Mesures légitimes visant à protéger les lanceurs d'alerte qui divulguent, au nom de l'intérêt public, des informations confidentielles d'entreprises et d'organismes publics  
2016/2224(INI) - 24/10/2017  

Le Parlement européen a adopté par 399 voix pour, 101 contre et 166 abstentions, une résolution sur les mesures légitimes visant à protéger les lanceurs d’alerte qui divulguent, au nom de l’intérêt public, des informations confidentielles d’entreprises et d’organismes publics.

Une proposition de résolution de remplacement, déposée par le groupe ENF, a été rejetée en plénière par 45 voix pour, 555 contre et 66 abstentions.

Le Parlement a rappelé le rôle important des lanceurs d’alerte dans le signalement d’actes illégaux ou répréhensibles portant atteinte à l’intérêt général et au fonctionnement de la société. Les citoyens et les journalistes devraient faire l’objet d’une protection juridique plutôt que de poursuites lorsqu’ils divulguent des informations au nom de l’intérêt général. Or, la protection des lanceurs d’alerte est fragmentée en Europe ce qui engendre une insécurité juridique dans les situations transfrontalières en particulier.

Protéger les lanceurs d’alerte à l’échelle de l’UE:  le Parlement a invité la Commission à présenter, avant la fin de l’année 2017, une proposition législative établissant une protection des lanceurs d’alerte dans l’Union à tous les niveaux des secteurs public et privé, ainsi que dans les institutions nationales et européennes.

La législation de l’Union devrait établir une procédure claire de traitement correct des signalements et de protection efficace des lanceurs d’alerte. Elle devrait prévoir que les entreprises qui mettent en œuvre des représailles à l’encontre des lanceurs d’alerte ne puissent ni bénéficier de fonds européens ni conclure de marchés avec l’administration publique.

Le Parlement a invité les États membres qui n’ont pas encore adopté de législation en la matière à le faire dans un avenir proche. Il a demandé à la Commission de surveiller les dispositions des États membres relatives aux lanceurs d’alerte et d’envisager la création d’une plateforme d’échange des bonnes pratiques dans ce domaine entre États membres, ainsi qu’avec les pays tiers.

Estimant que le lancement d’alerte devrait être encouragé en tant qu’acte de civisme, les députés ont appelé à promouvoir le rôle positif que les lanceurs d’alerte jouent, alors qu’ils sont souvent vulnérables et sans défense, notamment par des campagnes de sensibilisation et de protection.

Mécanisme de signalement: compte tenu de l’absence de moyens de protection et de canaux sûrs de signalement clairement définis, le Parlement a préconisé de mettre en place un système fiable qui permette les signalements en interne, aux autorités compétentes et à l’extérieur des organisations.

Les employeurs devraient mettre en place des procédures de signalement interne et chaque organisation devrait mettre en place des canaux de signalement clairs, avec une personne ou une entité indépendante et impartiale chargée de recueillir les alertes.

Chaque travailleur devrait être informé de la procédure de signalement applicable, laquelle devrait garantir le respect de la confidentialité et d’un délai raisonnable dans le traitement de l’alerte.

Protection accordée en cas de signalement: les députés ont estimé que lorsqu’une personne est reconnue comme un lanceur d’alerte, des mesures devraient être prises afin de la protéger contre toutes mesures de représailles prises à son encontre et de lui accorder une réparation intégrale du préjudice et des dommages subis. Les représailles devraient faire l’objet d’une pénalisation et de sanctions efficaces. Ces dispositions devraient figurer dans la proposition de directive de la Commission.

Le Parlement a demandé que les lanceurs d’alerte aient la possibilité d’introduire une demande en référé visant à prévenir des représailles telles que le licenciement. Il a condamné la pratique des «poursuites-bâillons», qui consiste à entamer des poursuites judiciaires à l’encontre d’un lanceur d’alerte dans le but de le conduire à l’autocensure ou à l’épuisement financier, moral ou psychologique.

Les députés ont également suggéré  de mettre en place des moyens clairement encadrés de signalement anonyme. L’identité du lanceur d’alerte ainsi que toute information permettant son identification ne sauraient être révélées sans son consentement et toute violation de l’anonymat devrait faire l’objet de sanctions.

Accompagnement des lanceurs d’alerte: au-delà des risques professionnels, les lanceurs d’alerte font face à des risques personnels, psychologiques, sociaux et financiers.

C’est pourquoi le Parlement a jugé nécessaire de prévoir un soutien psychologique, l’octroi d’une aide juridictionnelle aux lanceurs d’alerte qui le demandent et manquent des ressources nécessaires, ainsi que l’octroi d’une aide sociale et financière lorsque le besoin est justifié et à titre conservatoire en cas de procédure civile ou pénale à leur encontre.

La Commission a été invitée à évaluer la possibilité de confier des tâches au Médiateur européen dans ce contexte.

Les députés ont proposé:

  • la création d’une autorité européenne centralisée pour la protection efficace des lanceurs d’alerte et des personnes qui les aident dans leur action;
  • la mise en place dans les États membres d’organismes indépendants, dotés de ressources budgétaires suffisantes et de compétences spécialisées, chargés de recueillir les signalements, d’en vérifier la crédibilité, d’assurer le suivi de la réponse donnée et de fournir des conseils aux lanceurs d’alerte.

La résolution a enfin souligné que les enquêtes sur les questions soulevées par des lanceurs d’alerte devraient être effectuées de manière indépendante et dans le plus bref délai possible, en protégeant également les droits des personnes qui pourraient être visées par une divulgation.