Autorité bancaire européenne (ABE): institution  
2009/0142(COD) - 23/09/2009  

OBJECTIF : instituer une Autorité bancaire européenne (ABE) en vue de renforcer la surveillance financière en Europe.

ACTE PROPOSÉ : Règlement du Parlement européen et du Conseil.

CONTEXTE : la crise financière a mis en lumière de graves lacunes dans la surveillance financière, à la fois dans des cas particuliers et en ce qui concerne le système financier dans son ensemble. En conséquence, M. Barroso, président de la Commission européenne, a demandé à un groupe d’experts de haut niveau, présidé par M. Jacques de Larosière, de formuler des propositions pour renforcer les dispositifs européens en matière de surveillance. Sur la base de ses recommandations, la Commission a présenté des propositions pour un nouveau cadre européen pour la surveillance financière dans sa communication au Conseil européen de printemps de mars 2009 (COM(2009)0114). Elle a précisé plus avant ses idées dans sa communication de mai 2009 (COM(2009)0252), dans laquelle elle a proposé :

  • de mettre en place un système européen de surveillance financière (SESF) composé d’un réseau d’autorités nationales de surveillance financière travaillant de manière coordonnée avec de nouvelles autorités européennes de surveillance; ces dernières résulteront de la transformation des comités de surveillance européens existants en une Autorité bancaire européenne (ABE), une Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (AEAPP) et une Autorité européenne des marchés financiers (AEMF), et
  • de créer un Comité européen du risque systémique (CERS), afin de surveiller et d’analyser les risques que les évolutions macroéconomiques et du système financier dans son ensemble font peser sur la stabilité du système financier. À cette fin, le CERS émettrait des alertes rapides en cas d’intensification des risques systémiques et, le cas échéant, formulerait des recommandations quant aux mesures à prendre pour faire face à ces risques.

Le Conseil européen a recommandé, dans ses conclusions du 19 juin 2009, l’établissement d’un Système européen de surveillance financière comprenant trois nouvelles autorités européennes de surveillance. Ce système devrait viser à rehausser la qualité et la cohérence de la surveillance nationale, en renforçant le contrôle des groupes transfrontaliers et en établissant un «règlement uniforme» applicable à tous les établissements financiers au sein du marché unique.

Il faut noter que la présente proposition doit être examinée en liaison avec trois autres propositions de règlement du Parlement européen et du Conseil visant :

  • à la surveillance macroprudentielle du système financier et instituant un Comité européen du risque systémique (CERS) ;
  • à instituer une Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (AEAPP) ;
  • à instituer une Autorité européenne des marchés financiers (AEMF).

ANALYSE D’IMPACT : la communication de la Commission de mai 2009 sur la surveillance financière en Europe était accompagnée d’une analyse d’impact examinant les principales options envisageables pour la mise en place du CERS et du SESF. Une seconde analyse d’impact, qui accompagne les présentes propositions, étudie ces options plus en détail. Le rapport sur cette seconde analyse d’impact est accessible en ligne sur le site web de la Commission européenne (voir également SEC(2009)1234).

CONTENU : afin de tenir compte des spécificités sectorielles, trois règlements distincts sont nécessaires pour instituer les autorités chargées respectivement des banques, des assurances et des pensions professionnelles et des valeurs mobilières. Les principes essentiels de ces trois propositions sont toutefois identiques. Par conséquent, la présente proposition examine d’abord les éléments communs, avant d’aborder succinctement les différences entre les trois règlements

Institution et statut juridique des autorités européennes de surveillance (AES) : les autorités européennes de surveillance ou AES auront pour objectif de contribuer à: i) améliorer le fonctionnement du marché intérieur, notamment par un niveau de réglementation et de surveillance élevé, efficace et cohérent, ii) protéger les déposants, les investisseurs, les assurés et les autres bénéficiaires, iii) assurer l’intégrité, l’efficience et le bon fonctionnement des marchés financiers, iv) préserver la stabilité du système financier, et v) renforcer la coordination internationale de la surveillance. À cette fin, chaque autorité contribuera à assurer la mise en œuvre cohérente, efficace et effective du droit communautaire applicable.

Les AES seront des organismes communautaires disposant de la personnalité morale. Elles seront un élément essentiel du système européen de surveillance financière SESF proposé. Ce dernier sera conçu comme un réseau d’autorités de surveillance auquel participeront les autorités de surveillance des États membres, un comité mixte des autorités européennes de surveillance afin de couvrir les questions transsectorielles et la Commission européenne. Les autorités devront bénéficier d’une indépendance aussi étendue que possible afin de mener leur mission à bien en toute objectivité, mais la participation de la Commission sera nécessaire dès lors que des raisons institutionnelles et les obligations auxquelles elle est soumise en vertu du traité l’exigeront.

Le principal organe décisionnel de chaque Autorité sera son conseil des autorités de surveillance, composé des directeurs des autorités nationales de surveillance concernées ainsi que du président de l’Autorité en question.

Tâches et compétences des autorités européennes de surveillance : les AES seront chargées de toutes les missions existantes des comités de surveillance européens, et auront en outre des responsabilités nettement plus étendues, des compétences juridiques définies et une plus grande autorité.

Élaboration de normes techniques : le Conseil européen a approuvé la proposition de la Commission selon laquelle un «règlement uniforme», applicable à tous les établissements financiers dans le marché unique, devrait être mis en place. À cette fin, les différences nationales de transposition du droit communautaire qui découlent d’exceptions, de dérogations, d’ajouts ou d’ambiguïtés doivent être identifiées et supprimées afin qu’un ensemble harmonisé de normes essentielles puisse être défini et appliqué. Pour y contribuer, les autorités élaboreront, dans les domaines sur lesquels porte la législation sectorielle concernée, des projets de normes techniques. De telles normes constituent un moyen efficace de renforcer le niveau 3 de la structure Lamfalussy, qui, à l’heure actuelle, ne permet que l’adoption d’orientations non contraignantes.

Compétences visant à assurer l’application cohérente des règles de l’UE : un mécanisme sera mis en place pour le cas où le comportement d’une autorité nationale de surveillance serait jugé contraire à la législation communautaire en vigueur (y compris aux normes techniques). Ce mécanisme comporterait trois phases décrites dans la proposition de la Commission.

Interventions en cas d’urgence : les autorités européennes de surveillance joueront un rôle de coordination actif entre les autorités nationales de surveillance, en particulier en cas d’évolutions défavorables susceptibles de mettre en péril le bon fonctionnement et l’intégrité du système financier de l’UE. Toutefois, dans certaines situations d’urgence, la coordination pourra s’avérer insuffisante, notamment si les autorités nationales, à elles seules, ne disposent pas des outils nécessaires pour réagir rapidement lors de l’apparition d’une crise transfrontalière. Par conséquent, dans de telles circonstances exceptionnelles, les autorités européennes de surveillance devraient être habilitées à obliger les autorités nationales à prendre des mesures conjointes particulières. Un pouvoir d’appréciation est nécessaire pour établir l’existence d’une situation d’urgence transfrontalière, cette décision devant donc être prise par la Commission européenne. Dans ce cas, la clause de sauvegarde s’appliquerait.

Règlement des différends entre autorités nationales de surveillance : il est proposé de mettre en place un mécanisme permettant de garantir que les autorités nationales de surveillance compétentes tiennent dûment compte des intérêts des autres États membres, y compris au sein des collèges d’autorités de surveillance. Si une autorité de surveillance est en désaccord avec la procédure ou le contenu d’une mesure ou l’absence de mesure prise par une autre autorité compétente alors que les dispositions législatives exigent une coopération, une coordination ou une prise de décision conjointe, l’Autorité pourra, à la demande de l’autorité compétente concernée, prêter assistance aux autorités pour trouver un compromis ou régler la question. Ce mécanisme comportera également trois phases décrites dans la proposition de la Commission.

Collèges d’autorités de surveillance : en tant qu’éléments centraux du système de surveillance communautaire, ils jouent un rôle important en ce qui concerne la circulation équilibrée d’informations entre les autorités compétentes des États d’origine et d’accueil. Les AES contribueront à favoriser le fonctionnement efficient et harmonieux des collèges d’autorités de surveillance et au contrôle de l’application cohérente de la législation communautaire par l’ensemble des collèges. Dans ce contexte, les AES pourront participer en qualité d’observateurs aux collèges d’autorités de surveillance et se faire communiquer toute information pertinente que les membres du collège se transmettent entre eux.

Culture commune en matière de surveillance, délégation des tâches et des responsabilités et analyse réciproque : les autorités participeront activement à la mise en place d’une culture commune en matière de surveillance et veilleront à l’établissement de procédures et de pratiques cohérentes en matière de surveillance dans l’ensemble de la Communauté. L’Autorité encouragera et facilitera la mise en place d’équipes de surveillance conjointes. En outre, les AES mèneront régulièrement des analyses réciproques des autorités nationales de surveillance.

Analyse des évolutions des marchés : alors que le CERS dont la création est proposée sera chargé de l’analyse macroprudentielle du secteur financier de l’UE, les AES devront reprendre les tâches des comités de surveillance européens dans ce domaine, car (i) leur analyse ne sera pas de la même nature: l’analyse microprudentielle fournit une analyse ascendante, tandis que l’analyse macroprudentielle est descendante, et (ii) leur analyse pourra contribuer utilement aux travaux du CERS.

Rôle international et de conseil : les AES pourront faire office de points de contact pour les autorités de surveillance de pays tiers. Dans ce contexte, elles pourront : i) conclure des accords administratifs avec des organisations internationales et des administrations de pays tiers ; ii) contribuer à l’élaboration des décisions en matière d’équivalence concernant les régimes de surveillance de pays tiers ; iii) sur demande ou de leur propre initiative, conseiller le Parlement européen, le Conseil et la Commission et publier des avis, notamment en ce qui concerne l’évaluation prudentielle de fusions et acquisitions transfrontalières.

Collecte d’informations : à la demande de l’Autorité, les autorités de surveillance et les autres autorités publiques des États membres transmettent à l’Autorité toutes les informations nécessaires pour accomplir les tâches qui lui sont assignées par le présent règlement. L’Autorité devra mettre en place et gérer un système central permettant de rendre ces informations accessibles aux autorités compétentes au sein de ces collèges. En principe, toutes les informations devront être transmises aux AES par les autorités nationales de surveillance.

Relations avec le CERS : le cadre proposé en matière de surveillance financière dans l’UE ne peut fonctionner que dans le cadre d’une coopération étroite entre le CERS et le SESF. Pour remplir son rôle d’autorité de surveillance macroprudentielle, le CERS aura besoin d’un flux d’informations microprudentielles harmonisées et actualisées, tandis que la surveillance microprudentielle assurée par les autorités nationales gagnerait à profiter des informations privilégiées dont dispose le CERS concernant l’environnement macroprudentiel.

Sauvegarde : une clause de sauvegarde garantit que lorsqu’un État membre estime qu’une décision prise en vertu de l’article 10 (décisions d’urgence) ou de l’article 11 (règlement de différends) des règlements empiète sur sa compétence budgétaire, il a la possibilité d’informer l’Autorité et la Commission que l’autorité nationale de surveillance n’a pas l’intention d’appliquer la décision de l’Autorité, en montrant clairement en quoi la décision de cette dernière empiète sur sa compétence budgétaire.

Organisation interne des AES et du SESF : chaque AES se composera: (i) d’un conseil des autorités de surveillance; (ii) d’un conseil d’administration; (iii) d’un président; et (iv) d’un directeur exécutif. En outre, une commission de recours unique pour les trois AES devra être établie.

Comité mixte des autorités européennes de surveillance : un comité mixte des autorités européennes de surveillance favorisera la compréhension mutuelle, la coopération entre les trois nouvelles autorités, ainsi que la cohérence de leurs approches en matière de surveillance

Commission de recours : un système de recours garantira que toute personne physique ou morale, y compris les autorités nationales de surveillance, pourra introduire, auprès d’une commission de recours, un recours en première instance contre une décision d’une AES afin de garantir l’application cohérente du droit communautaire (article 9), des interventions en cas d’urgence (article 10) et le règlement de différends (article 11). La commission de recours sera un organe commun des trois AES, qui traitera donc de questions relatives à la banque, à l’assurance et aux valeurs mobilières.

Différences principales entre les trois règlements: elles concernent les objectifs des autorités, la portée de leur action et les définitions, qui ont été adaptés aux spécificités de chacun des secteurs et de la législation communautaire en vigueur. En outre, le Conseil européen a également conclu que les AES devraient aussi disposer de pouvoirs de surveillance à l’égard des agences de notation du crédit. L’AEMF sera chargée de l’enregistrement des agences de notation. Elle sera aussi habilitée à prendre des mesures en matière de surveillance, telles que le retrait de l’enregistrement ou la suspension de l’utilisation des notations du crédit à des fins réglementaires. Les compétences en matière de surveillance pourraient comprendre le pouvoir d’exiger des informations et de mener des enquêtes ou des inspections sur place. Les responsabilités et les compétences de l’AEMF en ce qui concerne les agences de notation seront définies dans l’acte modifiant le règlement sur les agences de notation du crédit.

INCIDENCE BUDGÉTAIRE : la transformation des comités européens de surveillance existants en autorités de surveillance nécessite des ressources supplémentaires, tant budgétaires qu’en matière d’effectifs. Le montant total des dépenses opérationnelles à la charge du budget de la Communauté en crédits d’engagement et de paiement s’élève à 21,527 millions EUR pour la période 2011-2013. En outre, le cofinancement par les États membres (autorités nationales de surveillance ou ministères des finances) s’élève à 32,290 millions EUR, ce qui porte le total des ressources financières à 53,816 millions EUR pour la période 2011-2013.