Huile de palme et déforestation des forêts tropicales humides  
2016/2222(INI) - 20/03/2017  

La commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire a adopté le rapport d’initiative de Kateřina KONEČNÁ (GUE/NGL, CZ) sur l’huile de palme et la déforestation des forêts tropicales humides.

Les députés rappellent qu'il existe de nombreuses causes à la déforestation dans le monde, dont la production de produits agricoles comme le soja, le bœuf, le maïs et l'huile de palme. Ils indiquent également que les écosystèmes tropicaux essentiels, qui couvrent seulement 7% de la surface de la Terre, sont soumis à une pression croissante de la déforestation. Les monocultures de palmiers produisant de l'huile de palme causent par ailleurs d’énormes incendies, l'assèchement des rivières, l'érosion des sols, le drainage des tourbières, la pollution des cours d'eau et la perte générale de biodiversité.

Remarques générales : les députés rappellent que l'agriculture durable, la sécurité alimentaire et la gestion durable des forêts sont des objectifs fondamentaux des Objectifs pour le développement durable (OOD). Ils indiquent toutefois que 73% de la déforestation mondiale provient du défrichage des terres en vue de la production agricole, avec 40% de la déforestation mondiale causée par la plantation de monocultures de palmiers producteurs d’huile de palme.

L'exploitation de l'huile de palme n'est toutefois pas la seule cause de la déforestation. La demande est également stimulée par la progression mondiale de biocarburants et par la spéculation opérée sur les terres et les produits agricoles. Pour les députés, la lutte contre la déforestation doit donc tenir compte de cet ensemble de facteurs.

Les députés soulignent au passage que la Malaisie et l'Indonésie sont les principaux producteurs d'huile de palme. Mais l'Indonésie est aussi considérée comme le 3ème plus grand pollueur de CO2 dans le monde et souffre d'une diminution de sa biodiversité.

Rappelant que l'huile de palme représentait environ 40% du commerce mondial de toutes les huiles végétales dans le monde et que l'UE en était le 2ème importateur mondial avec 7 millions de tonnes par an, les députés s’alarment du fait que près de la moitié de la superficie des forêts illégalement déboisées soient utilisées pour la production d'huile de palme pour le seul marché européen.

Ils précisent que l'huile de palme est utilisée comme ingrédient et/ou substitut par l'industrie agroalimentaire en raison de sa productivité et de ses propriétés chimiques, par exemple sa facilité de stockage, son point de fusion et son prix inférieur en tant que matière première.

Responsabilité collective de la question de la production d’huile de palme : pleinement conscients de la complexité de la question de la production d'huile de palme, les députés recommandent vivement qu’une solution globale soit trouvée sur cette question sur la base de la responsabilité collective de toutes les parties prenantes, à savoir : l'UE et les autres organisations internationales, les États membres, les institutions financières, les gouvernements des pays producteurs, les populations autochtones et les communautés locales mais aussi les multinationales chargées de sa production, de sa distribution et de son traitement ainsi que les associations de consommateurs et les ONG. Mais c’est d’abord la responsabilité de l'industrie alimentaire qui est pointée par les députés pour trouver des solutions de production durable en la matière.

Zéro déforestation : les députés constatent que plusieurs producteurs et négociants d’huile de palme se sont engagés à une production et un commerce de produits zéro déforestation, ce qui va dans le sens d’une plus grande durabilité de la production. Toutefois, les efforts visant à stopper la déforestation doivent inclure le renforcement des capacités locales et le partage des meilleures pratiques entre les communautés ainsi qu’un véritable soutien aux petits producteurs locaux, notamment ceux qui se spécialisent dans les techniques d’agroécologiques (techniques de plantation mixte, agroforesterie et permaculture, sans recours aux intrants chimiques ou à la monoculture).

Les députés se réjouissent par ailleurs de l’existence de systèmes certifications volontaires (labels, etc.) mais considèrent que cela reste insuffisant pour affronter le problème. Ils appellent donc l’UE à ne plus faire entrer sur le marché européen que des huiles de palme produites durablement d’ici à 2020.

Autres recommandations : les députés font par ailleurs une série d’autres recommandations allant toutes dans le sens d’une plus grande durabilité de la production mondiale d’huile de palme, notamment en termes d’engagements internationaux.

Entre autres recommandations, les députés appellent à :

  • des campagnes d’information des consommateurs sur les effets bénéfiques d’un point de vue social, économique et environnemental de la production d’huile de palme durable ;
  • la fixation de critères minimaux de durabilité pour l'huile de palme et des produits contenant de l'huile de palme entrant sur le marché de l'UE ;
  • des mesures de traçabilité des huiles de palme importées dans l’UE ;
  • un dialogue avec les pays producteurs de sorte que ces derniers gèlent toute nouvelle zone de production en créant un moratoire sur toute nouvelle concession ;
  • la mise en place de mesures effectives de responsabilité sociale et environnementale d’entreprises pour toutes les entreprises productrices ;
  • l’introduction dans les États membres, d’exigences obligatoires favorisant l'huile de palme durable dans toutes les procédures de passation des marchés publics.

Biocarburants : enfin, les députés constatent que 46% de l'huile de palme totale importée par l'UE est utilisée pour la production de biocarburants et que cela induit l'utilisation d'environ un million d'hectares de sols tropicaux. Ils demandent dès lors à la Commission de prendre des mesures pour éliminer l'utilisation d'huiles végétales qui conduisent à la déforestation, y compris l'huile de palme, comme composant des biocarburants, d'ici 2020. Les députés précisent en effet que l'interdiction ou l'élimination progressive de l'utilisation de l'huile de palme peut donner lieu à l'utilisation d'huiles végétales tropicales de remplacement pour la production de biocarburants qui, selon toute vraisemblance, seraient cultivées dans les mêmes régions écologiquement sensibles que celles où est produite l'huile de palme. Ils sollicitent dès lors la mise en place de solutions alternatives plus durables pour l'utilisation des biocarburants, comme les huiles européennes produites à partir de graines de colza et de tournesol cultivées dans le pays.