Protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d'affaires) contre l'obtention, l'utilisation et la divulgation illicites  
2013/0402(COD) - 28/11/2013  

OBJECTIF : établir un niveau suffisant et comparable de recours dans tout le marché intérieur en cas d'obtention, d'utilisation ou de divulgation illicites des secrets d'affaires.

ACTE PROPOSÉ : Directive du Parlement européen et du Conseil.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN : le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire sur un pied d’égalité avec le Conseil.

CONTEXTE : bien qu'ils ne soient pas protégés comme des droits de propriété intellectuelle (DPI) classiques, les secrets d'affaires (à savoir les renseignements et savoir-faire de valeur confidentiels) constituent un instrument complémentaire essentiel à l’appropriation des actifs intellectuels qui constituent les moteurs de l'économie de la connaissance.

D'après les économistes, les entreprises accordent au moins autant de valeur aux secrets d'affaires qu'à n'importe quelle autre forme de PI. Ces secrets sont particulièrement importants pour les PME et les start-ups, qui n'ont souvent pas les ressources humaines spécialisées ni l'assise financière nécessaires pour faire respecter et protéger leurs DPI.

Du fait de la mondialisation, l’exposition des secrets d'affaires au vol, à l'espionnage et à d'autres techniques d'appropriation illicite ne fait qu'augmenter. Une enquête lancée en 2012 a révélé que dans l'UE, au cours des dix dernières années, environ un répondant sur cinq a subi au moins une tentative d'appropriation illicite. Il existe également un risque croissant que des secrets d'affaires volés soient utilisés dans des pays tiers pour produire des produits en infraction qui entreront ensuite en concurrence sur le territoire de l'UE avec ceux de la victime de l'appropriation illicite.

Les réglementations nationales existantes offrent un niveau inégal de protection des secrets d'affaires contre l’appropriation illicite, ce qui met en péril le bon fonctionnement du marché intérieur de l’information et du savoir-faire. La Commission estime dès lors que l'harmonisation de la législation en matière de secrets d'affaires dans l'UE améliorerait les conditions d'élaboration, d'échange et d'utilisation des connaissances innovantes par les entreprises.

Dans ce contexte, la Commission a adopté une stratégie globale pour la PI en mai 2011 et a engagé un examen de la protection des secrets d'affaires. La présente proposition est une concrétisation supplémentaire de son engagement à créer un marché unique de la propriété intellectuelle.

ANALYSE D’IMPACT : l’option privilégiée par la Commission pour renforcer l'efficacité de la protection juridique des secrets d'affaires est celle de la convergence des voies de recours en droit civil en cas d'appropriation illicite de secrets d'affaires et des règles sur la protection du caractère confidentiel des secrets d'affaires pendant et après une action en justice.

Sur le plan des incidences, la convergence des voies de recours en droit civil permettrait aux entreprises innovantes de défendre leurs secrets d'affaires légitimes de façon plus efficace dans toute l'UE.

CONTENU : la proposition de directive crée une définition commune du secret d’affaires et met en place des moyens permettant aux victimes de l'appropriation illicite d'un tel secret d'obtenir réparation.

La définition d'un «secret d'affaires», au sens de la proposition comporte trois éléments: i) les informations doivent être confidentielles; ii) elles ont une valeur commerciale en raison de ce caractère confidentiel; iii) le détenteur du secret d'affaires a pris des dispositions raisonnables pour préserver sa confidentialité. Cette définition est calquée sur celle des «renseignements non divulgués» qui figure dans l'accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC).

L'élément-clé pour que des actes tels que l'obtention, l'utilisation ou la divulgation d'un secret d'affaires soient considérés comme illicites serait l'absence de consentement du détenteur du secret d'affaires. L'utilisation ou la divulgation d'un secret d'affaires serait aussi considérée comme illicite lorsqu’au moment d'utiliser ou de divulguer le secret, une personne savait ou aurait dû savoir que ledit secret a été obtenu d'une autre personne qui l'utilisait ou le divulguait de façon illicite.

Mesures, procédures et réparations : la proposition détermine les mesures, procédures et réparations qui devraient être mises à la disposition du détenteur d'un secret d'affaires en cas d'obtention, d'utilisation ou de divulgation illicite de ce secret par un tiers. Concrètement, la proposition :

  • établit les principes généraux applicables aux instruments de droit civil visant à empêcher et à réprimer les actes d'appropriation illicite d'un secret d'affaires, ainsi que des mesures de sauvegarde pour empêcher l'usage abusif de procédures judiciaires ;
  • instaure un délai de prescription d'un an au moins et de deux ans au plus pour former des recours ayant pour objet l'application des mesures, procédures et réparations prévues par la directive;
  • oblige les États membres à prévoir des mécanismes permettant aux autorités judiciaires de protéger le caractère confidentiel des secrets d'affaires divulgués devant une juridiction aux fins de la procédure, comme par exemple la restriction de l'accès à tout ou partie des documents soumis par les parties ou par des tiers. Les mesures de confidentialité devraient s'appliquer pendant l'action en justice, mais aussi après celle-ci pour les demandes d'accès du public aux documents, aussi longtemps que les informations en question demeurent un secret d'affaires.
  • prévoit des mesures provisoires et conservatoires, sous la forme d'ordonnances de référé ou de saisies conservatoires de produits en infraction la restriction de l'accès à tout ou partie des documents soumis par les parties ou par des tiers;
  • établit des mesures de sauvegarde afin de garantir le caractère équitable et proportionné des mesures provisoires et conservatoires.

La proposition précise également les mesures qui peuvent être ordonnées par un jugement au fond :

  • interdiction de l'utilisation ou de la divulgation du secret d'affaires, interdiction de fabriquer, d'offrir, de mettre sur le marché ou d'utiliser des produits en infraction (ou d'importer ou de stocker de tels produits à ces fins), ainsi que des mesures correctives ;
  • octroi de dommages-intérêts au détenteur du secret d'affaires pour le préjudice, avec possibilité de calculer les dommages-intérêts sur la base des redevances hypothétiques ;
  • adoption, par les autorités judiciaires compétentes, à la demande du requérant, des mesures de publicité, y compris la publication de la décision au fond, à condition que le secret d'affaires ne soit pas divulgué.

Sanctions, rapports et dispositions finales : afin d'assurer l'application effective de la directive et la réalisation des objectifs poursuivis, la proposition prévoit l'application de sanctions en cas de non-respect des mesures prévues et comporte des dispositions en matière de suivi et de rapports.