Plan d'action européen fondé sur le principe "Une seule santé" pour combattre la résistance aux antimicrobiens  
2017/2254(INI) - 12/07/2018  

La commission de l’environnement, de la santé publique et  de la sécurité alimentaire a adopté un rapport d’initiative de Karin KADENBACH (S&D, AT), sur le plan d’action européen fondé sur le principe «Une seule santé» pour combattre la résistance aux antimicrobiens.

Les députés ont noté que, du fait de l’utilisation excessive et incorrecte des antibiotiques et des mauvaises pratiques de contrôle des infections en médecine humaine et vétérinaire, la résistance aux antimicrobiens (RAM) est progressivement devenue une menace considérable pour l’humanité. La mauvaise utilisation des antibiotiques érode leur efficacité. Chez l’être humain, la moitié des prescriptions d’antibiotiques sont inefficaces.

Insistant sur le fait que l’utilisation prudente et correcte des antimicrobiens est indispensable pour limiter l’apparition de la RAM en médecine humaine, la commission compétente a fait les recommandations suivantes :

L’Union, une «région de pratiques d’excellence»: les députés ont insisté sur le fait que le principe « Une seule santé » devait être placé au cœur de la lutte contre la RAM, en prenant en compte le fait que la santé des hommes et celle des animaux et de l’environnement sont interconnectées. Ils ont appelé à définir des objectifs mesurables et contraignants en matière de RAM, assortis de chiffres ambitieux, pour le plan d’action européen fondé sur le principe «Une seule santé» et pour les plans d’action nationaux afin de permettre des analyses comparatives.

Ils ont également invité la Commission à publier une évaluation à mi-parcours et ex post du plan d’action.

De nombreux antimicrobiens sont utilisés chez les humains et les animaux et certains de ces antimicrobiens sont essentiels à la prévention ou au traitement d’infections potentiellement mortelles chez l’homme. Les députés ont considéré que leur utilisation chez les animaux devrait être interdite. Le recours à ces antimicrobiens devrait être réservé à la médecine humaine afin de préserver le plus longtemps possible leur efficacité dans le traitement des infections chez l’homme. La Commission devrait spécifier les antibiotiques à réserver pour le traitement de certaines infections chez l’homme. De plus, les députés ont demandé d’élaborer des messages de sensibilisation en matière de santé publique et de promouvoir une utilisation responsable des antibiotiques, en particulier dans l’utilisation prophylactique.

Concernant la santé animale, le rapport relève que l’élevage intensif peut impliquer l’administration régulière et incorrecte d’antibiotiques au bétail et à la volaille dans les exploitations afin de favoriser une croissance rapide, et que les antibiotiques sont également souvent administrés à titre prophylactique. Les députés ont demandé l’abandon du recours systématique aux antibiotiques à des fins prophylactiques et métaphylactiques (le traitement d’un groupe d’animaux lorsqu’un seul de ces animaux montre des signes d’infections) dans les groupes d’animaux d’élevage. Ils ont également proposé que l’utilisation d’antibiotiques de dernier recours soit purement et simplement interdite chez les animaux de rente tout en insistant sur l’importance des bonnes pratiques en matière d’élevage, d’hygiène, de gestion des exploitations agricoles et d’investissements dans ces domaines.

La Commission a été exhortée à présenter une nouvelle stratégie de l’Union concernant le bien-être animal.

Concernant l’usage prophylactique chez l’homme, le rapport a invité les États membres à examiner tous les protocoles existants, en particulier ceux applicables aux utilisations prophylactiques lors des traitements chirurgicaux. Il a accueilli favorablement les exemples de bonnes pratiques, tels que le projet Pirasoa, et a encouragé la mise en place de mécanismes visant à partager les meilleures pratiques et les protocoles.

Encourager la recherche: les députés ont considéré que des mesures d’incitation étaient nécessaires pour encourager la recherche sur de nouveaux antimicrobiens, ces mesures comprenant l’allongement des périodes de protection pour la documentation technique concernant les nouveaux médicaments, la protection commerciale des substances actives novatrices et la protection des investissements substantiels dans les données produites pour améliorer un produit antimicrobien existant ou pour le maintenir sur le marché. Ils ont invité la Commission à analyser le modèle actuel d’incitation à la recherche et au développement, y compris le modèle d’exclusivités de marché transférables, afin d’en concevoir de nouveaux et de définir une réglementation.

Les députés ont également appelé à :

  • lancer une plateforme publique pour les projets de recherche et de développement financés par des fonds publics dans le domaine de la RAM et à coordonner toutes les actions en la matière ;
  • mettre en place une procédure accélérée au cours de laquelle l’utilisation des antimicrobiens approuvés à des fins industrielles ou agricoles et soupçonnés d’avoir une incidence négative grave sur la résistance aux antimicrobiens peut être temporairement interdite jusqu’à ce que des études complémentaires sur l’incidence de l’antimicrobien aient été réalisées ;
  • investir dans le développement de solutions de substitution non antibiotiques pour la santé animale, y compris les facteurs de croissance, ainsi que dans le développement de nouvelles molécules pour la conception de nouveaux antibiotiques.

Donner corps aux objectifs mondiaux: les députés ont exhorté l’Union et les États membres à s’engager clairement à lancer une stratégie globale intersectorielle de lutte contre la RAM, couvrant des domaines d’action tels que le commerce international, le développement et l’agriculture.

Le rapport a souligné que l’utilisation d’antibiotiques comme facteurs de croissance chez les animaux destinés à produire des denrées alimentaires était interdite dans l’Union depuis 2006, mais qu’en dehors de l’Union, cette utilisation restait possible. Il a invité la Commission à inclure une clause dans tous les accords de libre-échange prévoyant que les denrées alimentaires importées de pays tiers ne doivent pas avoir été produites à l’aide d’antibiotiques comme facteurs de croissance.

En dernier lieu, les députés ont invité la Commission à mettre sur pied des programmes de recherche en collaboration avec les pays tiers afin de réduire l’utilisation excessive des antibiotiques.