Société de l'information: droit d'auteur et droits voisins  
1997/0359(COD) - 30/11/2007  

Le présent rapport porte sur l’application de la directive 2001/29/CE. Il se limite à évaluer comment les articles 5, 6 et 8 de la directive ont été transposés par les États membres et comment ils sont appliqués par les tribunaux nationaux.

  • Exceptions et limitations : plutôt que de compter sur les exceptions et les limitations, les tribunaux nationaux ont le plus souvent eu recours à une interprétation téléologique des droits de reproduction afin d’exempter certaines utilisations de la protection des droits d’auteur. Les tribunaux ont également utilisé la notion de “consentement tacite” du titulaire des droits pour atteindre ce résultat. Parmi les 21 exceptions, celles qui ont attiré le plus l’attention (et qui sont susceptibles d’avoir le plus grand impact sur l’environnement numérique) sont : l’exception obligatoire pour les actes temporaires de reproduction ; les exceptions pour les copies privées ;  les exceptions au profit des bibliothèques, des établissements scolaires, des archives et des musées ; les exceptions aux fins de reportage sur des événements d’actualité ; les limitations pour la citation, la critique et l’examen ; et l’exception de parodie.
  • Copies provisoires : l’article 5(1) de la directive, qui complète la directive sur le commerce électronique, exempte, par exemple, les reproductions sur les routeurs Internet, les reproductions créées pendant la navigation sur le web ou les copies créées dans la mémoire d’accès aléatoire (RAM) d’un ordinateur, les copies stockées sur les mémoires caches locales des systèmes informatiques ou les copies créées sur les serveurs d’accès. Rares sont les cas de jurisprudence sur l’application de l’Article 5(1) de la directive bien que ce rapport cite l’affaire du Copiepresse en Belgique.
  • Copies privées : à l’exception de l’Irlande et des Nations Unies, tous les États membres ont mis en œuvre l’exception de la reprographie et l’exception de l’utilisation à titre privé. Les dispositions nationales sont cependant très différentes.  
  • Exceptions au profit des bibliothèques : la directive autorise les États membres à faire une exception pour les droits de reproduction pour certaines reproductions faites par certaines organisations à but non lucratif. Tous les États membres ont mis en œuvre ces dispositions. Cependant les révisions nationales varient.
  • Compte rendu d’événements d’actualité : les exceptions autorisant le compte rendu d’événements d’actualité sont des exceptions à la fois au droit de reproduction et au droit à la communication au public. Certains États membres ont adopté une large définition des entités qui constituent le terme « presse ».
  • Citations à des fins de critique ou de revue : l’article 5(3)(d) permet les citations à des fins de « critique ou de revue ». La critique et la revue ne sont donc que des exemples de justifications possibles pour les citations. Dans l’affaire Copiepresse contre Google, le tribunal belge a retenu que les citations doivent être auxiliaires au travail les incorporant et utilisées afin d’illustrer un avis émis. Le service Google.News ne pouvait pas se baser sur l’exception des citations pour justifier le déploiement sur son site de titres et le début de phrases d’articles sur l’actualité.
  • Parodies : l’article 5(3)(k) de la directive exempte les cas d’utilisation “à des fins de caricature, de parodie ou de pastiche”. La mise en œuvre de l’exception pour la parodie dans les législations nationales varie.  Il n’existe pas d’exception de parodie dans la législation du Royaume-Uni. Par contre, d’autres législations nationales prévoient une exception pour la parodie (par exemple la France et la Belgique) ou abritent les parodies sous la tutelle d’une utilisation transformative (les pays nordiques) ou d’une défense de la « libre utilisation » (Allemagne et Portugal). Cependant le champ d’application de la règle de “libre utilisation” semble assez étroit. La Cour régionale de Hambourg, dans sa décision « onglets » a soutenu que la reproduction d’onglets sur Internet ne constitue pas une « utilisation libre » de l’image originale.
  • Mesures de protection technologiques : pour rappel, la directive met en œuvre les obligations internationales conformément à l’Article 11 du traité  de l’OMPI sur le droit d’auteur et l’Article 18 du traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes. La directive exige des États membres qu’ils prévoient la protection contre les actes de neutralisation des dispositifs techniques et contre les transactions dans ces dispositifs de neutralisation.
  • Connexion entre TPM et droit d’auteur : selon la directive, la protection des TPM (Technology Protection Measures) complète la protection du droit d’auteur. La directive demande aux États membres de protéger les TPM dans le respect des travaux ou n’importe quel sujet couvert par “le droit d’auteur ou n’importe quel droit lié au droit d’auteur comme prévu par la loi ou par le droit sui generis dans les bases de données ». Les TPM mis en application pour protéger d’autres sujets ou travaux dans le domaine public ne sont pas protégés par la directive. La protection des TPM prévue dans la directive est donc distincte de la directive  98/84/CE sur la protection légale des services basés sur ou consistant en un accès conditionnel. La directive traite de la réception non autorisée de l’accès conditionnel aux services, qui peuvent ou non contenir un contenu protégé par la propriété intellectuelle.
  • Dispositifs de neutralisation : l’article 11 du traité de l’OMPI sur le droit d’auteur n’inclut pas l’interdiction des dispositifs de neutralisation. La directive interdit une série d’actes concernant les dispositifs de neutralisation, et va au-delà du Traité de l’OMPI. Dans l’affaire Heise Online, une cour allemande a soutenu que des programmes qui proposent des dispositifs de neutralisation pourraient être interdits en vertu de la disposition qui couvre l’importation de « dispositifs de neutralisation ».  La cour a également soutenu que la liaison avec un site web offshore, où le logiciel est disponible, constitue un acte de violation.
  • TPM efficace : en vertu de l’article 6(3), la définition des mesures technologiques couvre un large éventail de technologies. Une mesure technologique est considérée comme efficace si elle réalise l’objectif de protection. La plupart des États membres ont transposé littéralement cette définition, à l’exception de la Slovaquie et la Suède.
  • Relations entre les mesures technologiques, les exceptions et les limitations : aux termes de la directive, le bénéfice de certaines exceptions devrait être conservé par des mesures volontaires des titulaires de droits, y compris les accords  entre eux et les autres parties concernées. En l’absence de mesures volontaires adéquates, l’article 6(4) demande aux États membres de conserver le bénéfice de ces exceptions. Cette disposition laisse une large marge de discrétion aux États membres dans le choix  des mesures appropriées visant à assurer le bénéfice de certaines exceptions pour les utilisateurs. Les États membres ont favorisé un large éventail de solutions différentes comme (1) aucune mise en œuvre (Autriche, République Tchèque, les Pays-Bas qui laissent au pouvoir exécutif le droit d’agir lorsque cela est nécessaire); (2) l’introduction de mesures de médiation ou d’arbitrage (Finlande, Danemark, Estonie, Grèce, Hongrie); (3) recours devant les tribunaux (Belgique, Allemagne, Espagne, Irlande); (4) recours à des mesures administratives avec décisions exécutoires au moyen de peines et d’amendes, menant dans certains cas à la mise en place d’organismes administratifs (France). Il est possible de faire appel de ces décisions devant les tribunaux.
  • Mesure de redressement par voie d’injonction contre les intermédiaires : l’article 8(3) de la directive oblige les États membres à veiller à ce que les titulaires de droit soient en mesure de solliciter un redressement par voie d’injonction contre les intermédiaires dont les services sont utilisés par un tiers pour violer le droit d’auteur et les droits voisins. Dans un nombre limité d’États membres (Autriche, Grèce, Lettonie, Belgique), l’article 8(3) a été mis en œuvre dans la législation nationale. Dans d’autres États membres, l’article 8(3) relève du champ d’application de la législation existante.