Détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services  
2016/0070(COD) - 08/03/2016  

OBJECTIF : réviser la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services pour lutter contre les pratiques déloyales.

ACTE PROPOSÉ : Directive du Parlement et du Conseil.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN : le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire sur un pied d’égalité avec le Conseil.

CONTEXTE : le détachement de travailleurs favorise la prestation transfrontière de services au sein du marché intérieur, en particulier dans le secteur de la construction et dans certains secteurs de services à la personne et aux entreprises. Globalement, en 2014, on comptait plus de 1,9 million de travailleurs détachés dans l’UE (représentant 0,7% de la main d’œuvre totale de l’UE), soit une hausse de 10,3% par rapport à 2013 et de 44,4% par rapport à 2010.

La directive 96/71/CE instaure un cadre réglementaire à l’échelle de l’UE afin d’assurer un équilibre entre la nécessité de promouvoir la libre prestation de services et la nécessité de protéger les droits des travailleurs détachés. Elle établit un «noyau dur» de conditions de travail et d’emploi dans l’État membre d’accueil qui doivent obligatoirement être appliquées par les prestataires de services étrangers, dont :

  • les périodes maximales de travail et les périodes minimales de repos,
  • les taux de salaire minimal, y compris ceux majorés pour les heures supplémentaires,
  • la durée minimale des congés annuels payés,
  • les conditions de mise à disposition des travailleurs,
  • la sécurité, la santé et l’hygiène au travail,
  • les mesures protectrices en faveur des femmes enceintes et des femmes venant d’accoucher, des enfants et des jeunes et
  • l’égalité de traitement entre hommes et femmes.

La directive d’exécution de 2014 a prévu des instruments nouveaux et renforcés pour combattre et sanctionner les contournements, les fraudes et les abus. Elle aborde les problèmes causés par les sociétés dites «boîtes aux lettres» et accroît la capacité des États membres à surveiller les conditions de travail et à faire respecter les règles applicables. Elle contient également des dispositions visant à améliorer la coopération administrative entre les autorités nationales responsables du détachement de travailleurs. Cette directive doit être transposée en droit national d’ici le 18 juin 2016.

L’initiative proposée traduit l’engagement pris par la Commission, dans ses orientations politiques, de promouvoir le principe d’une rémunération identique pour un même travail effectué au même endroit. Elle ne porte sur aucune des questions abordées par la directive d’exécution. Au contraire, elle est axée sur les questions qui n’ont pas été prises en considération dans ladite directive et se rapportent au cadre réglementaire de l’UE fixé par la directive initiale de 1996.

ANALYSE D’IMPACT : la proposition est accompagnée d’une analyse d’impact, qui analyse le phénomène du détachement, décrit le problème que pose le cadre juridique actuel, envisage les différentes options stratégiques pour y faire face et, enfin, évalue les incidences sociales et économiques de ces options.

CONTENU : la proposition de modifications ciblées de la directive concernant le détachement de travailleurs intègre et complète les dispositions fixées dans la directive d’exécution, qui doit être transposée au plus tard le 18 juin 2016. Elle a pour but de garantir des conditions salariales équitables aux travailleurs détachés et une concurrence loyale entre les entreprises détachant des travailleurs et les entreprises locales dans le pays d’accueil.

La révision ciblée introduirait des changements dans trois grands domaines :

Détachement dépassant 24 mois : la proposition prévoit ce qui suit :

  • lorsque la durée prévue ou effective du détachement dépasse 24 mois, l’État membre sur le territoire duquel le travailleur est détaché serait réputé être le pays dans lequel celui-ci accomplit habituellement son travail ;
  • en application des dispositions du règlement Rome I, le droit du travail de l’État membre d’accueil s’appliquerait au contrat de travail de ces travailleurs détachés si aucun autre choix n’a été fait par les parties à cet égard. Si un choix différent a été opéré, il ne devrait pas avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi de l’État membre d’accueil ;
  • en cas de remplacement de travailleurs détachés effectuant la même tâche au même endroit, la durée cumulée des périodes de détachement des travailleurs concernés serait prise en considération, en ce qui concerne les travailleurs détachés pour une durée effective d’au moins six mois.

Conditions de travail et d'emploi, y compris dans les situations de sous-traitance : la révision proposée :

  • rend les conventions collectives applicables aux travailleurs détachés dans tous les secteurs de l’économie, que les activités soient visées ou non à l’annexe de la directive 96/71/CE (ce qui est actuellement le cas uniquement pour le secteur de la construction) ;
  • implique que les règles relatives à la rémunération applicables aux travailleurs locaux, découlant de la législation ou de conventions collectives d’application générale, s’appliqueraient également aux travailleurs détachés ;
  • oblige les États membres à publier sur un site internet les éléments constitutifs de la rémunération des travailleurs détachés ;
  • permet aux États membres d’obliger les entreprises à ne sous-traiter qu’à des entreprises qui accordent aux travailleurs certaines conditions de rémunération applicables au contractant, y compris celles résultant de conventions collectives d’application non générale. Néanmoins, cela ne pourrait être fait que de manière non discriminatoire: les mêmes obligations devraient être imposées à tous les sous-traitants nationaux.

Règles sur les travailleurs intérimaires : une nouvelle disposition établit les conditions applicables aux travailleurs mis à disposition par une entreprise de travail intérimaire établie dans un État membre autre que l’État membre d’établissement de l’entreprise utilisatrice.

Cette disposition précise que les conditions qui s’appliquent aux entreprises transfrontières de travail intérimaire mettant des travailleurs à disposition devraient être celles qui sont appliquées aux entreprises nationales mettant des travailleurs à disposition. Contrairement à la directive actuelle, il s’agirait désormais d’une obligation juridique imposée aux États membres.