Espace ferroviaire unique européen. Refonte  
2010/0253(COD) - 09/03/2012  

Le Conseil a adopté à la majorité qualifiée sa position en première lecture sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant un espace ferroviaire unique européen. Bien que le Conseil soit d'accord avec la Commission quant à l'objectif de la proposition, l'approche qu'il a retenue nécessite des modifications importantes de la proposition initiale.

Le Conseil juge inacceptables un certain nombre des dispositions de la proposition, parce que leur impact est considéré comme étant beaucoup trop étendu, en particulier en ce qui concerne : i) les conditions d'accès aux installations de service pour les entreprises ferroviaires, ii) les principes relatifs à la perception de redevances d'utilisation de l'infrastructure ferroviaire et des installations de service ainsi que iii) les fonctions de l'organisme de contrôle.

En conséquence, la position en première lecture du Conseil modifie, dans une certaine mesure, la proposition initiale de la Commission en la reformulant et en supprimant plusieurs dispositions. Le Conseil ne peut, dès lors, accepter les amendements introduits par le Parlement européen dans l'avis rendu en première lecture qui se rapportent aux points clés suivants :

1) Conditions d'accès, pour les entreprises ferroviaires, aux installations de service et aux services fournis dans ces installations : afin de fournir un bon accès au marché pour les nouvelles entreprises ferroviaires, la Commission propose d'introduire des exigences d'indépendance (juridique, organisationnelle et décisionnelle) pour la gestion des installations de service et la fourniture de transport ferroviaire. Le Conseil souhaite pour sa part remplacer la référence faite à l' « indépendance juridique » par l'exigence d'indépendance « sur les plans organisationnel et décisionnel ».

Plus précisément, le Conseil introduit une distinction entre, d'une part, les installations de service essentielles pour lesquelles il y a lieu de garantir un niveau de concurrence plus élevé et, d'autre part, les autres installations de service. Pour ces dernières, le Conseil prévoit uniquement la séparation des comptes; pour les installations de service essentielles auxquelles l'accès doit être amélioré, le Conseil introduit l'exigence d'indépendance sur les plans organisationnel et décisionnel.

Par ailleurs, dans son texte initial, la Commission propose l'introduction de dispositions de type «use it or lease it» : lorsqu'une installation de service n'est pas utilisée pendant une certaine période, son propriétaire doit la mettre à la disposition d'une autre partie intéressée (via une location ou un leasing). Le Conseil est d'accord avec l'approche proposée mais il suggère de fixer une durée de trois ans, au lieu des deux ans prévus dans la proposition initiale de la Commission. En outre, le Conseil estime que l'entreprise ferroviaire devra manifester auprès de l'exploitant son intérêt pour l'utilisation de l'installation, qui doit se fonder sur des besoins avérés. Enfin, l'exploitant aura le droit d'empêcher le leasing et la location de cette installation en démontrant qu'un processus de reconversion est en cours.

2) Principes de tarification et exceptions à ces principes :

Coûts directs : le Conseil est favorable au principe selon lequel les redevances pour l'ensemble des prestations minimales et pour l'accès à l'infrastructure reliant les installations de service sont égales au coût directement imputable à l'exploitation du service ferroviaire. Il estime toutefois que l'annexe VIII, point 1, doit être supprimée et que la méthode de calcul des coûts directement imputables à l'exploitation du service ferroviaire doit être adoptée sous la forme d'actes d'exécution. Le Conseil introduit aussi la possibilité pour le gestionnaire de l'infrastructure de décider de s'adapter progressivement à la méthode de calcul des coûts directs, pendant une période de cinq ans après la date limite indiquée pour la transposition de la directive.

Redevances pour le bruit : le Conseil estime que l'approche de la Commission concernant l'imputation du coût des effets du bruit doit rester pour les États membres un système facultatif. Est introduite en outre la possibilité pour la Commission d'adopter des mesures d'exécution déterminant les modalités à suivre pour l'imputation du coût des effets du bruit, en permettant que les redevances d'infrastructure soient différenciées pour tenir compte, le cas échéant, de la sensibilité de la zone touchée.

Système européen de contrôle des trains : la proposition de la Commission prévoit que les trains équipés du système européen de contrôle des trains (ETCS) bénéficient d'une réduction temporaire de la redevance d'utilisation de l'infrastructure. Le Conseil est favorable à un système facultatif et opposé à toute mesure obligatoire à cet égard.

3) Financement du gestionnaire de l'infrastructure et coût de l'infrastructure et comptabilité : la proposition stipule que le gestionnaire de l'infrastructure est encouragé par des mesures d'incitation à réduire les coûts de fourniture de l'infrastructure et le niveau des redevances d'accès. Il est proposé que la mise en œuvre de ces mesures d'incitation ne puisse s'effectuer que dans le cadre d'un contrat entre les autorités compétentes nationales et les gestionnaires d'infrastructure concernant les coûts d'infrastructure et les redevances d'accès.

Le Conseil approuve en principe l'approche de la Commission sur cette question, mais il préfère conserver la possibilité, en alternative auxdits contrats, d'appliquer des mesures réglementaires pour la mise en œuvre des mesures d'incitation, et réduire la durée minimum des contrats à trois ans. En outre, le Conseil propose de préciser qu'il incombe aux États membres de déterminer le niveau du financement public à prévoir pour le financement des infrastructures.

4) Séparation entre gestionnaires d'infrastructures et entreprises ferroviaires : le Conseil est d'avis, à l'instar de la Commission, qu'il n'est pas souhaitable d'aborder la question de la séparation entre gestionnaires d'infrastructures et entreprises ferroviaires dans le cadre de la proposition (refonte) établissant un espace ferroviaire unique européen.

5) Fonctions de l'organisme de contrôle : bien que le Conseil soit, de manière générale, en mesure de suivre la proposition de la Commission pour ce qui concerne le renforcement des organismes de contrôle, il estime nécessaire de revoir les dispositions concernant les exigences d'indépendance pour le personnel de ces organismes. En outre, le Conseil rend facultative la possibilité pour l'organisme de contrôle d'intervenir dans les questions de financement et le Conseil n'accepte pas la publication des comptes réglementaires.

Le Conseil décide également d'octroyer à l'organisme de contrôle la compétence en matière de surveillance des conditions de concurrence sur le marché des services ferroviaires et l'adoption de mesures appropriées pour corriger toute évolution indésirable sur ces marchés, sans préjudice des compétences des autorités nationales de concurrence pour assurer la concurrence.

6) Actes délégués et actes d'exécution : dans sa proposition initiale, la Commission prévoit de recourir à l'instrument de l'acte délégué pour apporter des modifications à plusieurs annexes, y compris leurs parties. Or le Conseil estime qu'il convient de limiter à l'annexe V, l'annexe VIII, point 4c, et aux annexes IX et X, les annexes et parties d'annexes pour lesquelles la Commission serait habilitée à adopter des actes délégués. Le Conseil introduit en outre des mesures d'exécution pour l'adoption de conditions d'application uniformes de certains éléments des annexes et parties d'annexes.

Il faut noter que la position en première lecture du Conseil ne reprend pas certains autres amendements du Parlement européen, qui portent sur:

  • l'introduction d'exigences supplémentaires concernant les informations et la billetterie pour les voyageurs;
  • les dispositions relatives au délai établi pour les décisions des organismes de contrôle nationaux;
  • l'extension du champ d'application de la surveillance du marché aux conditions d'emploi et de travail ainsi qu'aux investissements dans l'infrastructure ferroviaire; l'exigence selon laquelle une entreprise ferroviaire qui demande une licence doit également apporter la preuve, au moment où elle introduit sa demande, qu'elle est en possession d'un certificat de sécurité;
  • l'obligation de publier un document de référence du réseau en anglais ;
  • le délai restrictif imposé au gestionnaire de l'infrastructure pour l'information des parties intéressées des travaux d'entretien non programmés;
  • le délai de transposition de 12 mois ;
  • les dispositions renforcées concernant les services mis à la disposition des voyageurs en gare ;
  • l'inclusion d'une référence à la directive 2009/72/CE en ce qui concerne la fourniture de courant de traction ;
  • l'extension des informations destinées à la surveillance du marché ferroviaire visées à l'annexe IV, point 1, aux données concernant des incidents, accidents et accidents graves ;
  • les exigences supplémentaires en matière de couverture de la responsabilité civile.