Rapport annuel sur les droits de l'homme dans le monde en 2006 et la politique de l'UE en matière de droits

2007/2020(INI)

En adoptant le rapport d’initiative de M. Simon COVENEY (PPE-DE, IE), le Parlement européen se rallie à la position de sa commission des affaires étrangères et estime avec elle qu’il faut accorder une plus grande priorité à l’amélioration de la capacité de l’Union à réagir aux violations des droits de l’homme par des pays tiers, en intégrant systématiquement la politique des droits de l’homme dans les relations communautaires avec ces pays. Pour le Parlement, la promotion de la démocratie est une priorité absolue dans la conduite de la politique étrangère européenne. Il se félicite également de la création de l’Agence des droits fondamentaux, qui, selon lui, doit avoir compétence pour aider l’Union à mettre en œuvre des politiques extérieures exigeant une évaluation des droits de l’homme.

Dans l’ensemble, la Plénière s’est ralliée à la plupart des recommandations de sa commission au fond (se reporter au résumé du 27/03/2007) mais a également insisté sur les points suivants :

Rapport « Droits de l’homme dans le monde » 2006 : le Parlement se félicite de la présentation orale du rapport par le Conseil et la Commission mais souhaite un examen plus poussé de l’utilisation des instruments et initiatives de l’Union dans le domaine des droits de l’homme et souhaite recevoir des évaluations ciblées de tels ou tels pays, groupes ou zones en difficulté. Il réitère sa demande de voir comment ses résolutions d’urgence sur des cas de violations des droits de l’homme et de la démocratie ont été prises en compte par le Conseil et la Commission. Il attend que le Conseil et la Commission dressent une liste de « pays particulièrement préoccupants » en matière de non respect des droits de l’homme et la lui communique.

Activités menées par l’UE dans le domaine des droits de l’homme dans les enceintes internationales : le Parlement recommande la création d’une nouvelle infrastructure pour la prévention des crises et la gestion des conflits afin d’agir aussi tôt que possible avant et pendant des crises touchant des pays tiers. Il appelle les États membres à ratifier toutes les conventions pertinentes en matière de droits de l’homme et appuie le nouveau UNHRC (Conseil des droits de l’homme des Nations Unies). Dans ce contexte, l’Union est appelée à jouer un rôle de premier plan et doit absolument influer sur l’ordre du jour de cette institution. Sur un plan plus technique, il attend des avancées dans le conflit du Sri Lanka et surtout au Darfour. Á la lumière d’un amendement oral proposé par Mme LUDFORD (ALDE, RU) en Plénière, la Parlement s’inquiète également de la situation dans les territoires occupés et des conséquences de l’interruption de l’aide internationale dans cette région et demande à l’UE d’agir pour favoriser le rétablissement de la fourniture de cette aide. Le Parlement invite États membres à ne pas soutenir la candidature à des postes à responsabilités dans des enceintes internationales, de membres de pays ne respectant pas les droits de l’homme. Il encourage les actions ciblées du Conseil contre le Belarus et appelle tous les États à ratifier le Statut de Rome sur le CPI (en particulier, les États-Unis).

Lignes directrices « droits de l’homme » : le Parlement se félicite de la mise en place des 5 lignes directrices communautaires sur les droits de l’homme (voir ci-dessous) et demande que tout le personnel de la Commission en charge du développement et de la politique extérieure en soit informé. Il attend la fixation de lignes directrices pour les droits de l’enfant promises par la Présidence allemande. Il invite également les représentations et délégations de la Commission dans les pays tiers à être perçues comme de véritables « ambassades de l’Union » dans le monde pour l’exercice des compétences en matière de droits humains.

D’autres grands thèmes ont été abordés dans le contexte des 5 lignes directrices que sont :

  1. l’abolition de la peine de mort : il faut continuer à promouvoir l’abolition de la peine de mort notamment dans un certain nombre de pays qui montrent des signes encourageants de changement ;
  2. rejet de la torture et des traitements inhumains : le Parlement appelle à une meilleure planification et à une meilleure évaluation de la mise en œuvre des lignes directrices sur la torture et recommande aux prochaines présidences de l’UE de poursuivre l’ensemble des démarches engagées en la matière dans un certain nombre de pays et à renforcer les actions menées avec la société civile dans ce domaine, notamment via l’IEDDH (ligne budgétaire « droits de l’homme » de l’Union). Il réaffirme à cette occasion son point de vue selon lequel les mutilations génitales féminines constituent une violation flagrante au droit à l’intégrité physique des femmes (et non des « pratiques médicales ») ;
  3. la protection des enfants soldats : le Parlement appelle à la ratification des conventions internationales sur les droits de l’enfant et enjoint surtout les États membres de l’Union à ne pas entraîner des enfants de moins de 18 ans dans des conflits armés ;
  4. la promotion des défenseurs des droits de l’homme : le Parlement estime qu’il faut mieux faire connaître les lignes directrices et notamment celles sur les défenseurs des droits de l’homme. Parmi les moyens permettant de mieux diffuser leur existence, le Parlement suggère la diffusion d’un manuel sur leurs mises en œuvre et leurs traductions dans un grand nombre de langues ;
  5. l’amélioration du dialogue et de concertation internationale sur les droits de l’homme : le Parlement réaffirme que la société civile et les ONG ou les acteurs non gouvernementaux ont une place essentielle pour promouvoir les droits humains. Il estime que toutes les formes de concertations et de dialogues sont fondamentales dans ce contexte et regrette que celles qui sont menées par le Conseil soient confidentielles. Il demande dès lors que certains députés puissent être informés de certaines activités classées secrètes. De réelles avancées sont notamment attendues en matière de dialogue UE-Chine (notamment en matière d’exécutions capitales). De même, il invite l’UE à faire dépendre toute avancée commerciale avec ce pays de réformes sérieuses en matière de droits de l’homme et de progrès concernant le Tibet et le Dalaï-lama. Le Parlement s’inquiète également de la situation des droits de l’homme en Iran (où la peine de mort est régulièrement appliquée) et en Russie qui semble régresser depuis un certain nombre d’années (indépendance très limitée des médias, discriminations sexuelles). Il attend de la Russie qu’elle adopte une vision plus progressiste de la liberté d’expression, notamment depuis la mort d’Anna Politkovskaya et d’Alexander Litvinenko. Ces cas devraient être évoqués avec les autorités russes au plus haut niveau, estime la Plénière, et dûment surveillés dans le cadre d’un mécanisme de surveillance à instaurer. Les autres pays à problème évoqués par le Parlement sont l’Ouzbékistan, la Corée du Nord mais aussi la Turquie où les progrès sont jugés trop lents (liberté de religion, protection des minorités, question kurde, droits de la presse avec le meurtre du journaliste Hrant Dink).

Analyse des performances des Présidences de l’UE : le Parlement soutient la position ferme du Conseil et de la Commission vis-à-vis de la Birmanie/Myanmar et invite l’UE à insister auprès de la Chine et de l’Inde pour ne pas approvisionner ce pays en armes. Parallèlement, le Parlement s’inquiète du sort des 5 infirmières bulgares toujours emprisonnées en Lybie ainsi que de la situation désastreuse en Irak et au Darfour. Il invite le Conseil à examiner comment l’UE pourrait jouer un rôle plus constructif dans l’instauration de la stabilité en Irak et s’insurge de la suspension provisoire par ECHO de l’aide humanitaire à destination de ce pays malgré les souffrances endurées par les populations locales. D’autres mesures sont réclamées vis-à-vis de la lutte contre la traite des êtres humains et les situations de post-conflit (notamment vis-à-vis des femmes violées ou mutilées après une guerre). Il attend également des prochaines présidences qu’elles prennent les mesures qui s’imposent pour renforcer la coopération entre les États membres de l’Union dans les enquêtes et les poursuites de crimes internationaux. Par ailleurs, il demande au Conseil de réévaluer la procédure de recensement des groupes terroristes et d’envisager une méthode claire pour retirer de la liste, les groupes qui le méritent.

Programmes d’aide extérieure de la Commission : tout en se félicitant du nouvel Instrument européen pour la démocratie et les droits de l’Homme (IEDDH), le Parlement s’inquiète des lourdeurs administratives qui entourent cet instrument financier et attend des lignes directrices destinées à clarifier la situation. En ce qui concerne les programmes d’aide en général, le Parlement se félicite de la nouvelle structuration des instruments d’aide, en déplorant toutefois le fait qu’il n’existe toujours pas d’instrument pour la prévention des conflits.

Application des clauses « Droits de l’Homme : le Parlement demande la mise en chantier d’un mécanisme de contrôle destiné à évaluer le respect des obligations relatives aux droits de l’homme et à établir un régime progressif de sanctions en cas de manquement afin de faire respecter au mieux les clauses droits de l’homme contenues dans les accords conclus avec les pays tiers. Il se réjouit des mesures à venir destinées à améliorer l’application de ces clauses mais attend de la Commission qu’elle présente une initiative législative en la matière, tenant compte de l’avis du Parlement. Cette clause devrait être incluse dans tous les accords commerciaux et tous les accords sectoriels de nouvelle génération, estime encore le Parlement.

Intégration de la dimension « Droits de l’Homme » : le Parlement s’inquiète du nombre élevé de décès de réfugiés qui tentent de pénétrer sur le territoire de l’Union et appelle les États membres à élargir les possibilités légales de demande l’asile. Parallèlement, le Parlement invite la Commission à continuer de contrôler étroitement l’octroi des avantages du SPG+ aux pays qui ont montré de sérieuses défaillances dans l’application des Conventions de l’OIT. Il demande à la Commission d’élaborer des critères pour définir le moment où le SPG doit être retiré pour des raisons de non respect des droits de l’Homme. Le Parlement condamne fermement l’exploitation des enfants sous toutes ses formes (sexuelle, du travail…) et s’insurge contre le fait qu’au sein même de l’Union l’exploitation sexuelle des enfants ne diminue pas. Constatant que la politique d’immigration est devenue une des préoccupations majeures de l’UE, le Parlement demande la mise en place d’une politique de réadmission des immigrés clandestins cohérente. Celle-ci doit, par ailleurs, prendre en compte l’avis du Parlement pour parvenir à une politique d’immigration préventive et non répressive. Il demande encore une adhésion plus ferme des États membres aux instruments internationaux en matière de droit de l’homme (comme le CPI) et une lutte plus intense contre les discriminations liées à l’orientation sexuelle.

Efficacité du Parlement européen : le Parlement salue tout particulièrement le travail effectué par sa commission temporaire « CIA » et demande aux États membres qu’ils œuvrent ensemble pour s’assurer que des pratiques comme celles mises au jour par la commission d’enquête, ne se reproduisent plus à l’avenir. Par ailleurs, il se félicite du retentissement grandissant de son Prix Sakharov dans le monde. Il attend de nouvelles mesures internes afin de le promouvoir au mieux. Enfin, des efforts sont attendus afin de respecter la parité  hommes/femmes dans les travaux parlementaires.

Ressources affectées au travail dans le domaine des droits de l’homme : le Parlement plaide pour la mise à disposition de moyens plus importants pour tous les représentants spéciaux nommés par le Conseil.