OBJECTIF : instituer une Agence de l'Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust).
ACTE PROPOSÉ : Règlement du Parlement européen et du Conseil.
RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN : le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire sur un pied dégalité avec le Conseil.
CONTEXTE : Eurojust a été instituée par la décision 2002/187/JAI du Conseil afin de renforcer la lutte contre les formes graves de criminalité organisée dans lUnion européenne. Depuis lors, Eurojust a facilité la coordination et la coopération entre les différentes autorités nationales chargées des enquêtes et des poursuites dans le traitement daffaires concernant plusieurs États membres.
Ces dernières années, cet organe européen a connu un développement continu et est devenu un acteur central dans la coopération judiciaire en matière pénale.
Au même moment, la lutte contre la criminalité organisée et le démantèlement des organisations criminelles a également largement progressé, faisant naître la nécessité dune réponse coordonnée à léchelle européenne.
Dans cette perspective, le rôle dEurojust dans lamélioration de la coopération et de la coordination entre les autorités judiciaires compétentes des États membres et dans lassistance apportée aux enquêtes impliquant des pays tiers demeure essentiel.
Le traité de Lisbonne a introduit de nouvelles possibilités de renforcer lefficacité dEurojust. Larticle 85 du traité sur le fonctionnement de lUE (TFUE) reconnaît explicitement la mission dEurojust et prévoit que la structure, le fonctionnement, le domaine daction et les tâches dEurojust soient déterminés par voie de règlements adoptés conformément à la procédure législative ordinaire, associant notamment le Parlement européen à lévaluation des activités dEurojust.
Cest dans ce contexte quil est proposé de refondre le règlement instituant Eurojust en créant un nouveau cadre juridique visant à créer une Agence de lUE pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust), successeur légal de lunité Eurojust.
ANALYSE DIMPACT : la présente proposition na pas fait lobjet dune analyse dimpact formelle. Néanmoins, la Commission a organisé une réunion consultative avec des experts des États membres et des représentants du Secrétariat du Conseil, du Parlement européen et dEurojust, pour discuter des questions liées à une éventuelle réforme au titre de larticle 85 du TFUE, parmi lesquelles figuraient notamment :
- le renforcement de la gouvernance,
- limplication des parlements européen et nationaux,
- la possibilité doctroyer des compétences supplémentaires à Eurojust,
- les liens avec la mise en place du Parquet européen.
De manière générale, les participants à la réunion se sont prononcés en faveur dune amélioration de la structure de gouvernance et de lefficacité dEurojust.
BASE JURIDIQUE : article 85 du traité sur le fonctionnement de lUnion européenne (TFUE).
CONTENU : la présente proposition de règlement vise à instituer une lAgence de lUnion européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust) et à abroger les décisions 2002/187/JAI, 2003/659/JAI et 2009/426/JAI.
Objectifs : la proposition comporte de nombreux objectifs:
- accroître lefficacité dEurojust en la dotant dune nouvelle structure de gouvernance;
- améliorer lefficacité opérationnelle dEurojust en définissant de façon homogène le statut et les compétences des membres nationaux;
- définir le rôle du Parlement européen et des parlements nationaux dans lévaluation des activités dEurojust, dans le respect du traité de Lisbonne;
- mettre le cadre juridique dEurojust en conformité avec lapproche commune, tout en respectant pleinement son rôle spécifique en matière de coordination des enquêtes pénales en cours;
- veiller à ce quEurojust puisse coopérer étroitement avec le Parquet européen, une fois celui-ci mis en place.
Missions et compétences : la proposition définit les tâches et compétences de la future Agence européenne. Celles-ci sont détaillées dans une annexe au projet de règlement.
Á noter quEurojust possède la capacité juridique la plus large reconnue aux personnes morales par les législations nationales.
Organisation dEurojust : les principaux éléments de la réforme porte sur lorganisation de la nouvelle Agence :
- Membres nationaux dEurojust : la réforme maintient le lien des membres nationaux avec leur État membre dorigine, mais le nouveau règlement énumère explicitement leurs compétences opérationnelles communes, ce qui leur permettra de coopérer les uns avec les autres et avec les autorités nationales de manière plus efficace.
- Structure : la proposition se concentre sur la nouvelle structure dEurojust et réglemente respectivement le collège, le conseil exécutif et la fonction de directeur administratif. La gouvernance dEurojust est améliorée par une distinction claire entre deux compositions du collège, selon que ce dernier exerce des fonctions opérationnelles ou de gestion. Les premières représentent les activités essentielles dEurojust, à savoir le soutien apporté aux enquêtes nationales et leur coordination. Les secondes se rapportent, par exemple, à ladoption du programme de travail, du budget annuel ou du rapport annuel de lAgence. Un nouvel organe, le conseil exécutif, est mis en place pour préparer les décisions du collège en matière de gestion et pour assumer directement certaines tâches administratives. La Commission est représentée au sein du collège lorsque celui-ci exerce ses fonctions de gestion, ainsi quau conseil exécutif. La procédure de nomination, les responsabilités et les tâches du directeur administratif sont clairement détaillées. Cette structure introduit un double degré de gouvernance, tout en maintenant la spécificité dEurojust et en préservant son indépendance. Elle est également économe et contribue à lefficacité dEurojust, étant donné que les membres nationaux seront assistés en matière de questions budgétaires et administratives, ce qui leur permettra de se concentrer sur leurs tâches opérationnelles.
- Questions opérationnelles : les mécanismes opérationnels existants sont maintenus : i) dispositif permanent de coordination (DPC), ii) système national de coordination Eurojust (SNCE), iii) échanges dinformations, iv) suivi des demandes dEurojust. Il en va de même pour larchitecture du système de gestion des dossiers Eurojust.
Traitement des informations et protection des données à caractère personnel : la proposition complète le dispositif existant se rapportant à la protection des données par Eurojust. Elle spécifie et complète le règlement (CE) n° 45/2001 en ce qui concerne les données à caractère personnel de nature opérationnelle, en respectant la spécificité des activités de coopération judiciaire tout en tenant compte de la nécessité dassurer la cohérence et la compatibilité avec les principes de protection des données pertinents. La possibilité de définir des restrictions relatives au traitement des données à caractère personnel demeure.
Le chapitre consacré à la protection des données est également mis en conformité avec les nouvelles garanties offertes aux personnes issues des mesures réformant la protection des données, adopté par la Commission en janvier 2012. De plus, il prévoit un important changement dans le mécanisme de surveillance et définit les compétences du Contrôleur européen de la protection des données en ce qui concerne le suivi du traitement de toutes les données à caractère personnel par Eurojust. Le Contrôleur européen de la protection des données reprend les tâches de lorgane de contrôle commun établi par la décision du Conseil instituant Eurojust.
Relations avec les partenaires : la proposition souligne limportance du partenariat et de la coopération entre Eurojust et dautres institutions, organes et organismes de lUnion dans la lutte contre la criminalité.
Sont détaillées :
- les relations avec les secrétariats du Réseau judiciaire européen, du réseau dexperts des équipes communes denquête et du réseau génocide, accueillis par Eurojust ;
- les relations spécifiques avec le Parquet européen ;
- la relation privilégiée avec EUROPOL afin de renforcer lefficacité des deux organes pour la lutte contre les formes graves de criminalité internationale relevant de leur compétence et létablissement dun mécanisme de contrôle croisé de leurs systèmes respectifs dinformation ;
- les coopérations à prévoir avec les pays tiers : dans ce domaine, le traité de Lisbonne a modifié la manière dont lUE exerce ses relations extérieures dans le cadre des agences (ces dernières ne seront plus en mesure de négocier des accords internationaux elles-mêmes: ces accords devront être conclus conformément à larticle 218 du TFUE, même si Eurojust pourra conclure des arrangements pratiques pour renforcer la coopération avec les autorités compétentes des pays tiers, notamment par léchange dinformations). Á noter que le transfert de données à des organisations ou à des pays tiers est également prévu mais dans des conditions strictement réglementées.
Dispositions financières : des dispositions sont prévues pour moderniser létablissement et lexécution du budget dEurojust, la reddition des comptes et les dispositions relatives à la décharge.
Personnel : un ensemble de dispositions sont consacrées au personnel dEurojust. La nature hybride dEurojust et limportance du lien opérationnel entre les bureaux nationaux et leurs États membres dorigine expliquent que les salaires et émoluments du personnel soient à la charge des États membres.
Le directeur administratif dEurojust est toujours nommé par le collège dEurojust, toutefois sur la base dune liste de candidats dressée par la Commission à la suite dune procédure de sélection ouverte et transparente. Cette procédure respecte lautonomie de lAgence tout en garantissant une évaluation rigoureuse des candidats. Une procédure similaire est prévue pour le licenciement du directeur administratif.
Évaluation et rapports : le Parlement européen et les parlements nationaux seront associés à lévaluation des activités dEurojust. Cette évaluation doit être menée de façon économique, en se fondant sur le rapport annuel dEurojust, tout en préservant lindépendance opérationnelle de lAgence. Une évaluation globale périodique dEurojust est également prévue tous les 5 ans.
INCIDENCE BUDGÉTAIRE : la réforme de la gouvernance na pas dincidence budgétaire (collège assumant les tâches dun «conseil dadministration») et aucune nouvelle tâche nest prévue pour Eurojust dans la proposition, hormis lassistance gratuite apportée au Parquet européen.