Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la vioence à l'égard des femmes et la violence domestique: adhésion de l'Union européenne  
2016/0062R(NLE) - 15/02/2023  

Le Parlement européen a adopté par 469 voix pour, 104 contre et 55 abstentions, une résolution sur la proposition de décision du Conseil portant conclusion, par l’Union européenne, de la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.

Une femme sur trois dans l’Union, soit près de 62 millions de femmes, a subi des violences physiques et/ou sexuelles tandis que plus de la moitié des femmes (55 %) dans l’Union ont été victimes de harcèlement sexuel au moins une fois depuis l’âge de 15 ans. Les députés estiment qu’à son rythme actuel, l’Union aurait besoin d’environ 60 ans pour parvenir à l’égalité entre les hommes et les femmes, ce qui suppose, comme condition préalable, l’éradication de la violence fondée sur le genre.

Adhésion de l’Union à la convention d’Istanbul

Le Parlement s’est félicité que la Commission ait proposé, le 4 mars 2016, l’adhésion de l’Union à la convention d’Istanbul, à savoir l’instrument juridiquement contraignant le plus complet au niveau international sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence fondée sur le genre, notamment la violence domestique.

Tout en saluant la signature de la convention d’Istanbul par l’Union européenne le 13 juin 2017, les députés regrettent que, six ans plus tard, l’Union n’ait toujours pas ratifié la convention à cause du refus de quelques États membres au Conseil de l’Union européenne. Le Conseil est exhorté à ne pas retarder plus longtemps l’adhésion de l’Union à la convention d’Istanbul, laquelle devrait être considérée comme la norme minimale à suivre pour éradiquer la violence fondée sur le genre.

Droit à un avortement sûr et légal

Condamnant fermement toutes les formes de violence fondée sur le genre à l’égard des femmes et des filles et des personnes LGBTIQ+, le Parlement a affirmé que le refus d’accorder des services liés à la santé et aux droits en matière de sexualité et de procréation, y compris le droit à des solutions d’avortement licites et sans risques, constitue une forme de violence à l’encontre des femmes et des filles.

Les députés ont condamné le fait que, dans certains États membres, les droits sexuels et génésiques des femmes, en particulier le droit à un avortement sûr et légal, sont constamment menacés. Ils ont salué les initiatives de certains États membres, comme la France, visant à inscrire le droit à l’avortement dans leur Constitution et ont demandé que le droit à un avortement sûr et légal soit inscrit dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Assurer la bonne application de la Convention

Le Parlement a invité la Commission à veiller à ce que la convention soit pleinement intégrée au cadre législatif et politique de l’Union et a demandé à tous les États membres de veiller à la pleine application, dans leurs lois et leurs politiques nationales, des mesures découlant de la convention. Il a condamné les tentatives de certains États membres de révoquer les mesures déjà prises afin d’appliquer la convention d’Istanbul et de lutter contre la violence à l’égard des femmes et la violence intrafamiliale.

Il est demandé à la Commission et aux États membres de faire référence à la définition de la violence à l’égard des femmes donnée par la convention d’Istanbul dans la législation pertinente.

Propositions concrètes pour la mise en œuvre

Le Parlement a demandé à la Commission et aux États membres de :

- traiter de manière appropriée, par des moyens législatifs et non législatifs, des questions telles que les droits de garde et de visite des enfants, les conséquences civiles des mariages forcés, la traque furtive, le déni des droits et le refus d’accès aux soins de santé en matière de procréation, et à protéger les victimes;

- mettre en œuvre des mesures préventives, y compris une prévention primaire renforcée de la violence sexiste à l’école, ainsi qu’une approche des services d’aide aux victimes et des mesures de protection pour les rescapés, telles qu’une aide financière, un soutien psychologique, des lignes d’assistance téléphonique, des refuges, l’accès au logement social et la possibilité de prendre congé pour faire face à une situation de violence intrafamiliale, ainsi que des mesures permettant d’aider les victimes à continuer de vivre à leur domicile en toute sécurité;

- mener des campagnes d’information sur la convention d’Istanbul et veiller à la mise en place de formations, de procédures et de lignes directrices appropriées, sensibles à la dimension de genre, ainsi que des mesures de soutien et de protection spécifiques, axées sur les victimes, à l’intention de tous les professionnels concernés, y compris ceux des forces de l’ordre, de la magistrature et du parquet.

Désinformation

Les députés ont condamné l’opposition croissante à la convention d’Istanbul dans certains États membres ainsi que les tentatives visant à dénigrer la convention et son incidence positive sur l’éradication de la violence fondée sur le genre. Tout en condamnant la tentative polonaise de se retirer de la convention d’Istanbul, le Parlement invité les autorités nationales à lutter contre la désinformation et à mener des campagnes de sensibilisation pour dissiper tout doute sur la convention et sur les avantages qu’elle comporte pour la société dans son ensemble.

Conclure d’urgence la ratification

Le Parlement a souligné qu’il n’existe aucun obstacle juridique empêchant le Conseil de procéder à la ratification de la convention, étant donné qu’une majorité qualifiée suffit pour l’adopter. Il a invité une nouvelle fois le Conseil à conclure d’urgence la ratification de la convention d’Istanbul par l’Union, sur la base d’une large adhésion et sans aucune restriction, et à encourager tous les États membres à la ratifier. Les six États membres restants ne l’ayant pas encore fait - à savoir la Bulgarie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Slovaquie et la Tchéquie - sont appelés à ratifier la convention sans délai.

Les députés invitent la Commission à élaborer une stratégie intégrale de l’Union sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence fondée sur le genre, stratégie qui devrait inclure un plan complet de prévention et de lutte contre toutes les formes d’inégalités entre les hommes et les femmes et intégrer toutes les initiatives de l’Union visant à éradiquer la violence à l’égard des femmes.

Le Conseil est invité à activer la clause passerelle, en adoptant à l’unanimité une décision définissant la violence fondée sur le genre comme l’un des domaines de criminalité énumérés à l’article 83, paragraphe 1, du traité FUE.