Exploitation sexuelle et prostitution et conséquences sur l'égalité entre les femmes et les hommes  
2013/2103(INI) - 04/02/2014  

La commission des droits de la femme et de l'égalité des genres a adopté le rapport d’initiative de Mary HONEYBALL (S&D, UK) sur l'exploitation sexuelle et la prostitution et leurs conséquences sur l'égalité entre les hommes et les femmes.

La prostitution et la prostitution forcée sont intrinsèquement liées à l'inégalité des genres dans la société ; elles ont une incidence sur le statut des femmes et des hommes dans la société et la perception de leur rapport et de la sexualité.

Les données de l'Union européenne montrent que la politique actuelle de lutte contre la traite des êtres humains n'est pas efficace et qu'il existe actuellement un problème en ce qui concerne l'identification et la poursuite des trafiquants, raison pour laquelle il est nécessaire de renforcer les enquêtes et les condamnations à l'encontre des trafiquants d'êtres humains.

Le rapport reconnaît que la prostitution et l'exploitation sexuelle sont des questions étroitement liées au genre et aux violations de la dignité humaine. Il souligne que la prostitution et la traite des êtres humains sont liées à plusieurs égards et reconnaît que la prostitution, tant à l'échelle mondiale qu'en Europe, alimente la traite des femmes et des filles vulnérables, dont une grande majorité ont entre 13 et 25 ans.

Comme le montrent les données de la Commission, la majorité (62%) des victimes de la traite le sont aux fins d'exploitation sexuelle. Les femmes et les filles représentent 96% des victimes recensées et présumées et la part des victimes originaires de pays extraeuropéens est en hausse depuis quelques années.

L'absence de données fiables, précises et comparables entre pays, due en majorité au caractère illégal et souvent invisible de la prostitution et de la traite des êtres humains, maintient l'opacité du marché de la prostitution et entrave la prise de décisions politiques.

Dans ce contexte, les États membres sont invités à :

  • instaurer, conformément au droit interne, des consultations de conseil et de santé régulières et confidentielles pour les personnes prostituées en dehors des lieux de prostitution ;
  • échanger les bonnes pratiques sur les manières de réduire les dangers associés à la prostitution de rue ;
  • combattre la prostitution infantile (impliquant des personnes de moins de 18 ans) le plus énergiquement possible car il s'agit de la forme la plus grave de prostitution forcée;
  • réaliser, dans les établissements scolaires, des campagnes d'information et de prévention spécifiques adaptées en fonction de l'âge des participants ;
  • abroger la législation répressive contre les personnes prostituées ;
  • donner à la police et aux autorités compétentes, conformément au droit interne, le droit d'entrer dans les endroits où la prostitution est pratiquée et d'y pratiquer des contrôles indépendamment de tout motif ;
  • transposer rapidement dans leur législation nationale la directive 2011/36/UE du Parlement européen et du Conseil concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes, surtout en ce qui concerne la protection des victimes ;
  • encourager les autorités policières à coopérer avec les victimes et à les inciter à témoigner ;
  • encourager l'existence de services spécialisés au sein de la police et employer des femmes policières, insistant sur l’amélioration de la coopération judiciaire entre les États membres dans ce domaine ;
  • résoudre les problèmes sociaux fondamentaux contraignant les hommes, les femmes et les enfants à se prostituer (tels que la pauvreté, l’exclusion sociale) ;
  • évaluer tant les effets positifs que les effets négatifs de la criminalisation de l'achat de services sexuels sur la réduction de la prostitution et de la traite des êtres humains ;
  • prendre des mesures décourageant la pratique du tourisme sexuel à l'intérieur ou à l'extérieur de l'Union.

Le modèle nordique : le rapport considère que la manière la plus efficace de lutter contre la traite des femmes et des filles à des fins d'exploitation sexuelle et d'améliorer l'égalité entre les hommes et les femmes est le modèle mis en œuvre en Suède, en Islande et en Norvège (que l'on appelle le modèle nordique). Ce modèle est actuellement examiné par plusieurs pays européens, où l'achat de services sexuels constitue un acte criminel, mais pas les services des personnes prostituées.

Puisque la prostitution constitue un problème transfrontalier, il incombe aux États membres de veiller à lutter contre l'achat de services sexuels en dehors de leur territoire en introduisant des mesures comparables à celles qui ont été prises en Norvège, où un citoyen est passible de sanctions pour des services sexuels achetés à l'étranger.

Les députés estiment que considérer la prostitution comme un "travail sexuel" légal, dépénaliser l'industrie du sexe en général et légaliser le proxénétisme n'est pas une solution qui permet de mettre les femmes et les filles vulnérables à l'abri de la violence et de l'exploitation, et produit l'effet inverse en leur faisant courir le risque de subir un niveau de violence plus élevé.

Enfin, le rapport prie la Commission : i) d'évaluer les conséquences qu'a entraînées à ce jour le cadre juridique européen destiné à éliminer la traite à des fins d'exploitation sexuelle, ii) d'entreprendre des recherches supplémentaires sur les formes que prennent la prostitution, la traite des êtres humains aux fins d'exploitation sexuelle ainsi que la progression du tourisme sexuel dans l'Union européenne, ainsi que iii) de favoriser l'échange de bonnes pratiques entre États membres.

La Commission devrait continuer à financer des projets et des programmes de lutte contre la traite des êtres humains et l'exploitation sexuelle. Le Service européen pour l'action extérieure devrait également prendre des mesures pour mettre fin à la pratique de la prostitution dans les zones de conflit où des forces militaires de l'Union sont présentes.