Le Conseil a adopté une position commune sur le projet de règlement concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), et instituant une agence européenne des produits chimiques. Le texte de la proposition a été largement remanié au cours des discussions qui ont eu lieu au sein du Conseil ces deux dernières années. Etant donné la grande convergence de vues apparue entre le Conseil et le Parlement européen, la position commune intègre en totalité, en partie ou dans leur principe près de 200 amendements adoptés par le Parlement en première lecture.
Considérants :
La position commune intègre 20 amendements du Parlement européen environ, qui suivent l'approche adoptée dans le reste du texte (articles et annexes). En outre, elle intègre dans leur esprit les amendements qui visent à : introduire un "devoir de prudence" pour les fabricants, importateurs et utilisateurs en aval (l’article 1er modifié énonce que les substances chimiques ne peuvent avoir des effets nocifs pour la santé humaine et l’environnement) ; à insister sur la compétitivité et la capacité d'innovation de l'industrie chimique européenne ainsi que sur la compatibilité du règlement REACH avec les exigences de l'OMC ; à accorder une attention spéciale aux petites et moyennes entreprises (PME). Un nouveau considérant souligne la nécessité de tenir particulièrement compte de l'incidence potentielle de REACH sur les PME et d'éviter toute discrimination à leur égard.
Champ d'application et définitions :
La position commune reprend 15 amendements du Parlement. Le Conseil a remanié et clarifié le champ d'application du règlement et a précisé certaines exemptions (par exemple pour les déchets, les substances utilisées dans les denrées alimentaires ou aliments pour animaux et, dans certains cas, les intérêts de la défense). En outre, les exemptions d'enregistrement pour les substances énumérées à l'annexe IV n'ont pas été modifiées (à l'exception de la pâte de cellulose qui a été ajoutée) mais elles seront réexaminées par la Commission, en même temps que les annexes I et V, douze mois après l'entrée en vigueur de REACH. Les catégories d'exemptions d'enregistrement énumérées à l'annexe V ont été modifiées, en particulier pour ce qui est des substances naturelles telles que les minerais, les concentrés de minerai, les minéraux et les ciments dits "clinkers".
Pour ce qui est de l'amendement concernant les alliages et leur définition en tant que préparations spéciales, le Conseil se félicite de l'intention de la Commission d'élaborer, en étroite collaboration avec les États membres et les acteurs concernés, des orientations en matière d'évaluation des préparations spéciales.
Enregistrement :
La position commune intègre 15 amendements du Parlement. Elle prévoit que tous les fabricants ou importateurs d'une même substance soumettent conjointement certaines parties du dossier d'enregistrement. Des possibilités spécifiques de dispense de cette obligation sont introduites en cas de divergence d'opinion entre les déclarants sur la sélection des données, au cas où une soumission conjointe entraînerait des coûts disproportionnés ou un échange d'informations commercialement sensibles. Les substances destinées à être rejetées par les produits seront en principe traitées de la même manière que toutes les autres substances et enregistrées conformément aux périodes applicables aux substances bénéficiant d'un régime transitoire, à savoir 3, 6 et 11 ans. En outre, les producteurs et les importateurs de produits notifieront les substances qui remplissent les critères d'autorisation si elles sont contenues dans ces produits dans des quantités dépassant un certain niveau et si l'exposition de l'être humain et de l'environnement ne peut être exclue pendant tout le cycle de vie. Lorsque l'agence estime qu'il y a des raisons de soupçonner qu'une substance est rejetée par les produits et que ce rejet représente un danger pour la santé humaine ou l'environnement, elle peut prendre des décisions exigeant des producteurs ou des importateurs de ces produits qu'ils soumettent une demande d'enregistrement.
En ce qui concerne les informations devant être soumises lors de l'enregistrement, les déclarants devraient pouvoir librement utiliser les catégories d'utilisation et d'exposition sur une base volontaire. Il serait possible de prévoir sur une base volontaire l'assurance de la qualité du dossier d'enregistrement par un évaluateur choisi par le déclarant pour son expérience en la matière.
Les informations soumises en fonction des quantités doivent être les suivantes:
- Substances en petites quantités bénéficiant d'un régime transitoire (celles fabriquées ou importées dans des quantités comprises entre 1 et 10 tonnes par producteur ou par importateur et par an): lorsqu'une substance bénéficiant d'un régime transitoire et se situant dans cette fourchette de quantité remplit des critères simples qui la font apparaître comme potentiellement préoccupante, l'ensemble des informations prévues à l'annexe VII doit être fourni par le déclarant. Dans les autres cas, seules les informations physicochimiques énumérées à la section 5 de l'annexe VII, accompagnées des informations dont dispose le déclarant, doivent être fournies. Étant donné que l'annexe VII s'appliquera seulement à un nombre limité de substances dans cette fourchette de quantité, la position commune inclut des exigences supplémentaires en matière d'informations concernant la toxicité aiguë, la biodégradation et la toxicité aquatique.
- Un seul essai de toxicité pour la reproduction est proposé pour l'annexe VIII (exigences supplémentaires en matière d'informations standard pour les substances fabriquées ou importées en quantités égales ou supérieures à 10 tonnes par producteur ou par importateur et par an).
- Aucun changement important n'a été introduit en ce qui concerne les annexes IX et X (exigences supplémentaires en matière d'informations standard pour les substances fabriquées ou importées en quantités égales ou supérieures à 100 et 1.000 tonnes par producteur ou par importateur et par an respectivement). Dans un délai de 18 mois à compter de la date d'entrée en vigueur, la Commission adoptera des critères définissant ce qui constitue une justification suffisante pour renoncer à certains tests visés aux annexes VIII à X sur la base du ou des scénarios d'exposition élaborés dans le cadre du rapport sur la sécurité chimique.
En ce qui concerne les substances bénéficiant d'un régime transitoire, la position commune prévoit l'inclusion dans la première étape de l'enregistrement des substances qui sont potentiellement persistantes, bioaccumulables et toxiques (PBT) sur la base des critères de classement actuels et qui sont fabriquées ou importées dans des quantités supérieures à 100 tonnes par producteur ou par importateur et par an.
En ce qui concerne les amendements qui visent à réduire le nombre d'essais sur des animaux, le Conseil souscrit entièrement à l'objectif recherché par ces amendements mais estime qu'il est pris en compte dans le cadre de l'article 13, paragraphe 2, qui dispose que les méthodes d'essai doivent être révisées, le cas échéant, d'améliorer, de réduire ou de remplacer les essais sur les animaux.
Partage des données et prévention des essais inutiles :
La position commune intègre 30 amendements du Parlement. Elle prévoit que les déclarants potentiels ont l'obligation de partager les informations acquises à l'occasion d'essais sur des animaux vertébrés. Les informations provenant d'essais autres que ceux effectués sur des animaux doivent, quant à elles, être partagées si un autre déclarant potentiel le demande. En règle générale, le partage des coûts sera approuvé par les déclarants potentiels eux mêmes d'une manière équitable, proportionnée et non discriminatoire en particulier en ce qui concerne les PME. Dans les cas où la question du partage des coûts ne peut être résolue par les déclarants potentiels, une disposition claire et sans équivoque répartissant les coûts de manière égale a été incluse dans la position commune. Afin de faciliter le partage de données, une phase unique d'enregistrement préalable commençant 12 mois après l'entrée en vigueur du règlement et s'achevant 18 mois après celle-ci a été mise en place.
La position commune n'intègre pas l'amendement selon lequel tout résumé d'études ou résumé d'études consistant ne serait gracieusement communiqué que 15 ans après sa soumission dans le cadre de la procédure d'enregistrement. Elle n'intègre pas les amendements selon lesquels les coûts devraient être répartis selon le volume de production.
Information à l'intérieur de la chaîne d'approvisionnement :
La position commune intègre 12 amendements du Parlement. Le Conseil a inclus dans le texte une exigence supplémentaire relative aux fiches de données de sécurité qui doivent être fournies pour les substances persistantes, bioaccumulables et toxiques ou très persistantes et très bioaccumulables ainsi que pour certaines préparations contenant ces substances. Le rôle des distributeurs pour assurer les flux d'informations à l'intérieur de la chaîne d'approvisionnement a été précisé. Quelques modifications ont été apportées à l'annexe I (Dispositions générales afférentes à l'évaluation des substances et à l'élaboration des rapports sur la sécurité chimique) et à l'annexe II (Guide d'élaboration des fiches de données de sécurité).
La position commune n'intègre pas l'amendement prévoyant que les producteurs devraient donner aux travailleurs accès aux informations fournies à l'intérieur de la chaîne d'approvisionnement. De même, l'amendement concernant l'obligation pour un fournisseur de donner accès aux informations sur les substances vendues n'a pas été retenu.
Utilisateurs en aval :
La position commune précise le rôle des distributeurs et des utilisateurs en aval dans la chaîne d'approvisionnement, notamment ce que devraient faire les fabricants, les importateurs ou les utilisateurs en aval des informations sur les utilisations identifiées fournies par les distributeurs et/ou les utilisateurs en aval. Elle précise également que les utilisateurs en aval peuvent participer à un forum d'échange d'informations sur les substances (FEIS). Enfin, elle précise dans quels cas les utilisateurs en aval devraient procéder à une évaluation de la sécurité chimique (ESC) et élaborer un rapport sur la sécurité chimique (RSC), notamment en fixant un seuil minimum d'une tonne, en dessous duquel un tel rapport n'est pas requis. Le Conseil a supprimé l'annexe I ter (Évaluations de la sécurité chimique pour les préparations).
Évaluation.
La position commune intègre 37 amendements du Parlement Le Conseil a adopté l'approche ci-après :
- En ce qui concerne l'évaluation des dossiers, la responsabilité (de la vérification des propositions d'essais et les contrôles de la conformité) a été transférée à l'agence.
- Un nombre minimal de contrôles de conformité devrait être effectué. Il est fixé, par la législation, à 5 % des dossiers reçus. Ces contrôles devraient se concentrer (pas exclusivement toutefois) sur les dossiers faisant apparaître des désaccords entre les déclarants d'une même substance lorsque les dossiers concernent une substance inscrite dans le plan d'évaluation continue de l'UE ou, pour les substances en quantités comprises entre 1 et 10 tonnes, lorsque la totalité des informations prévues à l'annexe VII n'ont pas été soumises.
- En ce qui concerne l'évaluation des substances, un plan continu unique au niveau de l'UE sera élaboré par l'agence avec la participation des États membres.
- L'agence est chargée de coordonner le processus d'évaluation des substances en s'en remettant aux autorités compétentes des États membres pour la réalisation des évaluations. Ces autorités sont libres, le cas échéant, de recourir à des établissements spécialisés pour réaliser l'évaluation.
La position commune n'intègre pas les amendements qui donneraient à l'agence la responsabilité générale de l'évaluation des substances ni l’amendement qui concerne une consultation obligatoire du Centre européen pour la validation de méthodes alternatives (ECVAM) avant de décider de procéder à des essais sur des animaux.
Autorisation :
La position commune intègre 18 amendements du Parlement. Divers amendements ont été intégrés en vue de renforcer l'autorisation tout en veillant à ce que les dispositions soient applicables. Le champ d'application de l'autorisation n'a pas été modifié mais il a été précisé. Pour une plus grande transparence et afin de faciliter la planification au sein du secteur, une liste de substances remplissant les critères d'autorisation sera publiée par l'agence. Les substances seront identifiées et placées sur la liste à l'issue d'une période de consultation publique. Les autorisations seront octroyées lorsque les risques liés à l'utilisation d'une substance sont dûment contrôlés ou lorsqu'il est démontré que les avantages socio-économiques l'emportent sur les risques qu'entraîne l'utilisation de la substance pour la santé humaine ou l'environnement, et lorsque aucune substance ou technologie de remplacement appropriée n'est disponible.
Afin d'encourager la mise au point de solutions de remplacement plus sûres, toutes les demandes d'autorisation comprendront une analyse des solutions de remplacement disponibles, examinant les risques qu'elles comportent, ainsi que leur faisabilité technique et économique. L'agence étudiera la nécessité de limiter, au niveau européen, l'utilisation d'une substance contenue dans des articles au moment de l'inclusion de cette substance dans l'annexe XIV.
La position commune n'intègre pas les amendements qui rendraient obligatoire le remplacement de substances au cas où des solutions de remplacement appropriées seraient disponibles.
Restrictions :
La position commune intègre 7 amendements du Parlement. Le texte prévoit une période de transition après l'entrée en vigueur de REACH pour permettre aux États membres de mettre à jour leur législation nationale en matière de restrictions applicables à la commercialisation et à l'utilisation des produits chimiques. En outre, des précisions ont été apportées en ce qui concerne les annexes XV (dossiers) et XVI (analyse socio-économique).
Redevances et droits.
Un nouveau titre précise que les redevances et droits devant être perçus en vertu du règlement sont définis dans un règlement de la Commission. Ce nouveau titre comprend des principes applicables à ces redevances et droits, notamment le fait que certaines des recettes de l'agence seront transmises aux autorités compétentes des États membres chargées d'effectuer des activités dans le cadre de REACH. Dans tous les cas, des redevances réduites sont fixées pour les PME.
Agence.
La position commune intègre 13 amendements du Parlement. Elle apporte plusieurs précisions, notamment sur les points suivants : chaque État membre disposera d'un représentant dans le conseil d'administration ; les procédures de recours ont été clarifiées ; il est spécifié que les règles régissant l'emploi des langues au sein de l'agence devrait être conforme au règlement 1/58 ; la référence au siège de l’Agence dans le règlement REACH est supprimée; l'agence sera financée par les contributions du budget communautaire, les redevances versées par le secteur et les contributions volontaires des États membres.
La position commune n'intègre aucun amendement indiquant que l'agence devrait être investie de la responsabilité générale de la gestion de REACH ni les amendements mettant l'accent sur le fait que l'agence est la principale autorité dans le domaine de REACH.
Classification et étiquetage.
La position commune étend au cas par cas la possibilité d'une classification et d'un étiquetage harmonisés dans toute l'UE pour d'autres effets que ceux proposés par la Commission. Dans l'attente de la proposition de la Commission relative à un système mondial harmonisé de classification et d'étiquetage des produits chimiques (GHS) et conformément à la proposition de la Commission sur REACH, il n'a pas été jugé approprié d'intégrer les amendements du Parlement.
Informations.
Ce titre a été considérablement modifié afin d'aligner ses dispositions sur celles du règlement 1049/2001/CE relatif à l'accès du public aux documents. La position commune prévoit qu'il convient que le conseil d'administration de l'agence fixe les modalités d'accès aux informations détenues par l'agence conformément aux dispositions de la convention d'Aarhus et du règlement 1049/2001. La position commune intègre, dans son principe, l'amendement selon lequel les États membres, l'agence et la Commission soumettront tous les cinq ans un rapport sur l'expérience acquise. Elle intègre également dans son principe l'amendement selon lequel l'agence publiera des informations non confidentielles sur son site internet.
Autorités compétentes.
Conformément au principe de l'amendement du Parlement, le texte sur les orientations relatives à la manière d'informer le public des risques liés aux substances a été précisé dans la position commune. Le Conseil a en outre retenu le principe de l'amendement concernant la fourniture d'assistance et de conseils particuliers aux PME.
Exécution.
Le régime de sanctions que les États membres doivent mettre en place a été clarifié. La position commune n'intègre pas les amendements qui confient au forum institué au sein de l'agence la mission d'élaborer des lignes directrices concernant l'exécution du règlement. Cependant, le forum élaborera des stratégies d'exécution et identifiera les meilleures pratiques dans ce domaine. D’autres amendements n’ont pas été intégrés vu que les États membres ne jugent pas utile d'associer directement l'agence à la mise en œuvre du règlement ni à l'élaboration des orientations concernant les sanctions qui doivent être prises à la suite d'une violation de ce dernier.
Dispositions transitoires et finales.
La position commune reprend le principe de l'amendement selon lequel les États membres ont le droit de maintenir des mesures plus strictes concernant la protection des travailleurs, de la santé humaine et de l'environnement, pour autant que ce domaine ne fasse pas l'objet d'une harmonisation dans le cadre du règlement REACH. En ce qui concerne l'amendement relatif aux mesures préalables à l'établissement de l'agence, la Commission et le Conseil se sont engagés, dans une déclaration commune, à fournir le soutien nécessaire à la mise en place de l'agence.
Annexes.
Le Conseil a introduit plusieurs modifications aux annexes en tenant compte de 36 amendements du Parlement européen.