs données personnelles (données PNR ou SWIFT) vers des pays tiers. Ils ont appelé la Commission à enquêter en la matière et demandé la mise en place rapide d’une politique unique en matière de protection des données couvrant à la fois les 1er et 3ème piliers. Pour les parlementaires, les échanges de données doivent intervenir dans le respect de la législation européenne assurant une protection appropriée de la vie privée et des libertés civiles et le partage de données avec les États-Unis doit s'inscrire dans le contexte juridique approprié de la coopération transatlantique. Les députés se sont également plaints de l'absence de contrôle démocratique dans les relations UE/États-Unis.

Renforcer la sécurité des citoyens face au terrorisme et la criminalité organisée : rappelant que la politique de l'UE en matière de lutte contre le terrorisme devrait être conforme aux principes de légitimité démocratique, de proportionnalité, d'efficacité et de respect des droits de l'homme, les parlementaires ont demandé que les impératifs des États membres en matière de sécurité ne compromettent en aucune façon le respect des droits fondamentaux de toute personne. Les États membres sont notamment appelés à prendre toutes les mesures nécessaires pour limiter la coopération avec les pays tiers qui protègent et/ou financent des organisations terroristes.

Les députés estiment également qu’il faut évaluer l'efficacité réelle des initiatives internationales dans le domaine des mesures antiterroristes (exemple: Patriot Act américain) et qu’il faut mettre en place une véritable politique communautaire en matière de terrorisme. Dans ce contexte, le Conseil est appelé à insérer des «clauses de lutte contre le terrorisme» dans les accords signés avec des pays tiers. Le Conseil devrait également exiger des pays tiers partenaires de ratifier une série de textes juridiques internationaux  pertinents dans le domaine de l’ELSJ.

En outre, la production, le stockage, le commerce, le transport, l'importation et l'exportation d'armes et d'explosifs devraient être interdits afin d'éviter toute utilisation abusive tant au sein de l'UE que dans les pays tiers.

Renforcer la coopération policière et judiciaire et la gestion des frontières : des mesures très concrètes ont été réclamées pour renforcer la coopération policière : meilleure utilisation des officiers de liaison, renforcement d’Europol, négociations d’accords de coopération policière standards avec les États-Unis, les pays visés par la politique de voisinage et d'autres partenaires, levée du régime de visas avec certains pays,…

En ce qui concerne la politique de contrôles aux frontières, les parlementaires ont estimé que cette politique était importante pour lutter efficacement contre l'immigration illégale. Il faut donc renforcer le soutien aux nouveaux États membres confrontés à une gestion nouvelle de contrôles des frontières.

Renforcer la solidarité internationale : dans ce domaine, les parlementaires ont essentiellement réclamé l’adoption d’une politique commune de l'UE en matière de migration. Ce faisant, ils ont réitéré leur demande de mise en œuvre rapide des conclusions du Conseil de Tampere et du programme de La Haye. Dans la foulée, ils ont invité le Conseil à introduire la codécision et le vote à la majorité qualifiée dans les domaines de la migration légale et de l'intégration ainsi que la mise en place d'un système européen commun d'asile.

Les parlementaires ont notamment souligné qu'une immigration bien gérée, en solidarité et en partenariat avec les pays tiers, pouvait apporter des avantages considérables, et que l'intégration des immigrés devrait être une composante clé de la future politique européenne en matière de migration.