Etablissements de crédit et entreprises d'investissement: cadre pour redressement et résolution des défaillances  
2012/0150(COD) - 15/05/2014  

OBJECTIF : harmoniser les règles nationales relatives au redressement et à la résolution des banques.

ACTE LÉGISLATIF : Directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) n° 1093/2010 et (UE) n° 648/2012.

CONTENU : depuis le début de la crise financière en 2007-2008, l'absence d'instruments effectifs de résolution des banques a souvent conduit à l'utilisation de fonds publics pour rétablir la confiance dans des établissements bancaire afin d'empêcher que les défaillances en cascade d'établissements ne portent atteinte à l'économie réelle.

La directive établit par conséquent un cadre stratégique visant à gérer de manière ordonnée les défaillances de banques sans recourir à l'argent des contribuables. Elle prévoit une gamme d'instruments permettant de s'attaquer aux éventuelles crises bancaires aux trois stades suivants: préparation et prévention, intervention précoce et résolution.

Les principaux éléments de la directive sont les suivants :

Plans de redressement : les établissements devraient préparer et tenir régulièrement à jour (au moins une fois par an) des plans de redressement indiquant les mesures qu’ils prévoient pour rétablir leur position financière après une détérioration significative. Ces plans devraient être détaillés et fondés sur des hypothèses réalistes applicables dans toute une série de scénarios cohérents, correspondant à des situations graves. Ils ne devraient tabler sur aucune possibilité de soutien financier public exceptionnel.

Les établissements seraient tenus de soumettre leur plan aux autorités compétentes, afin qu’elles procèdent à son évaluation exhaustive. Lors de l’évaluation de ces plans, l’autorité compétente devrait tenir compte de l’adéquation des fonds propres et de la structure de financement de l’établissement par rapport à la complexité de la structure organisationnelle et au profil de risque de l’établissement.

Les autorités compétentes devraient évaluer chaque plan de redressement dans les six mois suivant leur présentation. Si l'autorité compétente estime que le plan présente des lacunes importantes, elle devrait notifier à l'établissement ou à l'entreprise mère du groupe son évaluation et l'inviter à soumettre, dans les deux mois, un plan révisé.

Au cas où l’autorité compétente ne considèrerait pas que le plan révisé permet de remédier efficacement aux lacunes, elle pourrait demander à l’établissement de modifier le plan. Elle pourrait, entre autres, enjoindre à l'établissement de réduire son profil de risque, y compris le risque de liquidité ou de revoir sa stratégie et sa structure. La décision serait notifiée par écrit à l'établissement et pourrait faire l'objet d'un recours.

Plans de résolution : les autorités de résolution seraient tenues d’élaborer des plans de résolution pour chaque banque, en exposant les mesures qu'elles pourraient prendre si la banque devait remplir les conditions de déclenchement d'une procédure de résolution. Les plans de résolution de groupe préciseraient les mesures concernant l'entreprise mère et chacune des filiales faisant partie du groupe. Ils ne devraient pas avoir d'effets disproportionnés sur un État membre et devraient comporter des procédures visant à informer et à consulter, le cas échéant, les représentants des travailleurs à toutes les étapes des processus de résolution.

Parmi les principales mesures de résolution que les autorités de résolution ont le pouvoir de prendre, figurent notamment les mesures suivantes:

  • exiger de l'établissement : i) qu'il revoie les dispositifs de financement à l'intérieur du groupe ou réexamine l’absence de tels dispositifs; ii) qu'il revoie le montant maximum de ses expositions individuelles et agrégées; iii) qu’il se sépare de certains actifs et qu’il limite ou interrompe certaines activités ;
  • restreindre ou empêcher le développement d’activités nouvelles ou existantes ou la vente de produits nouveaux ;
  • exiger de l'établissement ou d'une entité du groupe, qu'elle soit directement ou indirectement sous son contrôle ou qu'il ou elle modifie ses structures juridiques ou opérationnelles.

Les autorités seraient également habilitées à nommer un administrateur spécial pour remplacer la direction de l’établissement soumis à une procédure de résolution.

Intervention précoce : pour préserver la stabilité financière, les autorités compétentes devraient pouvoir remédier à la détérioration de la situation économique et financière d'un établissement avant qu'elle n'atteigne un point où elles n'auront d'autre choix que d'entamer une procédure de résolution.

À cette fin, elles seraient dotées de pouvoirs d'intervention précoce, y compris celui de demander la destitution, en bloc ou à titre individuel, de la direction générale ou de l'organe de direction de l'établissement. Un ou plusieurs administrateurs temporaires pourraient également être nommés, dont la tâche serait de promouvoir des solutions pour redresser la situation financière de l’établissement.

Renflouement interne : ce dispositif, qui devrait entrer en vigueur en janvier 2016, a pour but de réduire à un minimum les coûts de la procédure de résolution d'une banque défaillante supportés par les contribuables. Il permettrait aux autorités de résolution de déprécier ou de convertir en fonds propres les créances des actionnaires et des créanciers des banques qui font ou sont susceptibles de faire faillite.

Les mesures de résolution seraient prises conformément aux principes suivants:

  • les actionnaires de l'établissement soumis à la procédure de résolution seraient les premiers à supporter les pertes;
  • les créanciers de l'établissement soumis à une procédure de résolution supporteraient les pertes après les actionnaires, conformément à l'ordre de priorité de leurs créances dans le cadre d'une procédure normale d'insolvabilité ;
  • l'organe de direction et la direction générale de l'établissement soumis à une procédure de résolution seraient remplacés ;
  • les personnes physiques et morales seraient considérées comme civilement ou pénalement responsables ;
  • les dépôts couverts seraient pleinement protégés.

Fonds de résolution : la directive exige que les États membres, en règle générale, créent des fonds de résolution ex ante afin que les instruments de résolution puissent être appliqués efficacement. Ces fonds nationaux devraient atteindre, d'ici 2025, un niveau cible d'au moins 1% des dépôts couverts de tous les établissements de crédit agréés dans leur pays.

Les autorités de résolution nationales pourraient dans des cas exceptionnels, exclure certains passifs et utiliser le fonds de résolution pour absorber des pertes ou recapitaliser une banque. Cette faculté ne serait toutefois octroyée que lorsque les actionnaires et les créanciers d'un établissement auront contribué à l'absorption des pertes, à hauteur d'au moins 8% du total des passifs, fonds propres inclus, ou, dans des conditions particulières, lorsque leur contribution à l'absorption des pertes correspondra à 20% des actifs pondérés en fonction du risque de l'établissement concerné, dans le cas où le dispositif de financement pour la résolution dispose de contributions ex ante d'un montant au moins égal à 3% des dépôts couverts.

La contribution du fonds de résolution ne pourrait pas dépasser 5% du total des passifs d'une banque. Dans des circonstances exceptionnelles, lorsque cette limite a été atteinte, l'autorité de résolution pourrait mobiliser des moyens de financement alternatifs.

Instruments de stabilisation financière gouvernementaux : les États membres auraient la possibilité de fournir un soutien financier public exceptionnel au moyen d'instruments de stabilisation financière supplémentaires afin de participer à la résolution de la défaillance d'un établissement, y compris en intervenant directement afin d'éviter sa liquidation. Cette action devrait être menée sous la direction du ministère compétent ou du gouvernement en étroite collaboration avec l'autorité de résolution.

Les instruments de stabilisation financière se composent des éléments suivants : a) un instrument de soutien public en fonds propres visant à recapitaliser un établissement; b) un instrument de placement temporaire en propriété publique.

Toutefois, la possibilité faire appel à des sources de financement alternatives par le biais du recours aux instruments de stabilisation de l'État serait subordonnée à l'exigence de renflouement interne de 8% et à l'approbation de la Commission dans le cadre des règles en matière d'aides d'État.

Capacité d’absorption des pertes : pour veiller à ce que les banques aient toujours une capacité d'absorption des pertes suffisante, la directive prévoit que les autorités de résolution nationales fixent des exigences minimales de fonds propres et d'engagements éligibles pour chaque établissement, en fonction de sa taille, de son profil de risque et de son modèle d'entreprise.

Sur la base des résultats d’un rapport présenté par l’Autorité bancaire européenne (ABE), la Commission soumettra, le cas échéant, au Parlement européen et au Conseil, d’ici le 31 décembre 2016, une proposition législative concernant l’application harmonisée de l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles.

Réexamen : au plus tard le 1er juin 2018, la Commission réexaminera la mise en œuvre de la directive et soumettra un rapport au Parlement européen et au Conseil.

ENTRÉE EN VIGUEUR : 02.07.2014.

TRANSPOSITION : au plus tard le 31.12.2014. Les mesures sont applicables à partir du 01.01.2015 (au plus tard le 01.01.2016 en ce qui concerne les dispositions relatives à l’instrument de renflouement interne).

ACTES DÉLÉGUÉS : la Commission peut adopter des actes délégués, entre autres, afin de préciser les critères définissant des «fonctions critiques» et des «activités fondamentales» aux fins de la directive. Le pouvoir d’adopter de tels actes est conféré à la Commission pour une durée indéterminée à compter du 2 juillet 2014. Le Parlement européen ou le Conseil peuvent formuler des objections à l'égard d'un acte délégué dans un délai de trois mois à compter de la date de notification (ce délai pouvant être prolongé de trois mois). Si le Parlement européen ou le Conseil formulent des objections, l'acte délégué n'entre pas en vigueur.