CON/2011/0013  
${summary.referenceAndDate}  

AVIS DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE sur la réforme de la gouvernance économique dans l’Union européenne.

Le 29 novembre 2010, la Banque centrale européenne (BCE) a reçu une demande de consultation de la part du Conseil portant sur un ensemble de six propositions de mesures visant à renforcer la gouvernance économique.

La BCE estime que les propositions de la Commission représentent un élargissement et un renforcement importants du cadre de surveillance économique et budgétaire de l’UE et constituent une avancée sur la voie d’une amélioration de la surveillance économique et budgétaire dans la zone euro. Cependant, elles sont en deçà du nécessaire saut qualitatif en matière de surveillance de la zone euro qui est requis pour en assurer le bon fonctionnement.

La BCE invite le législateur européen et les États membres à tirer parti du processus législatif en cours pour renforcer le régime de la gouvernance économique dans toute la mesure permise par les traités actuels. De surcroît, il convient que l’UE envisage à un moment donné une réforme des traités afin de renforcer encore la gouvernance économique.

La BCE formule les observations suivantes :

Insuffisance du degré d’automaticité : la BCE estime que les propositions de la Commission présentent un défaut essentiel en ce qu’elles n’assurent pas un degré d’automaticité suffisant. Dans cet esprit, elle suggère que le législateur européen envisage de revenir sur les modifications apportées en 2005 au pacte de stabilité et de croissance, qui ont renforcé la marge de manœuvre accordée aux États membres s’agissant du respect des obligations que le pacte leur impose.

La BCE suggère de réexaminer, dans les propositions de la Commission, plusieurs éléments qui contribuent à l’insuffisance du degré d’automaticité, notamment:

  • dans le cadre du projet de procédure concernant la surveillance budgétaire, la possibilité, pour les États membres, de s’écarter de la trajectoire d’ajustement qui doit conduire à la réalisation de l’objectif budgétaire à moyen terme en cas de grave récession économique de nature générale ;
  • en ce qui concerne la mise en œuvre budgétaire, la possibilité pour le Conseil de réviser, en cas de circonstances économiques exceptionnelles ou sur demande motivée adressée par l’État membre concerné, les dépôts portant intérêt, les dépôts ne portant pas intérêt et les amendes qu’il impose ;
  • enfin, l’obligation pesant sur la Commission, de tenir compte des débats au sein du Conseil, comme condition de la poursuite par la Commission de toute procédure.

De plus, la BCE recommande d’accroître le degré d’automaticité en introduisant au Conseil, à chaque fois que cela est possible, le vote à la majorité qualifiée inversée.

Mesures politiques supplémentaires : la BCE préconise d’introduire, dans le cadre du projet de procédure concernant la surveillance budgétaire et du projet PDE (procédure concernant les déficits excessifs), des mesures supplémentaires consistant notamment à mettre à la charge des États membres des obligations de déclaration et à celle du Conseil l’obligation de présenter des rapports au Conseil européen. De surcroît, il convient que la Commission effectue, des missions dans les États membres de la zone euro ou participant au MCE II, qui ne respectent pas les recommandations du Conseil, en liaison avec la BCE, si celle-ci l’estime approprié.

Évaluation du respect de la valeur de référence en matière de taux d’endettement public : s’il est justifié que la Commission examine, lorsqu’elle prépare un rapport sur l’existence d’un taux d’endettement excessif, tous les facteurs pertinents, il convient néanmoins qu’elle ne tienne compte de tous ces facteurs que si les prévisions de la Commission prévoient une diminution du taux d’endettement public au cours des trois années à venir. Les éventuelles circonstances atténuantes pertinentes ne devraient jamais conduire à conclure qu’un État membre n’a pas un taux d’endettement excessif lorsque son taux d’endettement dépasse la valeur de référence et qu’il continue de croître. Enfin, quel que soit le taux d’endettement, il convient de respecter le principe selon lequel le critère du déficit doit être proche de la valeur de référence et temporaire.

Procédure concernant la surveillance budgétaire : la BCE recommande que:

  • l’évaluation des progrès suffisants vers l’objectif à moyen terme s’appuie sur un examen global prenant pour référence le solde structurel et comportant une analyse des dépenses déduction faite des recettes sensibles aux mesures discrétionnaires;
  • normalement, le taux de croissance des dépenses publiques ne dépasse pas un taux de croissance à moyen terme du PIB potentiel établi sur la base de projections et servant de référence (PIB);
  • le taux de croissance à moyen terme du PIB potentiel établi sur la base de projections et servant de référence soit calculé selon la méthodologie commune utilisée par la Commission;
  • et qu’il soit tenu compte de l’incidence de la structure de la croissance économique sur la croissance des recettes.

Procédure de surveillance macroéconomique : la BCE est favorable à l’introduction de cette procédure qui comble une importante lacune dans le cadre de la gouvernance économique.  Cette nouvelle procédure doit être particulièrement axée sur les États membres de la zone euro qui connaissent des pertes de compétitivité persistantes et des déficits importants de la balance courante. Il convient que la procédure soit étendue à une liste ouverte de situations que sa mise en œuvre devrait prévenir, via la définition du terme «déséquilibres. De surcroît, les mécanismes de déclenchement de la procédure de surveillance macroéconomique doivent être transparents et efficaces.

Amendes : il convient d’affecter les intérêts accumulés provenant des dépôts non rémunérés et des amendes imposées aux États membres de la zone euro en application des propositions de la Commission au Mécanisme européen de stabilité (MES) qui doit être créé en 2013 et de trouver une solution temporaire appropriée jusqu’à sa création.

Organisme consultatif indépendant : la BCE préconise d’instaurer un organisme consultatif indépendant qui présentera aux institutions de l’Union un rapport annuel sur le respect par le Conseil et la Commission, y compris Eurostat, de leurs obligations au titre des articles 121 et 126 du traité et dans le cadre des procédures faisant l’objet des propositions de la Commission.

Projet de directive sur les cadres budgétaires :

  • la BCE estime que tous les États membres doivent être tenus d’assurer de manière indépendante un suivi, une analyse et une validation des éléments fondamentaux de leurs cadres budgétaires. Les États membres doivent pouvoir élaborer des cadres budgétaires plus stricts, par exemple en adoptant une réglementation interdisant les déficits structurels des administrations publiques au-delà d’un certain seuil du PIB ;
  • la BCE recommande de souligner l’importance de la transparence tant en ce qui concerne les prévisions nationales que leurs méthodes de préparation. Par ailleurs, les prévisions de la Commission doivent jouer un rôle central dans l’étalonnage des prévisions nationales ;
  • pour être efficace, la directive devrait mentionner expressément le coût qu’aura pour les autorités nationales le non-respect des règles budgétaires chiffrées, à savoir les mesures non financières et les sanctions financières qui en découleront au niveau national ; elle devrait prévoir l’obligation de rembourser à moyen terme les dettes dépassant les montants tolérés par le cadre budgétaire ;
  • en ce qui concerne les statistiques, la BCE est favorable à une ponctualité et à une fiabilité renforcées des comptes annuels et trimestriels des administrations publiques communiqués à la Commission en application du règlement (CE) n° 2223/96 relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans la Communauté. S’agissant des statistiques qui seront prévues dans le cadre de la future législation, la BCE relève qu’il revient au législateur européen de prendre des mesures pour rendre juridiquement contraignant le «code de bonnes pratiques de la statistique européenne».

Enfin, il convient de renforcer encore les pouvoirs d’Eurostat en matière d’évaluation et de suivi des notifications produites dans le cadre de la PDE, en mettant l’accent sur les mesures proactives, afin d’améliorer la qualité des statistiques du gouvernement.