Point sur les relations transatlantiques à la suite des élections aux États-Unis  
2008/2199(INI) - 24/02/2009  

En adoptant le rapport de M. Francisco José MILLÁN MON (PPE-DE, ES) sur l'état des relations transatlantiques après les élections américaines, la commission des affaires étrangères rappelle le caractère historique de l’élection du nouveau président Obama. Les députés rappellent également que de nombreux Européens attendent de la part du nouveau gouvernement américain une attitude coopérative, dans le domaine international, notamment dans le cadre du Partenariat transatlantique (PT), véritable pierre angulaire des relations bilatérales UE-Etats-Unis.

Questions institutionnelles bilatérales : félicitant une fois encore le Président Obama pour son élection, les députés rappellent l'engagement clair qu'il a formulé en faveur du partenariat transatlantique lors de l'allocution de Berlin de juillet 2008. Ils invitent dès lors le nouveau président à prendre la parole devant le Parlement européen à l'occasion de sa 1ère visite officielle en Europe. Globalement, les députés invitent le Conseil, les États membres de l'UE ainsi que la Commission à améliorer la coordination et la cohérence de la politique de l'Union vis-à-vis du nouveau gouvernement américain. Ils demandent donc à la présidence tchèque de l’UE d’élaborer avec la Commission un agenda commun d'objectifs à court et à long terme sur des sujets bilatéraux ainsi que sur les problèmes et les conflits mondiaux et régionaux.

Sur le plan institutionnel, les députés estiment que le PT doit être remplacé par un accord de partenariat transatlantique reposant sur une nouvelle architecture institutionnelle. Mais cet accord devrait logiquement être négocié entre les parties une fois le traité de Lisbonne en vigueur. Dans ce contexte, ils recommandent que les sommets UE/États-Unis soient organisés 2 fois par an pour donner une orientation stratégique et une dynamique au partenariat. Le nouvel accord devrait également créer un organe de consultation et de coordination de haut niveau pour la politique étrangère et de sécurité (cet organe devant être présidé par le Haut représentant/vice-président de la Commission, pour l'UE, et par le Secrétaire d'État, pour les Etats-Unis et devant se réunir tous les 3 mois). Le nouvel accord devrait également moderniser l'actuel dialogue transatlantique pour en faire un véritable forum parlementaire. Cette assemblée devrait se réunir en plénière 2 fois par an et réunir des députés du PE et des deux chambres du Congrès des Etats-Unis. Les députés indiquent qu'un système d'alerte législatif précoce réciproque devrait être mis en place au sein de cette assemblée en vue d’améliorer la coopération bilatérale. Les députés proposent en outre que le Parlement européen et le Congrès établissent un bureau de liaison à Bruxelles.

Appui de la société civile : le PT devrait être profondément soutenu par les sociétés civiles des parties. Á cet égard, les députés insistent sur le renforcement des échanges entre les étudiants, les universitaires et d'autres acteurs de la société civile, avec l’appui du budget communautaire. Des initiatives de coopération en matière culturelle et spatiale sont également envisagées.

Défis mondiaux : les députés invitent instamment les deux partenaires à s'engager dans un multilatéralisme efficace, au sein des Nations unies et à promouvoir le respect des droits de l'homme dans le monde comme élément clé de leur politique. Les députés insistent tout particulièrement sur la nécessité pour la nouvelle administration américaine, de ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale et d’abolir la peine de mort.

En ce qui concerne la crise financière et économique actuelle, les députés appellent le nouveau Président à s’employer à réformer le système financier international, avec l’aide de la Banque mondiale et du FMI, et en collaboration avec les puissances émergentes. Ils exhortent également les parties à jouer un rôle de chef de file en matière de lutte contre le changement climatique, dans la perspective de la conférence de Copenhague qui aura lieu en 2009. En matière énergétique notamment, les députés en appellent à une coordination efficace des approches à l’égard des pays producteurs et au renforcement de la diversité en matière d'approvisionnement.

En ce qui concerne l’approche à adopter vis-à-vis de certaines régions du monde, les députés s’expriment comme suit :

  • Proche et Moyen-Orient : les députés soulignent combien il devient primordial d'obtenir un règlement pacifique et équitable du conflit israélo-palestinien. Ils demandent au gouvernement des États-Unis d'œuvrer en coordination avec l'Union (dans le cadre du Quatuor) pour trouver une solution durable à ce conflit et pour renforcer le fragile cessez-le-feu en œuvre à Gaza. Ils encouragent également les partenaires à soutenir les efforts visant à la réconciliation inter-palestinienne, et soulignent l'importance d'une amélioration des conditions de vie des Palestiniens.
  • Afghanistan-Pakistan-Iran-Iraq : les députés invitent l'Union et les États-Unis à élaborer une stratégie conjointe à l'égard du Pakistan, afin de renforcer les institutions démocratiques et l'État de droit dans ce pays ainsi que sa capacité à lutter contre le terrorisme. Ils se félicitent de la désignation de Richard Holbrooke en tant qu'envoyé spécial unique pour le Pakistan et l'Afghanistan. Rappelant leur point de vue selon lequel le programme nucléaire iranien met en péril le système de non-prolifération ainsi que la stabilité dans la région et dans le monde, les députés appellent les partenaires à aboutir à une solution négociée avec l'Iran sur cette question. Ils demandent aux partenaires de définir aussi rapidement que possible une approche commune à l'égard de l'Iran, sans attendre d'avoir à régler ce problème dans l'urgence. En ce qui concerne l’Iraq, les députés invitent les partenaires à continuer à coordonner leurs efforts pour améliorer la stabilité et l'unité du pays.
  • Russie : les députés insistent pour que les parties coordonnent étroitement leurs politiques à l'égard de la Russie. Il s’agit de développer une coopération constructive avec ce pays sur les défis, les menaces et les opportunités d'intérêt commun, y compris les questions de sécurité, le désarmement et la non-prolifération, les droits de l'homme et le droit international. Les députés insistent notamment sur la nécessité d'intensifier la coopération au sein du Conseil OTAN-Russie, l’objectif étant de coordonner les stratégies pour réformer l'architecture européenne de sécurité, avec l’appui de la Russie. Parallèlement, les députés invitent l'Union et les États-Unis à mettre sur pied une stratégie commune concernant 6 États d'Europe orientale (la Moldavie, l'Ukraine, la Géorgie, l'Arménie, l'Azerbaïdjan et le Belarus).
  • Autres régions du monde : les députés appellent les partenaires à prêter une attention particulière à l'Amérique latine et à promouvoir une approche commune à l'égard d'autres acteurs géopolitiques majeurs tels que la Chine, l'Inde ou le Japon.

Défense, contrôle des armes et questions de sécurité : les députés invitent l'Union et les États-Unis à adopter une stratégie commune dans toutes les enceintes internationales, notamment les Nations unies, en ce qui concerne le désarmement nucléaire et des armes traditionnelles. Ils appellent le nouveau gouvernement des États-Unis à relancer le dialogue avec la Russie sur le contrôle des armes, en développant les accords bilatéraux actuels entre ces deux pays. Ils se félicitent notamment de l’engagement pris par le nouveau président de ratifier le traité sur l'interdiction complète des essais nucléaires ainsi que de sa décision de fermer Guantánamo. Dans la foulée, les députés encouragent le gouvernement américain à fermer tout centre de détention en dehors du territoire des États-Unis qui n'est pas conforme au droit international et invitent les États membres à coopérer pour trouver, au cas par cas, des solutions au problème de l'accueil de certains anciens détenus de Guantánamo.

En matière de lutte contre le terrorisme, les députés attirent l’attention de l’administration américaine sur un excès dans les échanges préventif de données, qui pourraient contrevenir aux dispositions en vigueur sur le respect de la vie privée. Ils estiment en outre qu'une coopération étroite entre l'Union et les États-Unis dans le domaine de la justice et des affaires intérieures serait la bienvenue pour bâtir progressivement un espace transatlantique de liberté, de sécurité et de justice.

Questions économiques et commerciales : rappelant que le produit intérieur brut (PIB) de l'Union et des États-Unis représente plus de la moitié du PIB mondial, les députés invitent les partenaires à mettre à profit tout le potentiel du Conseil économique transatlantique pour surmonter les obstacles actuels à l'intégration économique et réaliser un marché transatlantique unifié d'ici à 2015. Ils demandent à la Commission d'élaborer, sur base d'une étude financée par le Parlement, une feuille de route détaillée des obstacles actuels à surmonter dans l'optique de respecter cette date butoir.

Préoccupés par le nouveau projet de loi de relance des Etats-Unis, les députés insistent sur la nécessité absolue d'apporter une réponse mutuelle à la crise actuelle plutôt que d'adopter des mesures visant à désunir les partenaires. Ils prônent au contraire une intégration progressive des marchés financiers par la reconnaissance mutuelle et la convergence des cadres réglementaires et rappellent que seul le dialogue entre opérateurs sur le marché pourra garantir la réussite de cette intégration. Il faut donc tout faire faire pour abolir les entraves à l’investissement et adopter une législation ayant une incidence extraterritoriale sans consultation ni accord préalables.

Les députés encouragent une meilleure intégration des marchés des États-Unis et de l'UE (notamment, les marchés des services financiers) et plaident en faveur de l'adoption de réglementations qui garantissent la concurrence, assurent une plus grande transparence et un contrôle effectif des produits, des institutions financières et des marchés et établissent des modèles communs de gestion des risques, conformément aux accords obtenus au sommet du G20 en novembre 2008. Ils demandent notamment une plus grande coopération entre les organismes de contrôle pour surveiller l'activité des établissements financiers transfrontaliers et empêcher les agissements d'établissements domiciliés dans des juridictions qui sont opaques et peu coopératives. Une fois de plus, les députés en appellent à l'élimination des paradis fiscaux.

Contrôle du fret : les députés demandent au nouveau Congrès de modifier la réglementation des États-Unis qui impose l'obligation de scanner 100% du fret entrant dans ce pays. En effet, cette mesure radicale constitue une réelle entrave au commerce, occasionnant des coûts importants pour les opérateurs économiques, sans pour autant présenter d'avantages du point de vue de la sécurité de la chaîne d'approvisionnement. Au contraire, les députés jugent qu’il serait utile que le Conseil économique transatlantique organise des séminaires sur cette question afin de contribuer à une meilleure compréhension entre les législateurs de l'Union et des Etats-Unis.

Échanges d’émissions énergétiques : enfin, les députés recommandent que le Conseil transatlantique se penche sur l'opportunité d'intégrer dans ses discussions, la question d’un système de plafonnement et d'échanges en matière d'émissions. Les députés recommandent notamment le développement de critères de référence communs (existant au niveau international) pour les industries à grande consommation d'énergie.