Ordonnance européenne de saisie conservatoire des comptes bancaires  
2011/0204(COD) - 15/04/2014  

Le Parlement européen a adopté par 597 voix pour, 33 contre et 37 abstentions, une résolution législative sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'une ordonnance européenne de saisie conservatoire des comptes bancaires, destinée à faciliter le recouvrement transfrontière de créances en matière civile et commerciale.

Le Parlement a arrêté sa position en première lecture suivant la procédure législative ordinaire. Les amendements adoptés en plénière sont le résultat d’un accord négocié entre le Parlement européen et le Conseil. Ils modifient la proposition comme suit :

Objet et champ d'application : le Parlement et le Conseil sont convenus d’instaurer une procédure au niveau de l'Union permettant à un créancier d'obtenir une ordonnance européenne de saisie conservatoire des comptes bancaires. Cette procédure empêcherait que le recouvrement ultérieur de sa créance ne soit mis en péril par le transfert ou le retrait de fonds, à concurrence du montant précisé dans l'ordonnance, détenus par le débiteur sur un compte bancaire tenu dans un État membre.

L'ordonnance de saisie conservatoire serait à la disposition du créancier comme alternative aux mesures conservatoires prévues par le droit national.

Le règlement s'appliquerait aux créances pécuniaires en matière civile et commerciale dans les litiges transfrontières et ne s'appliquerait pas aux comptes bancaires détenus par ou auprès des banques centrales agissant en leur qualité d'autorités monétaires.

Seraient exclus de l’application du règlement : i) les testaments et successions; ii) les créances patrimoniales découlant d'un régime matrimonial ou d'un régime qui, selon la loi qui lui est applicable, a des effets comparables au mariage ; iii) les créances sur un débiteur à l'encontre duquel des procédures de faillite ont été engagées.

Cas d’ouverture : le créancier pourrait recourir à l'ordonnance de saisie conservatoire dans les situations suivantes: a) avant que le créancier n'engage une procédure au fond dans un État membre à l'encontre du débiteur, ou à tout moment au cours de cette procédure jusqu'au moment où la décision est rendue ; b) après que le créancier a obtenu, dans un État membre, une décision exigeant du débiteur le paiement de sa créance.

Lorsque le créancier a déjà obtenu une décision, les juridictions de l'État membre dans lequel la décision a été rendue seraient compétentes pour délivrer l'ordonnance pour la créance.

Conditions de délivrance d'une ordonnance : lorsque le créancier demande une ordonnance avant d'avoir obtenu une décision judiciaire, la juridiction auprès de laquelle la demande est introduite devrait être convaincue, sur la base des éléments de preuve fournis par le créancier, qu'il sera probablement fait droit à la demande au fond du créancier contre le débiteur

Dans tous les cas, la juridiction devrait délivrer l'ordonnance lorsque le créancier a fourni suffisamment d'éléments de preuve pour la convaincre qu'il est urgent de prendre une mesure conservatoire parce qu'il existe un risque réel qu'à défaut d'une telle mesure, le recouvrement ultérieur de sa créance soit empêché ou rendu sensiblement plus difficile.

Les demandes d'ordonnance seraient introduites au moyen du formulaire dont le modèle serait établi conformément à la procédure consultative visée au règlement.

Le formulaire de demande devrait comprendre une série d’informations comme par exemple : le nom et l'adresse de la juridiction auprès de laquelle la demande est introduite ; des renseignements concernant le créancier et le débiteur (noms, coordonnées, éventuellement date de naissance et  numéro de passeport) ; un numéro permettant l'identification de la banque ; le montant pour lequel l'ordonnance est demandée ; une déclaration indiquant si le créancier a introduit auprès d'autres juridictions ou autorités une demande d'ordonnance équivalente sur le plan national. La demande serait accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles.

Procédure non contradictoire : afin de garantir l'effet de surprise de l'ordonnance de saisie conservatoire, le débiteur ne devrait pas être informé de la demande du créancier, ni être entendu avant la délivrance de l'ordonnance. Si la juridiction n'est pas convaincue que la saisie conservatoire du compte se justifie, elle devrait s'abstenir de délivrer l'ordonnance.

Garantie constituée par le créancier : les co-législateurs ont prévu des garanties spécifiques afin de prévenir tout recours abusif à l'ordonnance et de protéger les droits du débiteur. Une de ces garanties consisterait exiger du créancier qu'il constitue une garantie pour veiller à ce que le débiteur puisse obtenir à un stade ultérieur la réparation de tout préjudice qui lui aurait été causé par l'ordonnance.

Dans le cas où le créancier n'a pas encore obtenu une décision judiciaire exigeant du débiteur le paiement de la créance, la constitution d'une garantie devrait être la règle. Dans le cas où le créancier a déjà obtenu une décision judiciaire, l'opportunité de constituer une garantie devrait être laissée à la discrétion de la juridiction.

Responsabilité du créancier : il est prévu que le créancier serait responsable lorsque le préjudice causé au débiteur par l'ordonnance de saisie conservatoire est dû à une faute du créancier. Dans ce contexte, la charge de la preuve incomberait au débiteur. La loi applicable à la responsabilité du créancier serait celle de l'État membre d'exécution.

Demandes d’informations : afin de surmonter les difficultés pratiques existantes pour l'obtention des informations sur la localisation du compte bancaire du débiteur dans un contexte transfrontière, le  règlement amendé établit un mécanisme permettant au créancier de demander que les informations nécessaires pour identifier le compte du débiteur soient obtenues par la juridiction, avant la délivrance de l'ordonnance, auprès de l'autorité chargée de l'obtention d'informations désignée de l'État membre dans lequel le créancier croit que le débiteur détient un compte.

L'accès aux informations relatives aux comptes ne devrait être accordé, en règle générale, que lorsque le créancier a déjà obtenu une décision judiciaire.

Afin d'assurer la protection des données à caractère personnel concernant le débiteur, les informations obtenues concernant l'identification du ou des comptes bancaires du débiteur ne devraient pas être transmises au créancier, mais seulement à la juridiction qui les a demandées.

Reconnaissance et force exécutoire : une ordonnance de saisie conservatoire délivrée dans un État membre conformément au règlement devrait être reconnue dans les autres États membres sans qu'une procédure spéciale soit requise et être exécutoire dans les autres États membres sans qu'une déclaration constatant sa force exécutoire soit nécessaire.

Mise en œuvre de l'ordonnance par la banque : le règlement devrait obliger cette dernière à déclarer si l'ordonnance a permis la saisie de fonds du débiteur. Pour sa part, le créancier devrait être tenu d'assurer la libération des fonds faisant l'objet de la saisie conservatoire qui excèdent le montant précisé dans l'ordonnance.

Voies de recours : le créancier aurait le droit d'interjeter appel contre la décision de refuser la délivrance de l'ordonnance de saisie conservatoire.

Des mesures ont été également prévues protéger le droit du débiteur à accéder à un tribunal impartial et son droit à un recours effectif. Dans ce contexte, l'ordonnance, tous les documents soumis par le créancier à la juridiction dans l'État membre d'origine et les traductions nécessaires devraient être signifiés ou notifiés au débiteur rapidement après la mise en œuvre de l'ordonnance.

Le débiteur devrait être en mesure de demander un réexamen de l'ordonnance, en particulier si les conditions ou exigences énoncées dans le règlement n'étaient pas remplies.

Enfin, la saisie conservatoire du compte du débiteur ne devrait pas affecter les montants qui sont exemptés de saisie au titre du droit de l'État membre d'exécution, par exemple les montants nécessaires pour assurer la subsistance du débiteur et de sa famille.