Décharge 2005: budget général CE, section III, Commission

2006/2070(DEC)

En adoptant par 605 voix pour, 57 contre et 26 abstentions le rapport de M.  Salvador GARRIGA POLLEDO (PPE-DE, ES), le Parlement européen se rallie largement à la position de sa commission du contrôle budgétaire et souligne en premier lieu le nombre encore trop important d’erreurs qui affectent la gestion financière du budget de l’Union. S’il octroie la décharge à la Commission sur l’exécution du budget de l’Union pour 2005, le Parlement déplore une nouvelle fois les erreurs affectant les montants enregistrés dans le système comptable pourtant réformé de l’Union et appelle la Commission à corriger d'urgence ces insuffisances afin d'éviter qu'elles n'affectent la fiabilité des états financiers de 2006.

Suite aux demandes répétées du Parlement, la résolution indique que dorénavant le règlement financier prévoit que le comptable de la Commission ait la responsabilité de valider les comptes et de vérifier les informations reçues en matière de gestion des dépenses. Mais il faut aller encore plus loin et renforcer la transparence des informations à tous les niveaux.

DAS négative due à un nombre d’erreurs trop important: en matière de gestion budgétaire, le Parlement constate que les engagements restant à liquider (RAL) ont encore augmenté. Il s’insurge devant ce faible taux d'utilisation (particulièrement en ce qui concerne le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation) ainsi que devant les carences en matière de contrôle. Que ce soit en matière de PAC, de Fonds structurels, de politiques internes, d’actions extérieures, ou de préadhésion, le Parlement indique que les systèmes de surveillance et de contrôle doivent encore être améliorés car des insuffisances subsistent qui empêchent une fois de plus la Cour d’accorder une DAS (déclaration d'assurance) positive dans ce domaines.

C’est prioritairement au niveau du bénéficiaire final que les erreurs seraient les plus importantes. Il faut donc mobiliser toutes les parties prenantes, raison pour laquelle, une fois de plus, le Parlement en appelle aux États membres auxquels incombe la responsabilité d’éviter ce type d’erreurs. Il revient, en revanche, à la Commission la responsabilité de fixer un canevas clair sur la manière de prévenir, d'identifier et de corriger ces erreurs. Le Parlement invite donc la Commission à renforcer davantage la surveillance qu'elle exerce sur les contrôles délégués aux États membres et insiste pour que, lorsque ces systèmes de contrôle sont insuffisants, elle fixe des délais clairs et inflige des sanctions en cas de non-respect. Plus loin, le Parlement pose la question cruciale de savoir si, dans le contexte de la DAS, les systèmes de surveillance et de contrôle sont bien appliqués aux 2 niveaux, communautaire et national, et s'ils garantissent la légalité et la régularité des opérations sous-jacentes en ne se limitant pas au seul constat d’erreurs entachant les transactions.

Déclarations de gestion nationales : rappelant que, conformément à l'article 274 du TCE, chaque État membre doit assumer pleinement ses responsabilités en matière de gestion et limiter autant que possible le risque d'erreur, le Parlement indique qu’il est urgent que les États membres établissent un récapitulatif des contrôles des comptes et des déclarations disponibles et que l’on introduise une déclaration nationale au niveau politique approprié couvrant l'ensemble des fonds communautaires en gestion partagée. Une telle déclaration devrait pourrait intégrer plusieurs déclarations régionales pour les États décentralisés et favoriser la délivrance d'une DAS positive de la Cour. Et pourtant, force est de constater que cette approche n’est pas appréciée par un petit nombre d’États membres qui restent opposés à l'introduction de déclarations nationales. Il appelle dès lors la Commission à présenter au Conseil, avant la fin de l'année 2007, une proposition de déclaration de gestion nationale couvrant l'ensemble des fonds communautaires en gestion partagée et fondée sur des sous-déclarations régionales.

Rappelant que le dernier accord interinstitutionnel (AII) prévoit en son point 44 l'obligation, pour les autorités chargées du contrôle des comptes dans les États membres, d'évaluer dans quelle mesure les systèmes de gestion et de contrôle sont conformes à la réglementation communautaire, le Parlement demande que ces derniers élaborent annuellement un document analysant les faiblesses et les forces de leur propre système de gestion et de contrôle des fonds communautaires ainsi que des résultats des contrôles effectués. Ce document devrait être transmis au Parlement et au Conseil et le Conseil ECOFIN devrait ensuite procéder à une évaluation comparative du contrôle des fonds effectué.

Suspension des paiements : le Parlement soutient pleinement la Commission dans l'application rigoureuse de la législation en matière de suspension des paiements et se félicite des actions déjà entreprises dans ce contexte. Il estime qu’il s’agit là d’un moyen de pression qui contribuera à accroître l'intérêt des États membres pour l'utilisation correcte des fonds reçus. Il faut toutefois simplifier les règles en la matière et informer le Parlement de l’impact des suspensions imposées aux États membres. Á la lumière d’un amendement PPE-DE adopté en Plénière, le Parlement a également insisté sur la nécessité de suspendre l'intégralité ou une partie des paiements lorsque les États membres ne respectent pas des exigences de base, comme dans le cas du système SIGC en Grèce, et notamment si les autorités grecques ne corrigent pas les problèmes existants dans les délais impartis.

Pour ce qui est des corrections financières, le Parlement s’inquiète de ce que celles-ci n'incitent pas vraiment les États membres à prendre des dispositions pour prévenir les irrégularités alors même que de telles corrections devraient avoir pour objectif d'exclure du financement communautaire, les dépenses qui n'ont pas été effectuées conformément à la législation communautaire. Il faut donc que les États membres disposent de systèmes de contrôle appropriés afin d'améliorer la prévention et l'identification des erreurs au niveau des bénéficiaires finaux et que des mécanismes de recouvrements efficaces soient mis en œuvre (ex. : en publiant les noms des débiteurs qui refusent de s'acquitter de leurs obligations de paiement). Il importe également que la Commission définisse mieux la notion de "corrections financières" et qu’elle présente un rapport annuel détaillant le montant des corrections financières réellement effectuées chaque année.

Contrôle interne de la Commission : si globalement, le Parlement se félicite des actions mises en œuvre pour améliorer le contrôle au sein même des directions générales (DG) de la Commission, le Parlement estime que celle-ci doit encore évaluer le risque d’erreurs dans le cadre d’un rapport coût/efficacité. En effet, la mise en œuvre de nombreuses mesures de contrôle à un coût très important pour le budget de l’UE et le Parlement se demande s’il ne serait pas opportun de fixer un "niveau de risque tolérable".

En ce qui concerne la responsabilité de la Commission en matière de gestion, le Parlement estime que la Commission devrait veiller à ce que les rapports annuels d'activité et les déclarations y annexées traitent plus en profondeur - si possible au niveau de chaque État membre - l'évaluation des systèmes existants, les lacunes décelées et leurs incidences financières. Il exige une nouvelle fois que le Secrétaire général de la Commission émette une déclaration d'assurance concernant les déclarations de chacun des directeurs généraux. De même, il insiste sur la participation de tous les membres de la Commission (donc en priorité des Commissaires, qui ne semblent pas particulièrement impliqués dans ce contexte) à une meilleure gestion globale des ressources et des objectifs politiques en matière de dépenses.

Transparence : se félicitant des initiatives prises pour améliorer la transparence européenne et l’amélioration des règles et normes déontologiques que doivent observer les mandataires politiques élus ou nommés, des institutions européennes, le Parlement demande la tenue d’un débat sur les normes éthiques fondamentales dès avant la nomination de la prochaine Commission (novembre 2009). La Plénière demande également, dans un amendement Verts/ALE adopté en Plénière que, dans le cadre de l'initiative en matière de transparence, l’on tienne compte du fait qu'un nombre important d'anciens membres et de membres actuels du personnel occupant des postes de haut niveau à la Commission, ont quitté leur poste pour « convenance personnelle » afin de rejoindre des groupes de pression et des bureaux d'avocats représentant des clients faisant l'objet d'enquêtes menées par la DG Concurrence. Il demande également plus de clarté sur l'identité des membres des groupes de pression mandatés auprès de la Commission et leurs fonctions. Il faut, par ailleurs, impérativement publier le nom des personnes faisant partie de ces groupes, de même que celui des conseillers spéciaux que les différents Commissaires, directions générales, et/ou cabinets ont engagés.

Dans la foulée, la Plénière espère que l’initiative de la Commission en matière de transparence débouchera sur des actes concrets et attend des États membres qu'ils soutiennent cette initiative. De son côté, l'administration du Parlement devra être associée à l'examen des orientations des futures initiatives législatives concrètes dans ce domaine.

Parallèlement, le Parlement demande à la Commission de faire tout ce qui est en son pouvoir pour amener les États membres à accorder au public un droit d'accès aux informations sur les projets et les bénéficiaires des différents fonds communautaires relevant de la gestion partagée et pour créer un site Internet où ces informations seraient dûment répertoriées et faciles d’accès.

Questions sectorielles : après avoir analysé par le menu la gestion financière des dépenses communautaires et les mesures prises ou à prendre par la Commission pour améliorer tant la gestion que le contrôle de ces fonds, le Parlement revient plus en détail sur chacune des rubriques du budget de l’Union et sur les modalités qu’il préconise pour en améliorer concrètement la gestion :

  • PAC : le Parlement réaffirme une fois encore son point de vue selon lequel la coopération des États membres avec la Commission pour donner l'assurance de la légalité et de la régularité des opérations au niveau des bénéficiaires finaux est indispensable. Il faut donc que la Commission intensifie ses contrôles postérieurs aux paiements et veille au recouvrement des paiements irréguliers. Il regrette que la Cour ait constaté l'existence de problèmes dans l'application du SIGC en Grèce et demande à la Commission de renforcer les contrôles dans un certain nombre de domaines (comme notamment celui de l’huile d’olive) avant la fin 2007.
  • Actions structurelles : particulièrement satisfait de ce que, dans le cadre de l'Initiative européenne en matière de transparence, les États membres sont tenus de communiquer les informations concernant les bénéficiaires des financements communautaires, le Parlement demande à la Commission de publier toutes les informations pertinentes au grand public et compare les informations des différents États membres. Il regrette qu'une fois encore la Cour ait constaté des déficiences affectant les systèmes de contrôles nationaux et rappelle que, de son point de vue, ce n’est pas tant le nombre d’erreurs décelées qui importe mais bien plutôt l'existence de systèmes de surveillance qui permettent à la Commission de contrôler comme il se doit les risques pour le budget communautaire. Or, dans certains États membres, les problèmes connus persistent, ce qui donne lieu à des réserves récurrentes. C’est ce genre d’erreurs qu’il faut maintenant combattre en mobilisant tous les moyens de la Commission ou en procédant à la suspension de tous les paiements destinés aux autorités nationales qui n'auraient pas amélioré leur niveau de contrôle et de transparence.
  • Politiques internes : le Parlement regrette que de manière récurrente, les mêmes problèmes que les années antérieures persistent (erreurs dans le remboursement des coûts, complexité des règles appliquées et absence d'un mécanisme de sanction efficace) dans cette rubrique budgétaire directement gérée par la Commission. Il demande à la Commission de maintenir ses efforts en vue de simplifier et de préciser davantage les règles de proportionnalité applicables aux programmes à frais partagés, de clarifier au maximum les règles, manuels et formulaires applicables et de veiller à ce que le mécanisme de sanction existant s'applique chaque fois que nécessaire. Il faut en outre étendre la portée et le suivi des audits des agences nationales. Le Parlement revient également sur plusieurs sections de cette rubrique (tourisme, éducation-jeunesse, justice/affaires intérieures) pour en décortiquer les erreurs de gestion budgétaire et proposer des mesures d’amélioration du contrôle.
  • Actions extérieures : le Parlement relève avec satisfaction que la Cour n'a constaté aucune erreur lors du contrôle des paiements effectués au niveau des délégations mais qu'elle a relevé des erreurs lors du contrôle des organismes chargés de la mise en œuvre. Il juge dès lors prioritaire la nécessité d'assurer la cohérence des politiques communautaires ayant une incidence sur les pays en développement et estime qu'il faut clarifier la répartition du travail entre les différentes DG qui gèrent les actions extérieures. Il demande également à la Commission de préciser l'efficacité des divers instruments d'aide et suggère de réfléchir, dans le cadre de l'aide aux pays en développement, à la mise en place d'un système progressif d’aide permettant, dans une 1ère étape, de créer, grâce à l'appui accordé à certains projets, les conditions fondamentales nécessaires à l'octroi d'appuis budgétaires (à savoir une forme de contrôle budgétaire démocratique et des structures indépendantes d'audit). Il regrette que les contrôles d'EuropeAid ne portent pas sur les opérations effectuées au niveau des organismes chargés de la mise en œuvre des projets et demande à cet organe communautaire de mettre en place un programme de contrôle allant dans ce sens.

En ce qui concerne les fonds alloués au programme TACIS en matière de sûreté nucléaire, le Parlement s’inquiète de la critique de la Cour [selon laquelle il ne peut être garanti que les fonds communautaires aient effectivement permis d’améliorer la situation] et la juge extrêmement grave dans la mesure où elle met en lumière le manque d’efficacité de l’action communautaire. Il prend également note des critiques concernant le système commun d'information Relex (CRIS) jugé insuffisant et attend l’issue prochaine de l'affaire de fraude et de corruption concernant le projet d'infrastructures hydrauliques "Lesotho Highlands Water Project" opposant la High Court du Lesotho à trois entreprises de l'UE. Le Parlement attend des informations sur cette affaire avant septembre 2007 au plus tard et sur les efforts faits pour recouvrer les financements accordés.

  • Stratégie de préadhésion : constatant le nombre d’erreurs significatives qui ont affecté les opérations du programme SAPARD, le Parlement recommande à la Commission d'améliorer le suivi des systèmes nationaux et, d'une manière générale, de surveiller de près les organismes payeurs dans le cadre de ce programme. Il s’inquiète également des retards pris dans la mise en œuvre de projets Phare et ISPA en Bulgarie, et prie instamment la Commission de poursuivre sa coopération avec les autorités roumaines et bulgares afin de les encourager à s'adapter davantage aux exigences de ce programme. Parallèlement, le Parlement insiste pour que la Commission ne décide de participer à des projets communs avec des institutions internationales que si elle obtient l'assurance que les fonds seront utilisés à bon escient.
  • Dépenses administratives : bien que la Cour des comptes n’ait pas relevé d’erreur significative dans la légalité des dépenses administratives, le Parlement estime qu’il faut tout faire pour abaisser le coût exorbitant des pensions d'invalidité. Il juge notamment inacceptable de recourir à des pensions d'invalidité fondées sur des troubles psychologiques pour résoudre toute relation conflictuelle avec le personnel de la Commission. Enfin, le Parlement revient sur la question de la gestion immobilière de la Communauté et s’insurge contre le déficit structurel engendré par les dépenses de maintenance du Berlaymont après sa rénovation. Il indique qu’il reviendra sur cette question (ainsi que sur d’autres qui y sont liées), une fois qu’il sera en possession du rapport spécial annoncé par la Cour des comptes sur la politique immobilière des Communautés.