Directive sur les conditions d’accueil  
2016/0222(COD) - 13/07/2016  

OBJECTIF : refondre la directive établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale (refonte).

ACTE PROPOSÉ : Directive du Parlement européen et du Conseil.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN : le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire sur un pied d’égalité avec le Conseil.

CONTEXTE : le régime d'asile européen commun est fondé sur des règles permettant de déterminer l’État membre responsable à l'égard des demandeurs de protection internationale et sur des normes communes en matière de procédures d’asile, de conditions d’accueil, de reconnaissance et de protection des bénéficiaires d'une protection internationale.

Malgré les progrès importants qui ont été accomplis dans l'élaboration du régime d’asile européen commun (RAEC), il existe encore des différences notables entre les États membres dans les types de procédures utilisés, les conditions d’accueil offertes aux demandeurs, les taux de reconnaissance et le type de protection octroyé aux bénéficiaires d'une protection internationale. Ces divergences contribuent à des mouvements secondaires et à une course à l'asile («asylum shopping»), créent des facteurs d’attraction et conduisent en définitive à une répartition inégale entre les États membres de la responsabilité d’offrir une protection à ceux qui en ont besoin.

Les récentes arrivées massives de migrants ont montré que l’Europe avait besoin d’un régime d’asile efficace qui permette d’assurer un partage équitable et durable des responsabilités entre les États membres et de garantir la qualité des décisions prises.

Dans cette perspective, la Commission a présenté une 1ère série de propositions visant à réformer le régime d’asile européen commun, qui portait sur :

Avec le 2ème train de mesures, il est prévu de réformer le RAEC en adoptant 4 propositions supplémentaires:

  1. une proposition remplaçant la directive relative aux procédures d’asile par un règlement harmonisant les modalités procédurales actuellement disparates de tous les États membres et instituant une véritable procédure commune;
  2. une proposition remplaçant la directive relative aux conditions que doivent remplir les demandeurs d'asile par un règlement qui fixe des normes uniformes pour la reconnaissance des personnes ayant besoin d'une protection internationale,
  3. la présente proposition de révision de la directive relative aux conditions d’accueil,
  4. un cadre structuré de l'Union pour la réinstallation, en vue de parvenir à une meilleure gestion de la protection internationale au sein de l’UE.

CONTENU : la directive relative aux conditions d’accueil prévoit une harmonisation minimale des normes pour l’accueil des personnes demandant une protection internationale dans l’UE. Toutefois, les conditions d’accueil demeurent très variables selon les États membres, tant en ce qui concerne les modalités d'organisation du système d’accueil que les normes offertes aux demandeurs.

Cette disparité est source de mouvements secondaires de personnes demandant l’asile et exerce une pression disproportionnée sur certains États membres en particulier.

Dans ce contexte, la présente proposition vise à:

1) poursuivre l'harmonisation des conditions d’accueil dans l'UE afin que les demandeurs d’asile soient traités de manière digne dans l’ensemble de l’Union, dans le respect des droits fondamentaux et des droits de l’enfant, et à réduire les mouvements secondaires de migrants.

Dans ce contexte, les principales modifications du nouveau dispositif portent sur :

  • le champ d'application: la directive avait pour principe de s’appliquer à tous les ressortissants de pays tiers et apatrides qui présentent une demande de protection internationale sur le territoire de l'un des États membres, aussi longtemps qu’ils sont autorisés à rester sur le territoire en qualité de demandeurs et dès que la demande est présentée. Une exception était prévue pour les cas où un demandeur se trouvait irrégulièrement dans un État membre autre que celui dans lequel il était tenu d’être présent. Dans ce cas, il n'était pas autorisé à bénéficier des conditions matérielles d’accueil, de la scolarisation et de l’éducation des mineurs, ainsi que de l’emploi et de la formation professionnelle. La proposition précise que les demandeurs auront toujours droit à des soins médicaux et à un niveau de vie digne, dans le respect des droits fondamentaux, de manière à ce qu'il soit pourvu à la subsistance et aux besoins fondamentaux du demandeur, en termes de sécurité physique, de dignité et de relations interpersonnelles. Le droit à un traitement digne s’applique également dans les cas, dûment justifiés, où un État membre applique à titre exceptionnel, pour les conditions matérielles d’accueil, des normes différentes de celles qui sont requises par la directive relative aux conditions d’accueil ;
  • la définition des membres de la famille : celle-ci est élargie et comprend les liens familiaux constitués après le départ du pays d'origine mais avant l'arrivée sur le territoire de l’État membre. Elle reflète la réalité actuelle des migrations, les demandeurs séjournant souvent pendant de longues périodes en dehors de leur pays d’origine avant d’atteindre l’Union, en particulier dans des camps de réfugiés ;
  • des indicateurs : la proposition impose aux États membres de tenir compte, dans le cadre de la surveillance et du contrôle de leur régime d’accueil, des normes opérationnelles et des indicateurs relatifs aux conditions d'accueil que le Bureau européen pour l’asile élabore actuellement ;
  • les situations d’urgence migratoire : la proposition fait obligation aux États membres d’élaborer et de mettre régulièrement à jour des plans d’urgence exposant les mesures prévues pour garantir un accueil adapté au cas où l’État membre serait confronté à un nombre disproportionné de demandes. La proposition exige également des États membres qu'ils informent la Commission et l’Agence de l’UE pour l’asile chaque fois qu'ils déclenchent leur plan d’urgence ;
  • les besoins particuliers de certains demandeurs : la proposition précise que les personnes ayant des besoins particuliers en matière d’accueil sont les personnes ayant besoin de garanties particulières, que ces personnes soient ou non considérées comme vulnérables. La proposition comporte également des règles plus détaillées pour évaluer, déterminer et prouver ces besoins particuliers en matière d’accueil (ex. : un médecin ou à un psychologue) ;
  • la prévision d’un tuteur pour les mineurs non accompagnés (MNA) : la proposition introduit un délai plus court, à savoir 5 jours ouvrables à compter de la date de présentation de la demande, pour la désignation par les États membres d'un tuteur chargé de représenter et d'assister un MNA.

2) réduire les incitations aux mouvements secondaires : afin d’assurer une gestion ordonnée des flux migratoires, de faciliter la détermination de l’État membre responsable et d'éviter les mouvements secondaires, il est essentiel que les demandeurs restent dans l’État membre responsable de leur demande et qu'ils ne prennent pas la fuite. L’introduction de restrictions plus ciblées à la liberté de circulation des demandeurs et les conséquences sévères attachées au non-respect de ces restrictions contribueront à un suivi plus efficace de la localisation des demandeurs.

Une harmonisation accrue des possibilités de fixer aux demandeurs un lieu de résidence spécifique, de leur imposer des obligations de se manifester et de leur offrir des conditions matérielles d’accueil en nature uniquement, est également nécessaire pour créer une situation plus prévisible pour les demandeurs et les dissuader de prendre la fuite.

Cela vaut en particulier dans 3 situations, à savoir:

  1. lorsque le demandeur n’a pas présenté de demande de protection internationale dans l’État membre de première entrée irrégulière ou d'entrée légale,
  2. lorsque le demandeur s'est enfui de l’État membre dans lequel il était tenu d’être présent : dans ce cas, le demandeur devra rapidement être renvoyé dans l’État membre approprié,
  3. lorsque le demandeur a été renvoyé dans l’État membre dans lequel il était tenu d’être présent après s'être enfui dans un autre État membre.

La proposition impose aux États membres d'informer les demandeurs, en utilisant un modèle commun, dès que possible et au plus tard au moment de l'introduction de leur demande, des avantages dont ils peuvent bénéficier et des obligations qu'ils doivent respecter en ce qui concerne les conditions d’accueil, y compris les circonstances dans lesquelles le bénéfice des conditions matérielles d’accueil peut être limité (ex. : s’ils s’enfuient).

La proposition précise également que

  • toutes les décisions restreignant la liberté de circulation d'un demandeur doivent être fondées sur la situation particulière de la personne, en tenant compte des besoins particuliers en matière d’accueil des demandeurs et du principe de proportionnalité ;
  • les États membres ne doivent fournir aux demandeurs un document de voyage que lorsque des raisons humanitaires graves l'exigent. Aucun document de voyage ne devrait être délivré en dehors de ces circonstances exceptionnelles.

D’autres dispositions ont été ajoutées en matière de :

  • élargissement des conditions matérielles d’accueil, aux articles d'hygiène,
  • limitation dans certaines circonstances, des allocations journalières de subsistance,
  • modification des conditions matérielles d’accueil, si le demandeur a gravement manqué au règlement du centre d’hébergement ou s'est comporté de manière violente ou ne s'est pas conformé à l’obligation de demander une protection internationale dans l’État membre de première entrée,
  • rétention, de sorte qu’un demandeur puisse être maintenu en rétention s’il existe un risque persistant de fuite. Toutes les garanties déjà prévues en matière de rétention par l'actuelle directive relative aux conditions d’accueil restent inchangées.

3) renforcer l'autonomie des demandeurs et leurs perspectives d’intégration éventuelle : à l’exception de ceux dont les demandes seront probablement rejetées, les demandeurs doivent, dès que possible, être autorisés à travailler et à gagner de l’argent, même si leur demande est en cours de traitement. Ainsi, le délai maximal de 9 mois pour accéder au marché du travail est ramené à un maximum de 6 mois à compter de l'introduction de la demande.

Les États membres sont également encouragés à ouvrir l’accès au marché du travail dans un délai maximal de 3 mois à compter de l'introduction de la demande lorsqu'il est probable que cette dernière soit fondée.

Il est également essentiel de réduire encore les divergences qui existent actuellement entre les réglementations des États membres en ce qui concerne l’accès au marché du travail pour limiter la course à l'asile liée à l'emploi et les incitations aux mouvements secondaires.

Une fois qu'ils ont obtenu l’accès au marché du travail, les demandeurs devraient bénéficier d'un ensemble commun de droits sur la base de l’égalité de traitement avec les ressortissants de l'État membre, de la même façon que les autres ressortissants de pays tiers qui travaillent dans l’Union. Il est expressément indiqué que le droit à l’égalité de traitement ne fait pas naître un droit de séjour dans les cas où la demande de protection internationale du demandeur a été rejetée.

Les conditions de travail visées dans la proposition englobent au moins le salaire et le licenciement, les exigences en matière de santé et de sécurité au travail, le temps de travail et les congés, en tenant compte des conventions collectives en vigueur.

La proposition permet toutefois de limiter l’égalité de traitement en ce qui concerne l’éducation et la formation professionnelle à l’éducation et à la formation qui sont directement liées à un emploi. La proposition permet également de limiter l’égalité de traitement en ce qui concerne les allocations familiales et les prestations de chômage.

Mise en œuvre et modalités de suivi : la Commission fera rapport au Parlement européen et au Conseil sur l’application de la future directive dans les 3 ans qui suivent son entrée en vigueur, et tous les 5 ans par la suite.

Dispositions territoriales : la participation du Royaume-Uni et de l’Irlande au présent texte sera déterminée pendant les négociations et conformément au protocole n° 21 sur la position du Royaume-Uni et de l'Irlande à l'égard de l’acquis Schengen, annexé au TUE et au TFUE

Le Danemark ne sera pas soumis à son application.