Stratégie européenne pour les relations avec l'Amérique latine  
2009/2213(INI) - 17/03/2010  

La commission des affaires étrangères a adopté le rapport d’initiative de M. José Ignacio SALAFRANCA SÁNCHEZ-NEYRA (PPE, ES) sur la stratégie de l'UE pour les relations avec l'Amérique latine.

Les députés accueillent favorablement la communication de la Commission "L'Union européenne et l'Amérique latine: un partenariat entre acteurs mondiaux", qui vise à recenser, évaluer et présenter des propositions opérationnelles conduisant à un authentique Partenariat stratégique birégional (voir COM(2009)0495). Ils se félicitent également de l'élan imprimé par la présidence espagnole pour parvenir à la signature de l'accord d'association UE-Amérique centrale et des accords commerciaux multipartites avec la Colombie et le Pérou, ainsi que l'intérêt marqués pour relancer les négociations entre l'Union et le Mercosur.

Globalement, la commission parlementaire réaffirme que le soutien aux différents processus d'intégration régionale en Amérique latine constitue l'un des fondements du Partenariat birégional. Ce dernier doit notamment se fonder sur les principes de démocratie pluraliste et représentative, de respect des libertés et des droits fondamentaux, de liberté d'expression, d’État de droit, de primauté du droit, de respect des règles du jeu, de sécurité juridique et de rejet de toute forme de dictature ou d'autoritarisme.

Vision stratégique du Parlement européen concernant le Partenariat stratégique birégional UE Amérique latine : les députés rappellent que l'objectif ultime du Partenariat stratégique birégional UE Amérique latine est la création d'une zone euro latino américaine de partenariat global interrégional à l'horizon de 2015 couvrant les domaines politique, économique, commercial, social et culturel. Pour atteindre cet objectif, les députés énumèrent les moyens destinés à mettre en place une telle zone :

a) volet politique du Partenariat stratégique birégional : les députés demandent à la Haute Représentante de l'UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité d'élaborer des orientations claires sur la meilleure manière de coopérer étroitement et conjointement afin de favoriser le multilatéralisme effectif, de préserver l'environnement et les ressources naturelles, de lutter contre le changement climatique, de renforcer les capacités de maintien et de consolidation de la paix de l'ONU, de réaliser les OMD, ainsi que de faire face à des menaces communes contre la paix et la sécurité, y compris le trafic illicite de stupéfiants et d'armes, la criminalité organisée, l'impunité et le terrorisme. Ils demandent également à ce que soient mis en place des mécanismes appropriés de coopération institutionnelle entre l'Assemblée EuroLat et les différentes instances de l'Union et insistent pour que le futur SEAE veille à ce que, dans les délégations de l'Union en Amérique latine, le Parlement européen ait sa place.

Les députés insistent également sur les points suivants :

  • la création d’une Charte euro-latino-américaine pour la paix et la sécurité qui, sur la base de la Charte des Nations unies, définisse des stratégies et des lignes d'action politique et de sécurité permettant de faire face aux menaces auxquels sont confrontés les acteurs du Partenariat;
  • une plus grande stabilité de nombreux partenaires latino-américains;
  • une politique efficace mais respectueuse des droits de l'homme au sein d'une administration responsable, contrôlable et transparente ainsi qu’une justice réellement indépendante ;
  • l’augmentation des crédits pour les projets menés au Pérou, en Colombie et en Bolivie afin d'éliminer les cultures de stupéfiants ;
  • une plus grande attention apportée à la lutte contre le changement climatique et le réchauffement planétaire.

Les députés déplorent au passage que certains pays, peu soucieux de la nécessité de remédier aux graves carences résultant du sous développement, de la pauvreté, des pandémies, de la malnutrition, de la criminalité et des catastrophes naturelles, aient employé leurs ressources financières pour accroître leurs dépenses militaires.

b) volets économique et commercial du Partenariat stratégique birégional : les députés renouvellent la proposition du Parlement européen tendant à créer une zone euro latino-américaine de partenariat global interrégional, fondée sur un modèle compatible avec l'OMC et avec l'intégration régionale, qui se déploierait en deux étapes. Dans le cadre de la première étape, les négociations concernant l'accord d'association UE-Mercosur devraient être reprises, étant donné qu'un accord d'association de ce genre, affectant 700 millions de personnes, constituerait l'accord birégional le plus ambitieux du monde. Les négociations concernant l'accord d'association UE Amérique centrale devraient en outre être menées bien avant le sommet de Madrid. Parallèlement, l'accord commercial multipartite entre l'UE et les pays de la Communauté andine devrait être révisé et les accords d'association existants avec le Mexique et le Chili, approfondis. La deuxième étape qui aboutirait à un accord de partenariat global interrégional aux environs de 2015, serait fondée sur une base juridique, un cadre institutionnel et une portée géographique complète, et des dispositions et règles communes de façon à former un partenariat aussi ample que possible.

c) volet social du Partenariat stratégique birégional : les députés rappellent que les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) doivent être atteints d'ici 2015, et suggèrent, dans ce contexte, aux deux régions de parvenir à un accord avant la réunion de haut niveau sur les objectifs du Millénaire pour le développement de septembre 2010.

Dans la foulée, les députés appellent à la réalisation des actions suivantes :

  • l'ouverture d'un dialogue sérieux et rigoureux dans les domaines des sciences, des technologies et de l'innovation, en prenant exemple sur l'accord sur l'innovation avec le Chili;
  • des efforts décisifs et un financement adéquat pour la lutte contre l'analphabétisme, qui reste élevé dans certains pays de la région, en particulier parmi les filles et les femmes ;
  • des politiques de prévention et de protection dans le domaine de la violence contre les femmes en ce fondant sur l'arrêt récemment rendu par la Cour interaméricaine des droits de l'homme sur les féminicides perpétrés à Campo Algodonero, au Mexique, qui constitue un précédent pour l'ensemble de la région;
  • des efforts accrus en matière d'intégration régionale − souhaitée et recherchée par de nombreux gouvernements latino-américains et facilitée par l'Union européenne − afin de faire face aux sérieux obstacles d'infrastructures, y compris dans le secteur énergétique ;
  • des investissements dans les travaux publics, la promotion du marché intérieur, la protection des petites et moyennes entreprises, le développement du crédit, le renforcement des investissements dans la santé et l'éducation, une plus grande attention portée au chômage des jeunes et à la discrimination professionnelle en raison du sexe;
  • la mise en place d’une fiscalité juste, équitable et moderne permettant de lutter contre la fraude fiscale ;
  • le réexamen des dépenses militaires de certains pays ;
  • une action plus vigoureuse pour garantir la sécurité alimentaire.

Mécanismes visant à atteindre les objectifs ultimes du Partenariat stratégique birégional:

a) mécanismes institutionnels : les députés recommandent le maintien de sommets bisannuels mais soulignent que la relation avec l'Amérique latine ne saurait se limiter à un horizon de deux ans et que, pour la renforcer, il importe de l'inscrire dans une vision à long terme. Ils proposent dès lors d'ouvrir un dialogue politique birégional s'articulant autour de thèmes, de domaines et d'intérêts communs, dans la perspective d'un espace euro atlantique constitué des États-Unis, de l'Amérique latine et de l'Union européenne. Ils renouvellent la proposition du Parlement de créer une Fondation Europe-Amérique latine et Caraïbes, dont les objectifs principaux devraient être de contribuer à la préparation des sommets et au suivi des décisions et des lignes d'action politique arrêtées au cours des sommets. Cette Fondation servirait également de forum de dialogue et de coordination réunissant l'ensemble des acteurs politiques, économiques, institutionnels et universitaires, ainsi que des membre de la société civile qui œuvrent à renforcer les relations euro-latino-américaines, y compris l'Assemblée EuroLat. Le budget de cette Fondation serait limité mais suffisant pour lui permettre de mener à bien ses missions (qu'il soit alimenté par des fonds provenant des États membres de l'UE et des États latino, par le budget de l'UE et par les ressources générées par la Fondation elle-même). Les députés proposent en outre que soient créées toute une série d’autres organes satellites autour de la Fondation. De même, ils insistent pour que soient conclus les accords d'association sous-régionaux en cours de négociation et réaffirment leur appui à l'approche "bloc à bloc" préconisée par l'Union en matière de négociations.

b) mécanismes financiers : en termes financiers, les députés soutiennent la facilité d'investissement en Amérique latine (LAIF) proposée par la Commission, dotée de 100 millions EUR jusqu’en 2013. Ils insistent pour que la coopération au développement avec l'Amérique latine ne consiste pas simplement à apporter une aide mais qu'elle permette de concentrer plutôt les ressources financières de l'instrument de financement de la coopération au développement (ICD) sur les pays les plus pauvres et les groupes les plus vulnérables. De nouvelles formes de collaboration avec les pays émergents et les pays à revenu moyen en Amérique latine devraient voir le jour à travers l'Instrument pour les pays industrialisés (IPI+).

Enfin, les députés soulignent la nécessité de s'acheminer vers une harmonisation en matière de régulation et de surveillance des différents systèmes financiers d'Amérique latine pour développer des passerelles et converger, dans la mesure du possible, avec le système européen.