Le Parlement européen a adopté par 343 voix pour, 35 contre et 160 abstentions, une résolution sur la crise politique en Moldavie suite à l'invalidation des élections locales à Chisinau.
La résolution a été déposée par les groupes PPE, S&D, ALDE, GUE/NGL et Verts/EFA.
Le Parlement sest dit vivement préoccupé par la décision dinvalider les résultats des élections du maire de Chișinău par la cour suprême de Moldavie, décision qui repose sur des motifs fallacieux et opaques. Cette décision a sensiblement compromis l'intégrité du processus électoral.
Le Parlement a rappelé quAndrei Nastase a remporté les élections municipales anticipées à Chișinău à lissue de deux tours de scrutin, qui ont eu lieu le 20 mai et le 3 juin 2018, avec 52,57 % des voix contre Ion Ceban, qui a obtenu 47,43 % des voix, et que ce résultat avait été reconnu par des observateurs internationaux. Cependant, les tribunaux de Chișinău ont annulé les élections municipales au motif que les deux candidats sétaient adressés aux électeurs sur les réseaux sociaux le jour de lélection, après la fin de la période légale de campagne. La Cour Suprême a confirmé ce jugement. Les députés ont noté que l«appel aux urnes» que les tribunaux ont considéré comme constituant une pression et une prise d'influence indue sur les électeurs est une pratique électorale courante en Moldavie et na jamais entraîné lannulation d'une élection auparavant.
Les députés se sont déclarés profondément solidaires des milliers de personnes qui manifestent dans les rues de Chișinău pour que les autorités moldaves prennent les mesures requises afin de garantir que les résultats des élections municipales de Chișinău soient respectés.
Exprimant sa préoccupation par la dégradation alarmante des normes démocratiques en Moldavie, le Parlement a reconnu que la décision des tribunaux, dont le biais politique et l'influence qu'ils subissent à cet égard sont de notoriété publique, témoignent de la captation de l'État ainsi que d'une profonde crise institutionnelle en Moldavie.
Dans ces circonstances, les députés ont considéré que les conditions politiques pour l'octroi d'une assistance macrofinancière (AMF) n'ont pas été remplies, et rappelle que «loctroi d'une AMF est subordonné à la condition préalable que le pays bénéficiaire respecte des mécanismes démocratiques effectifs, y compris le pluralisme parlementaire et l'État de droit, et garantisse le respect des droits de l'homme». Ils ont prié instamment la Commission de suspendre tous les versements à la Moldavie au titre de lAMF. Toute décision concernant de futurs versements ne devrait être prise quaprès la tenue des élections législatives prévues et subordonnée à la condition que ces élections respectent les normes internationalement reconnues et soient évaluées par des organes spécialisés, ainsi quau respect des conditions liées à laide macrofinancière.
Le Parlement a demandé que la Commission suspende laide budgétaire en faveur de la Moldavie en sappuyant sur le précédent de juillet 2015, lorsquelle a été suspendue dans le prolongement de la crise bancaire. Le mécanisme de suspension devrait contenir une liste de conditions à appliquer pour les autorités moldaves, parmi lesquelles la validation des élections à Chișinău ainsi que, dans le contexte de laffaire de la fraude bancaire, la réalisation denquêtes effectives, axées sur des résultats et entièrement transparentes, le recouvrement des avoirs et lengagement de poursuites contre les personnes responsables. Les députés ont invité le SEAE et la Commission à suivre de près lévolution de la situation dans tous ces domaines et à tenir le Parlement dûment informé.
Sinquiétant de la concentration du pouvoir économique et politique dans les mains dun petit groupe de personnes, de la détérioration de létat de droit, des normes démocratiques et du respect des droits de lhomme, de la politisation excessive des institutions de lÉtat, de la corruption systémique, des lacunes des enquêtes sur la fraude bancaire de 2014 et du pluralisme limité des médias, le Parlement a invité les autorités moldaves à :
- réformer le système judiciaire et nommer de nouveaux juges afin déviter que le pouvoir judiciaire nintervienne dans le processus électoral et politique ou ne compromette de toute autre manière lexpression démocratique de la volonté des citoyens moldaves ;
- déployer des efforts résolus pour recouvrer les fonds volés à la suite de la fraude bancaire de 2014 par laquelle près dun milliard de dollars ont été subtilisés dans le système financier moldave et traduire les responsables en justice, indépendamment de leur affiliation politique ;
- donner suite aux recommandations du BIDDH de lOSCE et de la commission de Venise sur la réforme électorale ;
- respecter les bonnes pratiques et les principes internationaux et de garantir l'instauration d'un environnement favorable à la société civile.