OBJECTIF : prévoir le principe d’une interdiction générale de l’emploi de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier dans l’Union européenne.
ACTE PROPOSÉ : Directive du Parlement européen et du Conseil.
CONTEXTE : La présente proposition s'inscrit dans le cadre des efforts consentis par l'Union européenne pour élaborer une politique globale en matière de migrations (couvrant toutes les étapes de la migration légale allant de la valorisation des avantages de l'immigration légale en passant par la lutte contre l'immigration clandestine et la traite des êtres humains).
Un des facteurs qui encouragent l'immigration clandestine dans l'Union européenne est la possibilité de trouver du travail. La présente proposition vise à réduire ce facteur d'attraction en s'attaquant à l'emploi de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier dans l'Union européenne. Se fondant sur les mesures qui existent déjà dans les États membres, elle a pour objectif de faire en sorte que tous les États membres instaurent des sanctions similaires à l'encontre des employeurs de ces ressortissants de pays tiers et qu'ils les appliquent d'une manière effective.
L'emploi illégal de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier est le résultat d'une convergence entre l'offre que représentent les migrants à la recherche d'une vie meilleure et la demande d'employeurs prêts à tirer profit de ces derniers pour effectuer des travaux qui, généralement, exigent peu de qualifications et sont mal rémunérés. Selon les estimations, le nombre de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier dans l'UE varie de 4,5 à 8 millions. L'emploi illégal est concentré dans certains secteurs: le bâtiment, l'agriculture, le nettoyage, l'hôtellerie et la restauration.
CONTENU : la présente proposition pose le principe d’une interdiction générale de l'emploi de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, assortie d’une batterie de sanctions (dont des sanctions pénales dans les cas les plus graves) afin de rendre cette interdiction effective et efficace.
Principaux éléments de la proposition :
La proposition prévoit des sanctions à l'encontre des employeurs, et non des travailleurs. Elle porte non seulement sur les personnes physiques ou morales qui emploient d'autres personnes dans le cadre d'activités économiques, mais aussi sur les particuliers en tant qu'employeurs.
1) Prévenir : comme mesure préventive, les employeurs seraient tenus de vérifier, avant de recruter des ressortissants de pays tiers, que ces derniers disposent d'un permis de séjour ou d'une autre autorisation équivalente. Les entreprises et les personnes morales (telles que les associations enregistrées sans but lucratif) seraient en outre obligées d'informer les autorités nationales compétentes. Les employeurs capables de prouver qu'ils ont respecté ces obligations ne seraient passibles d'aucune sanction. En cas de découverte de documents falsifiés, il n’est pas prévu d’obliger les employeurs à les détecter. Toutefois, si lesdits documents sont manifestement faux (par exemple un document comportant une photo qui n'est clairement pas celle du travailleur potentiel ou un document ayant été de toute évidence falsifié), les employeurs pourraient courir le risque d’être poursuivis.
2) Sanctionner : les employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier qui n'auraient pas effectué les vérifications requises avant le recrutement seraient passibles de sanctions consistant en:
Compte tenu du recours fréquent à la sous-traitance dans certains des secteurs affectés, tels que celui du bâtiment, toutes les entreprises d'une chaîne de sous‑traitance doivent être tenues pour solidairement redevables des sanctions financières infligées à un sous-traitant situé en bout de chaîne qui emploierait des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.
Des amendes et d'autres mesures administratives pourraient ne pas suffire pour dissuader certains employeurs. Il est donc prévu d'instaurer des sanctions pénales dans certains cas graves:
Les ressortissants de pays tiers employés illégalement ne se verraient infliger aucune sanction en vertu de la présente proposition (une proposition de directive distincte sera prévue obligeant les États membres à prendre une décision de retour à l'égard de tout ressortissant de pays tiers en séjour irrégulier).
Á noter, en outre, que bien que le dispositif prévoit que des personnes morales puissent être tenues pour responsables d'infractions pénales, il n'est pas précisé si la responsabilité des personnes morales doit être ou non pénale. Par conséquent, les États membres qui ne reconnaissent pas la responsabilité pénale des personnes morales ne seraient pas obligés de modifier leur dispositif.
3) Se défendre : les États membres seraient tenus de mettre en place des mécanismes de réclamation efficaces pour permettre aux ressortissants de pays tiers concernés de porter plainte directement ou par l'intermédiaire de tiers désignés tels que des organisations syndicales ou d'autres associations. Ces tiers seraient protégés contre d'éventuelles sanctions en vertu des règles interdisant l'aide à l'entrée et au séjour irréguliers.
Pour compléter ces mécanismes, les États membres devraient octroyer aux ressortissants de pays tiers ayant été soumis à des conditions de travail particulièrement abusives et qui collaborent aux poursuites pénales engagées à l'encontre de leur employeur un permis de séjour d'une durée limitée liée à la durée de la procédure nationale correspondante. Premièrement, les personnes qui coopèrent devraient bénéficier de la même possibilité de se voir octroyer un permis de séjour temporaire que celle prévue par le droit communautaire pour les victimes de la traite des être humains qui coopèrent avec les autorités. Deuxièmement, leur retour devrait être postposé jusqu'à ce qu'ils aient effectivement reçu leurs arriérés de salaire.
4) Inspecter : l'exécution sera déterminante. C'est pourquoi il est proposé d'obliger les États membres à réaliser un nombre minimum d'inspections dans les sociétés établies sur leur territoire (au moins 10% des entreprises à risque installées sur leur territoire). Les sociétés détachant des travailleurs ressortissants de pays tiers dans un autre État membre dans le contexte de la fourniture de services seront soumises à des contrôles de la part de l'État membre dans lequel elles sont implantées, et non de l'État membre dans lequel les services sont fournis.