Vers une approche intégrée du patrimoine culturel européen  
2014/2149(INI) - 22/07/2014  

OBJECTIF : présentation d’une communication proposant une approche intégrée du patrimoine culturel européen.

CONTEXTE : le patrimoine culturel constitue une ressource partagée et un bien commun. Il peut être menacé par la surexploitation et le sous-financement et se voir négligé, subir des dégradations voire tomber dans l'oubli.

Il est, par conséquent, nécessaire de veiller sur ce patrimoine commun, qui relève avant tout des compétences nationales, régionales ou locales. L'Union européenne (UE) n'en a pas moins un rôle à jouer dans le respect des traités UE et du principe de subsidiarité. C’est pourquoi, la Commission propose la présente communication, fruit d'un dialogue de plusieurs années avec les présidences de l’UE et les parties prenantes afin de répondre à l'appel lancé par le Conseil de «poursuivre l'analyse de l'impact économique et social du patrimoine culturel dans l'UE et contribuer à définir une approche stratégique».

L’objectif global est d’examiner les informations disponibles sur les incidences économiques et sociales du patrimoine culturel, ainsi que les projets destinés à améliorer le corpus de données disponibles et d’étudier les défis qui se posent et les possibilités qui s'ouvrent au secteur du patrimoine.

La communication recense également les instruments disponibles au niveau de l'UE, en complément des programmes nationaux et régionaux, pour aider à protéger et à accroître la valeur intrinsèque et sociale du patrimoine, renforcer sa contribution à la croissance économique et à la création d'emplois et valoriser son potentiel au service de la diplomatie publique de l'UE.

CONTENU : l'expérience européenne montre qu'une prise de conscience du caractère unique du patrimoine permet de s'intéresser aux autres patrimoines et de les respecter.

Dans ce contexte, la présente communication décrit les mesures qui peuvent être prises pour renforcer la coopération axée sur les politiques à différents niveaux, ainsi que les projets entrepris pour soutenir de nouveaux modèles de gouvernance du patrimoine.

L’objectif général est d’aider les États membres et les parties prenantes à tirer le meilleur parti des instruments de l'UE et de l'aide importante qu'ils proposent en faveur du patrimoine, à évoluer vers une approche plus intégrée au niveau national et européen et, enfin, à faire de l'Europe un laboratoire d'innovation axée sur le patrimoine.

Poids économique du patrimoine culturel : selon les données les plus récentes (France, 2011), le patrimoine génère quelque 8,1 milliards EUR et des études britanniques ont montré que l'environnement historique pouvait offrir un retour élevé sur investissement, chaque livre sterling investie générant 1,60 livre sterling d'activité économique supplémentaire sur 10 ans. En matière de tourisme notamment, le patrimoine contribue à hauteur de 415 milliards EUR au PIB de l'Union et les 3,4 millions d'entreprises que compte ce secteur offrent 15,2 millions d'emplois dont beaucoup sont directement ou indirectement liés au patrimoine.

En 2013, 52% des citoyens de l’UE ont visité au moins un monument ou site historique et 37% se sont rendus dans un musée ou une galerie dans leurs pays d'origine, tandis que 19% ont visité un monument ou un site historique dans un autre pays de l'UE. Le patrimoine porte donc en lui une grande capacité de cohésion et d'intégration sociale de par la reconversion de zones négligées, la création d'emplois à ancrage local et la promotion d'une compréhension commune et d'un sentiment d'appartenance à une même communauté.

Toutefois, de nouvelles mesures s’imposent pour renforcer encore les effets bénéfiques du patrimoine sur l’économie et la cohésion sociale.

Vers une approche intégrée du patrimoine culturel : pour renforcer la position de l'Europe dans le domaine de la préservation, de la restauration et de la valorisation du patrimoine culturel, la Commission propose:

  • d'encourager la modernisation du secteur du patrimoine par des actions visant à sensibiliser la population et à éveiller l'intérêt de nouveaux publics;
  • d'adopter une approche stratégique à l'égard de la recherche et de l'innovation, du partage des connaissances et de la spécialisation intelligente;
  • de saisir les possibilités offertes par la numérisation, d'atteindre de nouveaux publics et d'éveiller plus particulièrement l'intérêt des jeunes;
  • de recenser les besoins en compétences et d'améliorer la formation des professionnels du patrimoine; et
  • de continuer à concevoir des modèles d'interprétation et de gouvernance plus participatifs, mieux adaptés à l'Europe d'aujourd'hui, en associant davantage le secteur privé et la société civile.

Pour atteindre ces objectifs, de multiples actions sont envisagées dont des actions portant sur:

- la recherche et l’innovation : la mise en commun de ressources en vue d'appliquer les dernières technologies et encourager de nouvelles approches scientifiques peut considérablement améliorer la compréhension, la préservation et la diffusion du patrimoine culturel. Á cet effet, le programme Horizon 2020 pour la recherche et l’innovation (doté de 80 milliards EUR pour la période 2014-2020) devrait contribuer à renforcer davantage la position de l'UE dans le domaine de la préservation, de la restauration et de la valorisation du patrimoine culturel;

- la numérisation : la numérisation du patrimoine contribue à l'agenda européen de la culture en permettant au public d'accéder plus aisément à différentes formes d'expression culturelles et linguistiques. La plateforme culturelle Europeana (www.europeana.eu) permet actuellement d'accéder à quelque 30 millions de biens culturels appartenant aux collections de plus de 2.500 organisations. Toutefois il reste beaucoup à faire pour le matériel rare et ancien notamment en matière cinématographique. Des initiatives sont proposées notamment dans le cadre d’une communication parallèle sur la numérisation des œuvres cinématographiques;

- la sensibilisation de l'opinion publique : le nouveau programme «Europe créative» devrait soutenir la coopération transfrontière en vue de promouvoir la modernisation du secteur du patrimoine. Il devrait renforcer aussi la capacité de la société civile à opérer au niveau transnational en soutenant les réseaux et les plateformes. D’autres initiatives contribuent à la sensibilisation du patrimoine commun européen comme les «Capitales européennes de la culture» (CEC), le Label du patrimoine européen ou encore le programme «L'Europe pour les citoyens» qui vise à encourager la réflexion sur les causes des régimes totalitaires de l'histoire moderne de l'Europe;

- le développement local et régional dans le contexte du patrimoine culturel : les politiques de cohésion et de développement rural de l'UE peuvent contribuer à promouvoir la restauration du patrimoine culturel, à soutenir les industries culturelles et créatives et à financer la formation et la mise à niveau des compétences des professionnels de la culture. La conservation, la promotion et la gestion du patrimoine culturel bénéficient actuellement d'un soutien important au titre des Fonds structurels et d’investissement de l'UE. Au cours de la période 2007-2013, le Fonds européen de développement régional a alloué 3,2 milliards EUR à la protection et à la préservation du patrimoine culturel, 2,2 milliards EUR au développement des infrastructures culturelles et 553 millions EUR aux services culturels, ce qui a également eu des effets bénéfiques sur le patrimoine culturel. Le patrimoine culturel devrait continuer à bénéficier d'investissements au titre des Fonds structurels et d'investissement au cours de la  période 2014-2020.

- la promotion du tourisme et le renforcement de la formation : l’UE accorde des subventions pour la création ou l'amélioration d'itinéraires culturels européens traversant plusieurs pays et réunissant ces derniers autour d'un thème commun. La Commission entend également redonner vie aux savoir-faire traditionnels et en développer de nouveaux. Pour ce faire, elle entend rendre plus attrayantes les professions liées au patrimoine et proposer davantage de formations continues en tirant parti, par exemple, des possibilités offertes par le Fonds social européen.

En outre, dans le prolongement des résultats du programme pour l'éducation et la formation tout au long de la vie, le programme Erasmus+ devrait offrir des possibilités accrues de mobilité à des fins d’éducation et de formation et remédier aux déficits de compétences en soutenant des partenariats transnationaux entre entreprises.

- le renforcement de la coopération sur le plan extérieur : l'UE et ses États membres sont actifs dans les enceintes et les organisations multilatérales qui se penchent sur les politiques en matière de patrimoine culturel, telles que le Conseil de l'Europe et l'UNESCO. Des initiatives sont également prévues pour lutter contre les différents trafics (notamment, en Afrique) ainsi que pour renforcer le dialogue sur les questions de patrimoine avec l’ASEM, la Chine, l'Inde, le Brésil et les pays couverts par la politique européenne de voisinage.

Renforcer la gouvernance culturelle : la coopération au niveau de l'UE doit contribuer de manière décisive à la gouvernance du patrimoine et aux politiques dans ce domaine au niveau national et local. Des mesures législatives ont déjà été prises dans des domaines relevant des compétences de l'UE. Ainsi, la récente révision de la directive concernant l’évaluation des incidences sur l’environnement (directive 2014/52/UE) renforce l'obligation faite aux États membres d'évaluer les effets de certains projets publics et privés sur les biens matériels et le patrimoine culturel.

Le prochain plan de travail du Conseil en faveur de la culture qui devrait débuter en 2015 devrait offrir la possibilité de renforcer la coopération entre les États membres dans le cadre de la méthode ouverte de coordination (MOC).

Le patrimoine devrait également être abordé dans le cadre du dialogue structuré que la Commission entretient avec la société civile (ex. : dans le cadre du Forum européen de la culture).

Prochaine étape: la Commission invite maintenant toutes les parties prenantes à réfléchir ensemble à la façon de mieux organiser les politiques publiques, à tous les niveaux, y compris au niveau de l'UE, pour exploiter sur le long terme et de manière durable la valeur du patrimoine culturel de l'Europe et pour concevoir une approche plus intégrée à l'égard de la préservation et de la valorisation de celui-ci.