Taxation des produits énergétiques et de l'électricité: restructuration du cadre communautaire  
2011/0092(CNS) - 13/04/2011  

OBJECTIF : revoir les règles obsolètes régissant la taxation de l’énergie dans l’Union européenne (UE) en vue d’assurer le bon fonctionnement du marché intérieur dans le contexte des nouvelles exigences en matière d’énergie et d’environnement.

ACTE PROPOSÉ : Directive du Conseil.

CONTEXTE : depuis l'adoption de la directive 2003/96/CE sur la taxation de l’énergie (DTE), le cadre d’action dans lequel celle-ci s'inscrit a fortement évolué. Dans le domaine de l’énergie et de la lutte contre le changement climatique, des objectifs stratégiques concrets et ambitieux ont été définis pour la période allant jusqu’à 2020. Dans sa version actuelle, la DTE pose plusieurs les problèmes :

1°) elle ne garantit pas le degré de cohérence souhaitable dans le traitement des sources d’énergie fossiles de base et de l’électricité. Si l’on tient compte du contenu énergétique des différents produits, les niveaux minimaux de taxation varient considérablement d’un produit à l’autre. Certains produits sont donc favorisés par rapport aux autres, le traitement le plus favorable étant réservé au charbon.

2°) la DTE ne prévoit pas de lien adéquat entre le signal de prix donné par les niveaux minimaux de taxation qu’elle fixe et la nécessité de lutter contre le changement climatique.

3°) bien que les combustibles et carburants provenant de sources renouvelables représentent une part de marché croissante, leur traitement fiscal au titre de la DTE se fonde toujours sur des règles définies à une époque où ils étaient des produits de niche sans grande importance sur le marché. La taxation par défaut des combustibles et carburants renouvelables se fonde sur le volume et sur le taux applicable au produit fossile auquel se substitue le produit renouvelable concerné. Le contenu énergétique plus faible de ces combustibles et carburants n'est donc pas pris en compte.

4°) les taxes sur l’énergie au titre de la DTE sont prélevées de la même manière dans tous les cas, que la limitation des émissions de CO2 soit assurée ou non par le système d’échange de quotas d'émission de l’UE (SEQE-UE). Les mécanismes destinés à limiter ces émissions prévus par la législation de l’Union peuvent, dans certains cas, se chevaucher et, dans d’autres, faire totalement défaut.

Afin de disposer d'un cadre approprié pour l'utilisation de la fiscalité de l'énergie, le Conseil européen de mars 2008 a demandé que la directive soit rendue plus conforme aux objectifs de l'Union européenne en matière d'énergie et de lutte contre le changement climatique. Les objectifs sont les suivants :

  • garantir un traitement cohérent des différentes sources d’énergie dans le cadre de la DTE, afin d’assurer une réelle égalité de traitement des consommateurs d’énergie, indépendamment de la source utilisée;
  • mettre en place un cadre adapté pour la taxation des énergies renouvelables;
  • mettre en place un cadre pour l’utilisation de la taxation du CO2 afin de compléter le signal de prix lié au carbone au titre du SEQE, tout en évitant les chevauchements des deux instruments.

ANALYSE D’IMPACT : la Commission a analysé un certain nombre d'approches et les a comparées au scénario de base (scénario du statu quo). Les approches ci-après ont été examinées.

  • Révision du traitement fiscal des différentes sources d’énergie selon un critère unique.
  • Révision de la structure de la directive en tenant compte des différents objectifs de la taxation de l’énergie (création de recettes et économies d’énergie d’une part, considérations environnementales de l'autre.
  • Introduction d’une taxe uniforme supplémentaire liée au CO2.

L’analyse d’impact a montré qu’il est possible d’atteindre les objectifs envisagés sans coûts économiques supplémentaires, la révision de la DTE pouvant même apporter un avantage économique, notamment si l’on utilise les recettes supplémentaires découlant des taxes générales sur la consommation d'énergie et de la taxe liée au CO2 pour réduire les cotisations sociales patronales. Elle a également montré que la révision de la DTE ne ferait pas peser de charges exagérées sur les entreprises et qu'elle n’entraînerait pas de perte de compétitivité au niveau sectoriel.

Il ressort également de l’analyse d’impact que les effets distributifs sur les ménages diffèrent d’un État membre à l’autre; il est donc justifié de maintenir la possibilité d’exonérer les ménages au niveau national.

BASE JURIDIQUE : article 113 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

CONTENU : la Commission propose, entre autres, de mettre en place les mesures ci-après à compter de 2013 :

1) Introduction d’une distinction explicite entre la taxation de l'énergie spécifiquement liée aux émissions de CO2 résultant de la consommation des produits concernés (taxation liée au CO2) et la taxation de l’énergie fondée sur le contenu énergétique des produits (taxation générale de la consommation d’énergie).

2) Extension, pour ce qui concerne la taxation liée au CO2, du champ d’application de la directive sur la taxation de l'énergie aux produits énergétiques relevant en principe de la directive 2003/87/CE établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté, tout en prévoyant une exonération obligatoire de la taxation liée au CO2 pour les activités couvertes par le système d’échange de quotas d’émission prévu par cette dernière directive.

3) Révision des niveaux minimaux de taxation, notamment pour que ceux-ci intègrent les émissions de CO2 et le pouvoir calorifique inférieur d’une manière cohérente pour les différentes sources d'énergie, moyennant des périodes transitoires si nécessaire.

4) Obligation pour les États membres de reproduire, dans leurs niveaux de taxation nationaux, le rapport qui existe entre les niveaux minimaux de taxation fixés dans la DTE pour les différentes sources d'énergie. Cette exigence a pour objectif de garantir que le traitement cohérent des différentes sources d'énergie s'applique également en ce qui concerne les niveaux de taxation fixés à l'échelon national (s'ils dépassent les niveaux minimaux établis par la DTE.

5) Suppression de la possibilité pour les États membres d’opérer une différence entre le gazole à usage commercial et le gazole à usage privé utilisé comme carburant.

6) Simplification, dans la mesure du possible, de la structure des niveaux minimaux de taxation : i) suppression de la distinction actuelle entre les usages commerciaux et privés des produits énergétiques utilisés pour la production de chaleur et de l'électricité ; ii) fixation d’un niveau minimal de taxation unique pour l’essence plombée et l’essence sans plomb.

7) Limitation de l’exonération prévue à la DTE pour les produits énergétiques servant à la production d’électricité, qui ne concernerait que la taxation générale de la consommation d’énergie, et introduction d’une exonération fiscale temporaire de huit ans en ce qui concerne l’électricité produite sur le littoral et directement fournie aux navires se trouvant à quai dans un port.

8) Introduction d’un crédit d’impôt en ce qui concerne la taxation liée au CO2 pour les installations des secteurs et sous-secteurs qui sont considérés comme exposés à un risque important de fuite de carbone.

9) Maintien de la flexibilité offerte par la directive sur la taxation de l'énergie, y compris la règle selon laquelle les États membres sont libres d’appliquer plus d’une taxe sur la consommation d’énergie. Toutefois, la Commission juge utile de revoir certaines des possibilités actuelles. Elle propose, entre autres:

  • de limiter le champ d’application de la disposition qui concerne les cas dans lesquels la DTE ne s'applique pas, à la taxation générale de la consommation d'énergie, afin de garantir un signal de prix lié au CO2 global et cohérent en dehors du système d’échange de quotas d’émission de l’UE;
  • de supprimer la disposition qui prévoit des niveaux minimaux de taxation réduits pour le gazole de chauffage dans trois États membres ;
  • de limiter autant que possible les réductions et exonérations facultatives à la taxation générale de la consommation d'énergie, afin de garantir un signal de prix lié au CO2 global et cohérent en dehors du système d’échange de quotas d’émission de l’UE ;
  • de modifier la DTE pour permettre d’octroyer des avantages fiscaux pour les produits utilisés en tant que combustibles par les ménages indépendamment de la source d’énergie utilisée, c'est-à dire de lever l’exclusion frappant certaines sources comme le gazole de chauffage..
  • de modifier la disposition en vertu de laquelle les États membres peuvent appliquer un niveau de taxation allant jusqu'à zéro aux produits énergétiques et à l'électricité utilisés pour des travaux agricoles, horticoles ou piscicoles et dans la sylviculture ;
  • de supprimer, d'ici 2023, la possibilité pour les États membres de prévoir une exonération ou une réduction fiscale pour les biocarburants.

La Commission devra présenter tous les cinq ans au Conseil, et pour la première fois d'ici la fin de 2015, un rapport sur l’application de la directive sur la taxation de l’énergie et, le cas échéant, une proposition de modification.

INCIDENCE BUDGÉTAIRE : la proposition n'a aucune incidence budgétaire pour l'Union européenne. 

ACTES DÉLÉGUÉS: la proposition contient des dispositions habilitant la Commission à adopter des actes délégués, conformément à l’article 290 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, pour mettre à jour les codes de la nomenclature combinée pour les produits visés à la directive 2003/96/CE, de même que la référence à la nomenclature combinée en vigueur.