Point sur les relations transatlantiques à la suite des élections aux États-Unis  
2008/2199(INI) - 26/03/2009  

Le Parlement européen a approuvé par 503 voix pour, 51 voix contre et 10 abstentions, une résolution sur l'état des relations transatlantiques après les élections américaines.

Le Parlement rappelle tout d’abord le caractère historique de l’élection du nouveau président Obama. Il indique également que de nombreux Européens attendent de la part du nouveau gouvernement américain une attitude coopérative, dans le domaine international, notamment dans le cadre du Partenariat transatlantique (PT), véritable pierre angulaire des relations bilatérales UE-Etats-Unis. La Plénière se félicite au passage de l'organisation du sommet qui se tiendra à Prague le 5 avril 2009 et qui réunira le Président Barack Obama et les 27 chefs d'État et de gouvernement de l'UE. Il espère que cette rencontre insufflera une dynamique puissante pour le renforcement de la relation transatlantique et l'élaboration d'un agenda commun.

Questions institutionnelles bilatérales : félicitant une fois encore le Président Obama pour son élection, le Parlement rappelle l'engagement clair qu'il a formulé en faveur du partenariat transatlantique lors de l'allocution de Berlin de juillet 2008. Il invite dès lors le nouveau président à prendre la parole devant le Parlement européen à l'occasion de sa 1ère visite officielle en Europe. Globalement, le Parlement invite le Conseil, les États membres de l'UE ainsi que la Commission à améliorer la coordination et la cohérence de la politique de l'Union vis-à-vis du nouveau gouvernement américain. Il demande donc à la présidence tchèque de l’UE d’élaborer avec la Commission un agenda commun d'objectifs à court et à long terme sur des sujets bilatéraux ainsi que sur les problèmes et les conflits mondiaux et régionaux.

Sur le plan institutionnel, le Parlement estime que le PT doit être remplacé par un accord de partenariat transatlantique reposant sur une nouvelle architecture institutionnelle. Mais cet accord devrait logiquement être négocié entre les parties une fois le traité de Lisbonne en vigueur. Dans ce contexte, il recommande que les sommets UE/États-Unis soient organisés 2 fois par an pour donner une orientation stratégique et une dynamique au partenariat. Le nouvel accord devrait également créer un organe de consultation et de coordination de haut niveau pour la politique étrangère et de sécurité (cet organe devant être présidé par le Haut représentant/vice-président de la Commission, pour l'UE, et par le Secrétaire d'État, pour les Etats-Unis et devant se réunir tous les 3 mois). Le nouvel accord devrait également moderniser l'actuel dialogue transatlantique pour en faire un véritable forum parlementaire. Cette assemblée devrait se réunir en plénière 2 fois par an et réunir des députés du PE et des deux chambres du Congrès des Etats-Unis. Le Parlement indique qu'un système d'alerte législatif précoce réciproque devrait être mis en place au sein de cette assemblée en vue d’améliorer la coopération bilatérale. Il propose en outre que le Parlement européen et le Congrès établissent un bureau de liaison à Bruxelles.

Appui de la société civile : le PT devrait être profondément soutenu par les sociétés civiles des parties. Á cet égard, le Parlement insiste sur le renforcement des échanges entre les étudiants, les universitaires et d'autres acteurs de la société civile, avec l’appui du budget communautaire. Des initiatives de coopération en matière culturelle et spatiale sont également envisagées.

Défis mondiaux : le Parlement invite les deux partenaires à s'engager dans un multilatéralisme efficace, au sein des Nations unies et à promouvoir le respect des droits de l'homme dans le monde comme élément clé de leur politique. Il insiste tout particulièrement sur la nécessité pour la nouvelle administration américaine, de ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale et d’abolir la peine de mort.

En ce qui concerne la crise financière et économique actuelle, le Parlement appelle le nouveau Président à s’employer à réformer le système financier international, avec l’aide de la Banque mondiale et du FMI, et en collaboration avec les puissances émergentes. Il exhorte également les parties à jouer un rôle de chef de file en matière de lutte contre le changement climatique, dans la perspective de la conférence de Copenhague qui aura lieu en 2009. En matière énergétique notamment, le Parlement en appelle à une coordination efficace des approches à l’égard des pays producteurs et au renforcement de la diversité en matière d'approvisionnement.

Questions régionales : dans ce domaine, le Parlement fait les recommandations suivantes :

  • Proche et Moyen-Orient : il demande au gouvernement des États-Unis d'œuvrer en coordination avec l'Union (dans le cadre du Quatuor) pour trouver une solution durable à ce conflit et pour renforcer le fragile cessez-le-feu en œuvre à Gaza. Il encourage également les partenaires à soutenir les efforts visant à la réconciliation inter-palestinienne, et souligne l'importance d'une amélioration des conditions de vie des Palestiniens ;
  • Afghanistan-Pakistan-Iran-Iraq : le Parlement invite l'Union et les États-Unis à élaborer une stratégie conjointe à l'égard du Pakistan, afin de renforcer les institutions démocratiques et l'État de droit dans ce pays ainsi que sa capacité à lutter contre le terrorisme. Soulignant combien le programme nucléaire iranien met en péril le système de non-prolifération ainsi que la stabilité dans la région et dans le monde, le Parlement appelle les partenaires à aboutir à une solution négociée avec l'Iran sur cette question. C’est pourquoi, il se félicite de ce que le Président Obama ait annoncé la reprise de contacts directs avec l'Iran. Toute initiative dans ce domaine devrait en outre être étroitement coordonnée entre l’UE et les USA dans un esprit de confiance et de transparence. Le Parlement demande dès lors aux partenaires de définir rapidement une approche commune à l'égard de l'Iran, sans attendre le moment où il faudra régler cette question dans l'urgence. En ce qui concerne l’Iraq, le Parlement invite les partenaires à continuer à coordonner leurs efforts pour améliorer la stabilité et l'unité du pays ;
  • Russie : le Parlement insiste pour que les parties coordonnent étroitement leurs politiques à l'égard de la Russie. Il s’agit de développer une coopération constructive avec ce pays sur les défis, les menaces et les opportunités d'intérêt commun, y compris les questions de sécurité, le désarmement et la non-prolifération, les droits de l'homme et le droit international. Le Parlement insiste notamment sur la nécessité d'intensifier la coopération au sein du Conseil OTAN-Russie, l’objectif étant de coordonner les stratégies pour réformer l'architecture européenne de sécurité, avec l’appui de la Russie. Parallèlement, le Parlement invite l'Union et les États-Unis à mettre sur pied une stratégie commune concernant 6 États d'Europe orientale (la Moldavie, l'Ukraine, la Géorgie, l'Arménie, l'Azerbaïdjan et le Belarus) ;
  • Autres régions du monde : le Parlement appelle les partenaires à prêter une attention particulière à l'Amérique latine et à promouvoir une approche commune à l'égard d'autres acteurs géopolitiques majeurs tels que la Chine, l'Inde ou le Japon.

Défense, contrôle des armes et questions de sécurité : le Parlement invite l'Union et les États-Unis à adopter une stratégie commune dans toutes les enceintes internationales, notamment les Nations unies, en ce qui concerne le désarmement nucléaire et les armes traditionnelles. Il appelle les États-Unis à relancer le dialogue avec la Russie sur le contrôle des armes, en développant les accords bilatéraux actuels entre ces deux pays. Il se félicite de l’engagement pris par le nouveau président de ratifier le traité sur l'interdiction complète des essais nucléaires ainsi que de sa décision de fermer Guantánamo. Dans la foulée, le Parlement encourage le gouvernement américain à fermer tout centre de détention en dehors du territoire des États-Unis qui n'est pas conforme au droit international et invite les États membres à coopérer pour trouver, au cas par cas, des solutions au problème de l'accueil de certains anciens détenus de Guantánamo.

En matière de lutte contre le terrorisme, le Parlement attire l’attention de l’administration américaine sur un excès dans les échanges préventif de données, qui pourraient contrevenir aux dispositions en vigueur sur le respect de la vie privée. Il estime en outre qu'une coopération étroite entre l'Union et les États-Unis dans le domaine de la justice et des affaires intérieures serait la bienvenue pour bâtir progressivement un espace transatlantique de liberté, de sécurité et de justice.

Le Parlement souligne par ailleurs l'importance d'une rapide entrée en vigueur des accords d'extradition et d'assistance juridique entre l'UE et les Etats-Unis, car la mise en œuvre efficace de ces accords nécessite un haut niveau de confiance mutuelle, qui s'appuie sur le respect plein et entier, par toutes les parties, des obligations de droit national et international en matière de droits de l'homme, de droit à être défendu et à avoir un procès équitable ainsi qu'en matière d'État de droit sur le plan national et international.

Questions économiques et commerciales : rappelant que le produit intérieur brut (PIB) de l'Union et des États-Unis représente plus de la moitié du PIB mondial, le Parlement invite les partenaires à mettre à profit tout le potentiel du Conseil économique transatlantique pour surmonter les obstacles actuels à l'intégration économique et réaliser un marché transatlantique unifié d'ici à 2015. Il demande à la Commission d'élaborer, sur base d'une étude financée par le Parlement, une feuille de route détaillée des obstacles actuels à surmonter dans l'optique de respecter cette date butoir.

Préoccupé par le nouveau projet de loi de relance des Etats-Unis, le Parlement insiste sur la nécessité absolue d'apporter une réponse commune à la crise actuelle plutôt que d'adopter des mesures visant à désunir les partenaires. Il prône au contraire une intégration progressive des marchés financiers par la reconnaissance mutuelle et la convergence des cadres réglementaires et rappelle que seul le dialogue entre opérateurs sur le marché pourra garantir la réussite de cette intégration. Il faut donc tout faire faire pour abolir les entraves à l’investissement et adopter une législation ayant une incidence extraterritoriale sans consultation ni accord préalables.

Parallèlement, le Parlement encourage une meilleure intégration des marchés des États-Unis et de l'UE (notamment, les marchés des services financiers) et plaide en faveur de l'adoption de réglementations qui garantissent la concurrence, assurent une plus grande transparence et un contrôle effectif des produits, des institutions financières et des marchés et établissent des modèles communs de gestion des risques, conformément aux accords obtenus au Sommet du G20 en novembre 2008. Il demande notamment une plus grande coopération entre les organismes de contrôle pour surveiller l'activité des établissements financiers transfrontaliers et empêcher les agissements d'établissements domiciliés dans des juridictions qui sont opaques et peu coopératives. Une fois de plus, le Parlement en appelle à l'élimination des paradis fiscaux.

Échanges d’émissions énergétiques : enfin, le Parlement recommande que le Conseil transatlantique se penche sur l'opportunité d'intégrer dans ses discussions, la question d’un système de plafonnement et d'échanges en matière d'émissions. Il recommande notamment le développement de critères de référence communs (existant au niveau international) pour les industries à grande consommation d'énergie.