Lutte contre la violence à caractère sexiste: cyberviolence  
2020/2035(INL) - 14/12/2021  

Le Parlement européen a adopté par 513 voix pour, 122 contre et 58 abstentions, une résolution contenant des recommandations à la Commission sur la lutte contre la violence fondée sur le genre: cyberviolence.

Le Parlement a souligné que la cyberviolence à l’encontre des femmes et des personnes LGBTIQ s’inscrit dans la continuité de la violence à caractère sexiste qui s’exerce hors ligne, et qu’aucune mesure politique ne sera efficace si elle ne prend pas cette réalité en considération. Il n’existe par ailleurs aucune définition harmonisée de la cyberviolence fondée sur le genre, ce qui entraîne ainsi de grandes disparités entre les États membres en ce qui concerne la protection, le soutien et l’indemnisation des victimes.

Le Conseil est invité à activer la clause passerelle en adoptant une décision définissant la violence fondée sur le genre comme un domaine de criminalité particulièrement grave revêtant une dimension transfrontière, conformément à l’article 83, paragraphe 1, troisième alinéa, du traité FUE.

Législation européenne pour lutter contre toutes les formes de violence fondée sur le genre

Le Parlement a demandé à la Commission de soumettre sans délai une proposition d’acte législatif fixant des mesures de lutte contre la cyberviolence fondée sur le genre.

La future directive devrait i) inclure des règles minimales relatives à la définition de l’infraction de cyberviolence fondée sur le genre et aux sanctions y afférentes, ii) mettre en place des mesures pour appuyer l’action des États membres dans le domaine de la prévention de cette infraction et iii) prévoir mesures pour protéger et soutenir les victimes et veiller à ce qu’elles obtiennent réparation.

La proposition devrait comporter une définition commune de la cyberviolence fondée sur les définitions figurant notamment dans les instruments existants, tels que la convention du Conseil de l’Europe sur la cybercriminalité ou la convention d’Istanbul.

Infractions couvertes

Le champ d’application de la proposition législative devrait comprendre toute forme de violence fondée sur le genre commise, facilitée par l’utilisation de technologies de l’information et de la communication (TIC), telles que les téléphones portables et les téléphones intelligents, l’internet, les plateformes de réseaux sociaux ou le courrier électronique, infligée à une femme parce qu’elle est une femme ou touchant de manière disproportionnée les femmes ou infligée aux personnes LGBTIQ en raison de leur identité de genre.

Dans la liste non-exhaustive de mesures que la législation devrait aborder figurent:

- le cyberharcèlement, y compris la cyberintimidation;

- la cyberprédation;

- l’enregistrement et le partage d’images d’agressions sexuelles;

- le contrôle à distance ou la surveillance;

- les menaces de viol ou le chantage sexuel;

- les discours de haine sexiste (y compris la misogynie);

- l’incitation à la violence auto-infligée, telle que le suicide ou l’anorexie;

- l’accès illégal aux messages sur téléphone portable, aux messages électroniques ainsi qu’aux comptes sur les réseaux sociaux;

- la violation des restrictions de communication imposées par des injonctions judiciaires;

- l’utilisation de moyens technologiques pour la traite des êtres humains.

Les États membres sont appelés à mettre un terme à l’industrie pornographique fondée sur la traite à des fins d’exploitation sexuelle, le viol et d’autres formes d’agression et d’abus à l’encontre des femmes et des enfants.

Mesures de prévention

Parmi les mesures devraient figurer:

- des programmes de sensibilisation et d’éducation;

- des mesures d’éducation au numérique, y compris dans les programmes scolaires, afin de favoriser une meilleure compréhension des technologies numériques pour éviter l’utilisation abusive des médias sociaux et responsabiliser les utilisateurs;

- une coopération entre les États membres aux fins de l’échange d’informations par l’intermédiaire notamment du réseau européen de prévention de la criminalité en collaboration avec le Centre européen de lutte contre la cybercriminalité d’Europol et d’autres organes comme Eurojust;

- l’assurance que les plateformes en ligne qui sont principalement utilisées pour diffuser des contenus pornographiques créés par les utilisateurs prennent les mesures nécessaires pour garantir que les utilisateurs qui diffusent ce genre de contenus s’authentifient au moyen d’un double enregistrement par courriel et téléphone portable.

Protection, soutien et indemnisation des victimes

Les mesures devraient être centrées sur les victimes et suivre une approche intersectionnelle. Elles devraient, entre autres:

- promouvoir une formation obligatoire des praticiens et des professionnels qui s’occupent des victimes de cyberviolence fondée sur le genre;

- mettre en place des points de contact nationaux au sein des services sociaux et de services répressifs avec un personnel spécialement formé à la cyberviolence fondée sur le genre;

- mettre en place des services spécifiques destinés aux victimes de cyberviolence (lignes d’assistance téléphonique, foyers d’hébergement, assistance juridique et aide psychologique), - faciliter le signalement par les victimes, en leur permettant d’obtenir des ordonnances de protection, et élaborer des mécanismes de recours assortis de mesures de réparation.

Poursuite et incrimination de la cyberviolence fondée sur le genre

L’incrimination de la cyberviolence fondée sur le genre (y compris l’instigation, la complicité et la tentative) devrait tenir compte des critères suivants: les sanctions minimales et maximales (peines de prison et amendes), les enquêtes et les poursuites transfrontières, des lignes directrices adressées aux services répressifs et aux parquets pour les enquêtes et les poursuites, ainsi qu’une coopération efficace entre les services répressifs.

Collecte de données et production de rapports

La Commission et les États membres devraient collecter et publier régulièrement des données exhaustives, ventilées et comparables sur les différentes formes de cyberviolence fondée sur le genre, non seulement sur la base des rapports des services répressifs ou des organisations de la société civile, mais aussi sur la base de l’expérience des victimes. Des indicateurs devraient être définis pour mesurer l’efficacité de leurs interventions dans la lutte contre la cyberviolence fondée sur le genre.