Autorité bancaire européenne (ABE): institution  
2009/0142(COD) - 22/09/2010  

Le Parlement européen a adopté par 587 voix pour, 37 voix contre et 40 abstentions, une résolution législative sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une Autorité bancaire européenne (ABE).

Le Parlement a arrêté sa position en première lecture suivant la procédure législative ordinaire (l’ex-procédure de codécision). Les amendements adoptés en plénière sont le résultat d’un compromis négocié entre le Parlement européen et le Conseil. Ils modifient la proposition de la Commission comme suit :

Établissement et champ d’application : le règlement institue l'Autorité européenne de surveillance (Autorité bancaire européenne) (ABE). L'Autorité a pour objectif de protéger l'intérêt public en contribuant à la stabilité et à l'efficacité à court, moyen et long terme du système financier, pour l'économie de l'Union, ses citoyens et ses entreprises.

L'Autorité contribuera à : i) améliorer le fonctionnement du marché intérieur, notamment par un niveau de réglementation et de surveillance satisfaisant, efficace et cohérent ; ii) assurer l'intégrité, la transparence, l'efficience et le bon fonctionnement des marchés financiers ; iii) renforcer la coordination internationale de la surveillance, iv) éviter les arbitrages réglementaires et favoriser des conditions de concurrence égales ; v) veiller à ce que la prise de risques de crédit ou autres soit correctement réglementée et surveillée, et  vi) à renforcer la protection des consommateurs. 

Dans l'exécution de ses tâches, l'Autorité devra : i) prêter particulièrement attention à tout risque systémique présenté par des établissements financiers dont la défaillance risque d'entraver le fonctionnement du système financier ou de l'économie réelle ; ii) agir de manière indépendante et objective dans le seul intérêt de l'Union.

Siège : l’Autorité aura son siège à Londres.

Système européen de surveillance financière: une nouvelle disposition stipule que l'Autorité fait partie d'un système européen de surveillance financière (SESF) dont l'objectif premier consiste à veiller à ce que les règles applicables au secteur financier soient mises en œuvre de façon adéquate afin de préserver la stabilité financière et par là même de garantir la confiance dans le système financier en dans son ensemble et la protection suffisante des consommateurs de services financiers.

Le compromis précise que le SESF se compose: i) du Conseil européen des risques systémiques (CERS); ii) de l’Autorité bancaire européenne (ABE) ; iii) de l'Autorité européenne des marchés financiers) (AEMF); iv) de l'Autorité européenne des assurances et pensions professionnelles) (AEAPP); v) du comité mixte des autorités européennes de surveillance ; vi) des autorités compétentes ou de surveillance des États membres visées aux règlements ABE, AEMF et AEAPP.

Le CERS, l’ABE, l’AEMF et l’AEAPP sont responsables devant le Parlement européen.

Tâches : le compromis étend la liste des tâches de l’Autorité. Celle-ci devra entre autres :

  • procéder à des analyses économiques des marchés afin d'aider l'Autorité à mener à bien sa mission;
  • favoriser la protection des déposants et des investisseurs ;
  • contribuer au fonctionnement cohérent des collèges d'autorités de surveillance, au suivi, à l'évaluation et à la mesure du risque systémique, ainsi qu'à l'élaboration et à la coordination de plans de sauvetage et de résolution des défaillances, fournir un niveau élevé de protection aux déposants et aux investisseurs dans toute l'Union, élaborer des méthodes de résolution des défaillances des établissements financiers et évaluer la nécessité d'instruments de financement appropriés ;
  • publier sur son site internet, et mettre à jour régulièrement, toutes les informations relevant de son domaine d'activité, en particulier, pour ce qui est de son champ de compétence, les informations sur les établissements financiers enregistrés.

Protection des consommateurs et activités financières : afin d'encourager la protection des déposants et des investisseurs, le texte amendé stipule que l'Autorité assume un rôle prépondérant dans la promotion de la transparence, de la simplicité et de l'équité sur le marché des produits ou des services financiers, dans l'ensemble du marché unique, notamment:  i) en analysant les tendances de consommation, ii) en coordonnant des initiatives d'éducation et d'initiation financières,  iii) en élaborant des normes de formation pour les professionnels du secteur,  iv) en contribuant au développement de règles communes en matière d'information.

L'Autorité exercera une surveillance sur les activités financières existantes et nouvelles et pourra adopter des orientations et des recommandations en vue de promouvoir la sécurité et la fiabilité des marchés et la convergence des pratiques réglementaires. Elle devra instaurer un comité de l'innovation financière rassemblant toutes les autorités nationales de surveillance compétentes en la matière en vue de parvenir à une approche coordonnée du traitement applicable aux activités financières nouvelles ou innovantes en matière de réglementation et de surveillance et d'émettre des avis à l'intention du Parlement européen, du Conseil et de la Commission.

L'Autorité pourra temporairement interdire ou restreindre certaines activités financières qui menacent le bon fonctionnement et l'intégrité des marchés financiers ou la stabilité de tout ou partie du système financier dans l'Union, dans certains cas et conditions spécifiques ou si la situation l'exige d'urgence.

Normes techniques de réglementation : le Parlement européen et le Conseil pourront déléguer des pouvoirs à la Commission afin qu'elle adopte des normes techniques de réglementation conformément à l'article 290 du TFUE en vue d'assurer une harmonisation cohérente dans les domaines expressément prévus par les actes législatifs visés au règlement. Il s'agit dans cette réglementation de normes techniques qui n'impliquent aucune décision stratégique ni choix politiques.

Les projets de normes techniques de réglementation seront élaborés par l'Autorité et soumis à l'approbation de la Commission. L'Autorité devra en principe procéder à des consultations publiques ouvertes sur ces normes et analyser les coûts et avantages potentiels qu'elles impliquent, avant de les soumettre à la Commission. Elle devra solliciter également l'avis ou les conseils du groupe des parties concernées du secteur bancaire.

Dès réception du projet de norme technique de réglementation, la Commission devra le transmettre immédiatement au Parlement européen et au Conseil. Elle devra statuer sur l'adoption du projet de norme dans les trois mois suivant leur soumission. Si elle n'envisage pas d'adopter la norme, la Commission devra en informer le Parlement et le Conseil en indiquant les motifs de sa décision.

L’Autorité pourra également élaborer des projets de normes d’exécution par la voie d'actes d'exécution en vertu de l'article 291 du TFUE pour mettre en œuvre les actes juridiquement contraignants de l'Union dans les domaines expressément prévus par le règlement et soumettra ses projets de normes d'exécution à la Commission pour approbation.

Orientations et recommandations : l'Autorité devra procéder, le cas échéant, à des consultations publiques ouvertes sur les orientations et les recommandations, et analyser leurs coûts et avantages potentiels.

Dans un délai de deux mois suivant l'émission d'une orientation ou d'une recommandation, chaque autorité compétente devra confirmer son intention de respecter cette orientation ou cette recommandation. Si une autorité compétente n'entend pas les respecter, elle devra en informer l'Autorité en motivant sa décision. L'Autorité publiera les motifs de cette décision. Elle devra aussi publier le fait qu'une autorité compétente ne respecte pas ou n'entend pas respecter cette orientation ou recommandation.

Situation d’urgence : lorsque des circonstances défavorables risquent de compromettre gravement le bon fonctionnement et l'intégrité des marchés financiers ou la stabilité globale ou partielle du système financier dans l'Union, l'Autorité doit s'employer à faciliter et, au besoin, à coordonner toute action entreprise par les autorités nationales de surveillance compétentes concernées.

Le Conseil pourra, en consultation avec la Commission et le CERS et, le cas échéant, les autorités européennes de surveillance, adopter une décision destinée à l'Autorité constatant l'existence d'une situation d'urgence, à la demande de l'Autorité, de la Commission ou du CERS. Le Conseil réexaminera cette décision au moins une fois par mois. Si la décision n'est pas reconduite au bout d'un mois, elle expirera automatiquement. Le Conseil pourra déclarer à tout moment que la situation d'urgence a pris fin.

Lorsque le CERS ou les autorités européennes de surveillance estiment qu'une situation d'urgence pourrait se présenter, ils doivent adresser une recommandation confidentielle au Conseil et lui fournir une analyse de la situation. Si le Conseil constate l'existence d'une situation d'urgence, il doit en informer dûment, sans retard, le Parlement européen et la Commission.

Règlement des différends entre autorités compétentes dans des situations transfrontalières : lorsqu'une autorité compétente est en désaccord avec une mesure d'une autorité compétente d'un autre État membre dans des cas spécifiés, elle peut, à la demande de l'une ou de plusieurs des autorités compétentes concernées, prêter assistance aux autorités pour trouver un accord. Dans certains cas spécifiés l'Autorité pourra également, de sa propre initiative, prêter assistance aux autorités pour trouver un accord. À ce stade, l'Autorité jouera le rôle de médiateur.

Si, au terme de la phase de conciliation, les autorités compétentes concernées n'ont pas trouvé d'accord, l'Autorité pourra arrêter une décision pour leur imposer de prendre des mesures précises, ou de s'abstenir d'agir, en vue de régler la question, avec des effets contraignants pour les autorités compétentes concernées.

Collèges d'autorités de surveillance et gouvernance : le compromis précise que l'Autorité joue un rôle de premier plan pour assurer le fonctionnement cohérent des collèges d'autorités de surveillance pour les établissements transfrontaliers dans toute l'Union.

L’Autorité pourra notamment : a) rassembler et partager toutes les informations pertinentes afin de faciliter les travaux du collège ; b) lancer et coordonner des simulations de crise à l'échelle de l'Union ; c) encourager des activités de supervision efficaces et efficientes ; d) superviser les tâches réalisées par les autorités compétentes; et  e) demander à un collège de reprendre ses délibérations lorsqu'elle considère que la décision risque de donner lieu à une mauvaise application du droit de l'Union.

Un rôle de médiation à caractère juridiquement contraignant devrait permettre à l'Autorité de résoudre les différends entre les autorités compétentes. Si aucun accord ne peut être trouvé au sein du collège d'autorités de surveillance concerné, l'Autorité pourra arrêter des décisions en matière de surveillance qui soient directement applicables à l'établissement concerné.

Risque systémique : l'Autorité doit tenir compte du risque systémique et faire face aux risques d'une perturbation des services financiers causée par la détérioration de l'ensemble ou d'une partie du système financier et susceptible d'avoir des répercussions négatives graves sur le marché intérieur et l'économie réelle. En collaboration avec le Comité européen du risque systémique (CERS), elle devra élaborer un ensemble commun d'indicateurs quantitatifs et qualitatifs (tableau de bord du risque), pour identifier et mesurer le risque systémique. Elle devra également mettre au point un mécanisme adéquat de simulation de crise, permettant de recenser les établissements financiers qui sont susceptibles de présenter un risque systémique.

Procédures de sauvetage et de résolution des défaillances : l'Autorité devra contribuer et participer activement à l'élaboration et à la coordination de plans efficaces et cohérents en matière de sauvetage et de résolution des défaillances, de procédures à suivre dans les situations d'urgence et de mesures préventives visant à réduire au minimum l'impact systémique de toute défaillance. Elle pourra recenser les meilleures pratiques à cette fin.

Mécanisme européen des systèmes de garantie des dépôts: le texte amendé stipule que l'Autorité doit contribuer au renforcement du mécanisme européen des systèmes nationaux de garantie des dépôts en agissant pour garantir la bonne application de la directive 94/19/CE, en s'efforçant de veiller à ce que les systèmes nationaux de garantie des dépôts : i) soient correctement alimentés par des contributions d'établissements financiers, y compris ceux installés dans l'Union, y acceptant des dépôts, mais ayant leur siège dans un pays tiers, ii) et qu'ils offrent un niveau élevé de protection à tous les déposants dans un cadre harmonisé dans l'ensemble de l'Union.

Système européen de dispositifs en matière de résolution des défaillances bancaires et de financement : l’Autorité devra contribuer à: i) l'élaboration de méthodes de résolution des défaillances des établissements financiers, en particulier de ceux qui sont susceptibles de présenter un risque systémique, selon des modalités permettant d'empêcher la contagion ; ii) l'évaluation de la nécessité de mettre en place un système de mécanismes de financement cohérents, solides et fiables, assortis d'instruments de financement appropriés, liés à un ensemble coordonné de dispositifs nationaux de gestion des crises.

Mesures de sauvegarde : l'Autorité devra veiller à ce qu'aucune décision adoptée en vertu des articles 10 (mesures d’urgence) ou 11 (règlements des différends) n'empiète de quelque façon que ce soit sur les compétences budgétaires des États membres.

Lorsqu'un État membre estime qu'une décision prise empiète sur ses compétences budgétaires, il pourra informer l'Autorité et la Commission, dans les deux semaines suivant la notification de la décision de l'Autorité à l'autorité compétente, que celle-ci n'appliquera pas la décision. Dans sa notification, l'État membre devra expliquer clairement et précisément pourquoi et en quoi la décision empiète sur ses compétences budgétaires. En pareil cas, la décision de l'Autorité sera suspendue.

Conseil des autorités de surveillance : des amendements ont été introduits en ce qui concerne l’organisation et la composition du conseil des autorités de surveillance. Dans l'exécution des tâches qui sont conférées au conseil des autorités de surveillance par le règlement, son président et ses membres votants doivent agir en toute indépendance et objectivité dans le seul intérêt de l'ensemble de l'Union. Il est précisé que ni les États membres, ni les institutions ou organes de l'Union, ni aucune autre entité publique ou privée ne cherchent à influencer les membres du conseil des autorités de surveillance dans l'exécution de leurs tâches. Le Parlement européen pourra, après avoir entendu le candidat retenu, s'opposer à la désignation du président de l’Autorité.

Comité mixte des autorités européennes de surveillance : le texte amendé prévoit d’instituer un comité mixte des Autorités européenne de surveillance. Le comité mixte constitue une enceinte au sein de laquelle l’Autorité coopère régulièrement et étroitement et assure la cohérence transsectorielle des activités les autres AES, en particulier en ce qui concerne: i) les conglomérats financiers; ii) la comptabilité et les audits; iii) les analyses microprudentielles des évolutions, des vulnérabilités et des risques transsectoriels pour préserver la stabilité financière; iv) les produits d'investissement de détail;  v) les mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux.

Clause de révision: au plus tard trois ans après la date d'application du règlement, et tous les trois ans par la suite, la Commission devra publier un rapport général sur l'expérience tirée du fonctionnement de l'Autorité et des procédures fixées dans le règlement. Ce rapport évaluera notamment : a) le degré de convergence des pratiques en matière de surveillance atteint par les autorités compétentes ; b) le fonctionnement des collèges d'autorités de surveillance;  c) les avancées réalisées en matière de convergence dans les domaines de la prévention, de la gestion et de la résolution des crises, y compris des mécanismes de financement européens;  d)  le rôle de l'Autorité en ce qui concerne le risque systémique ; e) l'application de la clause de sauvegarde ; f) l'exercice du rôle de médiation à caractère juridiquement contraignant.

Le rapport examinera également :

  • s'il est opportun de poursuivre la surveillance distincte des secteurs bancaire, des assurances, des pensions professionnelles et des marchés financiers;
  • s'il est opportun de faire procéder à la surveillance prudentielle et à la surveillance de l'exercice des activités séparément ou par une même autorité de surveillance;
  • s'il est opportun de simplifier et de renforcer l'architecture du SESF pour accroître la cohérence entre les niveaux "macro" et "micro" et entre les Autorités européennes de surveillance;
  • si l'évolution du SESF est compatible avec l'évolution globale;
  • si le SESF présente une diversité et un degré d'excellence suffisants;
  • si la responsabilité et la transparence sont au niveau adéquat en ce qui concerne les obligations de publication;
  • si les ressources de l'Autorité sont suffisantes pour qu'elle puisse exercer ses responsabilités ;
  • si le choix du siège de l'Autorité est judicieux.