Résolution sur les droits de l'homme et la situation sur le plan de la sécurité dans la région du Sahel  
2012/2680(RSP) - 14/06/2012  

Le Parlement européen a adopté une résolution sur les droits de l'homme et la situation sur le plan de la sécurité dans la région du Sahel.

Le texte adopté en plénière avait été déposé en tant que résolution commune par les groupes PPE, S&D, ALDE, Verts/ALE, ECR et EFD.

Le Parlement rappelle que l'arc sahélien est un espace charnière entre l'Afrique subsaharienne et l'Europe, et que, par conséquent, la situation dans la bande sahélo-saharienne constitue un enjeu de sécurité essentiel, à la fois pour l'Afrique et pour l'Europe. Il constate que les effets combinés, dans cette région, de la sécheresse, des inondations, de la dégradation du sol, du faible rendement des cultures, des prix élevés des denrées alimentaires, des déplacements, d'une crise des réfugiés, d'une pauvreté endémique, d'une gouvernance déficiente et, par suite des conflits, d'une détérioration de la situation sur le plan de la sécurité et des droits de l'homme ont affecté des millions de personnes. Il note également que la fragilité d'État, la mauvaise gouvernance et la corruption dans les pays du Sahel, associées à un sous-développement économique entraînant une pauvreté endémique, offre un terreau très favorable aux groupes terroristes, aux trafiquants de drogue et d'êtres humains. Dans cette région, en effet, 18 millions de personnes ont été affectées par la crise liée à la sécheresse, plus de 200.000 enfants sont décédés de malnutrition en 2011 et un million d'enfants sont actuellement exposés à un risque de malnutrition aiguë sévère. Qui plus est, cette région renforce actuellement ses liens avec les trafiquants de drogue d'Amérique latine et des États d'Afrique de l'Ouest et d'Afrique centrale, et apparaît désormais comme un point de transit essentiel pour l'expédition de drogue vers l'Europe – qui représente plus de 25% de la consommation mondiale de cocaïne – soulignant que ce phénomène nécessite un engagement accru de l'Union européenne.

Face à ces innombrables constats et défis, la résolution appelle l'Union européenne à collaborer étroitement avec les autorités et les parlements des pays de la région, avec la société civile et les organisations régionales et internationales, y compris l'Union africaine et la CEDEAO, afin d'apporter une réponse globale aux causes profondes, politiques, économiques, sociales et environnementales, qui sous-tendent la pauvreté, à soutenir le développement économique, la bonne gouvernance ainsi qu'un meilleur accès aux infrastructures et services de base fondamentaux pour la population locale dans la région.

Il condamne sans équivoque toutes les tentatives de prise du pouvoir par la force, tous les actes de terrorisme et de pillage des hôpitaux, des écoles, des agences d'aide et des bâtiments gouvernementaux, toutes les formes de châtiments cruels et inhumains associés à l'application de la charia, ainsi que tous les crimes de guerre, enlèvements et graves violations des droits de l'homme visant directement la population du Mali, tout particulièrement dans les régions du nord, sous contrôle des rebelles. Il invite les autorités maliennes ainsi que le MNLA (Mouvement touareg nationaliste pour la libération de l'Azawadà) de parvenir à une solution pacifique et durable au moyen d'un dialogue constructif.

Stratégie UE au Sahel : le Parlement prie, par ailleurs, la haute représentante/vice-présidente d'accélérer la mise en œuvre des diverses composantes de la stratégie de l'Union européenne pour la sécurité et le développement au Sahel (dont les destinataires sont la Mauritanie, le Mali et le Niger) et soutient l'engagement du Conseil à contribuer au développement d'une région pacifique, stable, où l'autosuffisance alimentaire est assurée. Dans le cadre de la mise en œuvre de cette stratégie (centrée sur le développement, la bonne gouvernance et la résolution des conflits internes; l’action politique et diplomatique; la sécurité et l’État de droit; les mesures de lutte contre l'extrémisme violent et la radicalisation), le Parlement invite la Commission et le SEAE à adopter, comme principe prioritaire, l'établissement d'un lien entre la sécurité et les besoins de développement, en particulier la sécurité alimentaire. La stratégie doit avant tout viser à apporter une réponse au risque de la fragmentation, et améliorer la synchronisation des actions menées par l'Union dans le cadre de différents instruments de réponse aux problèmes du Sahel.

Aide humanitaire : les députés se félicitent de l'augmentation du montant de l'aide humanitaire que l'Union européenne octroie à la région du Sahel, (de 45 millions EUR à plus de 120 millions EUR depuis le début de l'année 2012), et exhorte toutes les parties à veiller à ce que cette aide bénéficie à ceux qui en ont besoin. Il appelle, dans le même temps, la communauté internationale à consentir les efforts financiers nécessaires afin d'apporter une réponse à la crise alimentaire et à l'absence de sécurité dans la région.

Constatant par ailleurs que la région sahélienne est l'une des régions les plus touchées par le changement climatique et l'appauvrissement de la biodiversité, des phénomènes qui ont une incidence majeure sur l'agriculture et les agriculteurs, ainsi que sur les conditions de vie de la population locale, le Parlement estime qu'il est indispensable, pour la communauté internationale, d'axer les mesures d’aide sur le renforcement de la capacité des populations concernées à faire face à de futures sécheresses et d'autres chocs et, par là même, réduire leur dépendance vis-à-vis de l'aide d'urgence. Il faut notamment concentrer l’aide sur les quartiers où vivent les populations les plus vulnérables, renforcer la résilience des pasteurs, des pasteurs agriculteurs et des agriculteurs, soutenir la gestion/la préservation des ressources naturelles telles que l'eau, les arbres et le sol, apporter une aide d'urgence à intégrer en matière alimentaire aux familles les plus vulnérables, en particulier aux femmes, renforcer la réduction des risques de catastrophe ainsi que la gestion aux niveaux local, national et régional, et soutenir, en les renforçant, la coordination de la gestion des informations en matière de sécurité alimentaire et des systèmes d'alerte précoce.

Conflit libyen : les députés constatent que le conflit libyen a entraîné la prolifération, dans la zone sahélo-saharienne, d'énormes quantités d'armes, ainsi que d'un afflux soudain d'armes lourdes, qui, entre les mains des divers groupes terroristes et criminels et des trafiquants de drogue sévissant dans cette région, constitue une grave menace pour la sécurité et la stabilité de l'ensemble de la sous-région. Il appelle les nouvelles autorités libyennes et les agences multilatérales compétentes à prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher la prolifération des armes dans la région en mettant en place des mécanismes adéquats pour contrôler et sécuriser les frontières nationales dans toute la région, y compris un mécanisme destiné à mettre fin au transfert d'armes légères et de petit calibre, et à mettre en œuvre des programmes de collecte et de destruction des armes légères et de petit calibre, et à instaurer des mesures en vue d'échanger des informations et de lancer des opérations de sécurité conjointes dans la région.

CEMOC : se félicitant de la création, en 2010, du Comité d'état-major opérationnel conjoint (CEMOC) par l'Algérie, le Mali, la Mauritanie et le Niger pour coordonner la lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée et le trafic de drogues dans la zone sahélo-saharienne, le Parlement invite la communauté internationale en général, et l'Union européenne en particulier, à intensifier leur coopération avec les pays de la zone sahélo-saharienne et avec la CEDEAO dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée dans la sous-région.

Enfin, le Parlement souhaite que le Mali rétablisse rapidement l'ordre constitutionnel et mette en place des mesures concrètes en vue de protéger la souveraineté, l'unité et l'intégrité territoriale du pays.