Le Parlement européen a adopté une résolution sur la chaîne de distribution des intrants agricoles (structures et implications).
Actuellement l'agriculture de l'Union dépend fortement des importations d'intrants, principalement des combustibles fossiles, mais également des aliments pour animaux et des minéraux rares servant d'amendements pour sol, tels que le phosphate, ce qui la rend vulnérable par rapport aux augmentations des prix. Les prix des intrants devraient encore augmenter en raison de la raréfaction des ressources, de la demande croissante dans les économies émergentes et des politiques qui rendent difficile l'accès des agriculteurs de l'Union à des aliments pour animaux moins onéreux disponibles sur le marché mondial.
Forte volatilité des prix : la résolution note que la forte volatilité des prix des matières premières agricoles et des intrants agricoles a nourri linsécurité des revenus agricoles et des investissements à long terme des agriculteurs, un phénomène dautant plus marqué dans les régions les plus isolées, montagneuses, insulaires et ultrapériphériques. Selon Eurostat, les coûts des intrants des agriculteurs de lUnion ont grimpé en moyenne de près de 40% entre 2000 et 2010, contre moins de 25% pour les prix au départ de la ferme. Au cours de cette décennie, laugmentation des coûts des intrants a atteint 60% pour lénergie et les lubrifiants, près de 80% pour les engrais synthétiques et les amendements pour sol, plus de 30% pour les semences et les stocks de plantation et près de 13% pour les produits phytosanitaires.
Transparence et respect des règles de concurrence : le Parlement demande à la Commission et aux États membres daccroître la transparence des prix des intrants et de veiller à ce que les règles de concurrence soient respectées et appliquées en amont et en aval de la chaîne de commercialisation des produits alimentaires. Il demande un contrôle plus approfondi et une meilleure analyse, tant au niveau de lUnion quau niveau mondial, des principes économiques fondamentaux qui expliquent laugmentation des prix de lalimentation.
La Commission est notamment invitée à :
- préciser son analyse des raisons sous-jacentes aux fluctuations extrêmes du marché et à chercher à clarifier davantage les interactions entre la spéculation et les marchés agricoles, ainsi quentre les marchés de lénergie et les prix des denrées alimentaires de base ;
- promouvoir des pratiques agronomiques plus efficientes et une gestion des ressources agricoles plus efficace et durable, en vue de mettre en place une agriculture stable et productive, de réduire les coûts des intrants ainsi que le gaspillage de nutriments,
- mieux évaluer limpact de la législation européenne sur la durabilité et la compétitivité de lagriculture de lUnion.
Le Parlement demande aux autorités nationales et européennes de réagir aux abus de position dominante de certains négociants de lindustrie agroalimentaire, du commerce alimentaire de détail et du commerce dintrants, notamment dans le secteur des engrais. La Commission est invitée à lancer une étude sur les différences dapproche entre les 27 autorités nationales de la concurrence et les politiques existantes et à encourager des solutions qui impliquent la participation de tous les partenaires de la chaîne de production alimentaire et qui empêchent les positions dominantes de lune ou de plusieurs parties de la chaîne dintrants ou de production. Les députés estiment quil convient détablir un système de contrôle effectif de ces pratiques, par voie administrative ou judiciaire, ainsi quun système dévaluation et de suivi des États membres par la Commission, et de fixer des sanctions suffisamment dissuasives qui soient appliquées en temps utile.
La résolution plaide pour que la nouvelle PAC intègre des mesures de soutien spécifiques pour une gestion meilleure et plus efficace des ressources et des pratiques durables susceptibles de réduire lutilisation et les coûts des intrants et daméliorer la capacité des agriculteurs à sadapter à la vulnérabilité à la volatilité des prix, notamment des mesures pour soutenir les chaînes courtes alimentaires et dintrants. Se réjouissant de l'importance accrue accordée par la Commission à la bioéconomie de l'Europe, les députés demandent quune partie substantielle du prochain programme-cadre de recherche soit consacrée à la recherche et au développement en matière d'utilisation et de gestion efficiente des intrants et en matière d'amélioration de lefficacité agronomique.
Énergie : le Parlement demande à la Commission et aux États membres de promouvoir les investissements dans les économies dénergie et la production dénergie renouvelable dans le cadre de projets de partenariat au niveau de lexploitation ou au niveau local (énergie éolienne, énergie solaire, biomasse, biogaz, géothermie, etc.) mis en place par des intervenants locaux et en mettant particulièrement laccent sur lutilisation des déchets et des sous-produits.
La Commission est invitée à :
- reconnaître le lisier traité comme un substitut dengrais synthétique dans la directive sur les nitrates, en vue de sa valorisation en tant que substance énergétique;
- sassurer que les mesures publiques de soutien à la biomasse et aux biocarburants, y compris au biogaz, nentraînent pas de concurrence insoutenable des ressources entre la production de denrées alimentaires et la production dénergie, qui doivent être organisées de manière durable;
- contribuer à la création dun nouveau revenu pour les agriculteurs en favorisant lintégration de lénergie et de la chaleur produites à partir des sources dénergies renouvelables dans les systèmes et réseaux énergétiques privés et publics.
Amendements pour sol et produits phytosanitaires : la résolution demande de prévoir, dans la réforme de la PAC après 2013, des mesures efficaces et incitatives, telles que la diversification des cultures, notamment une plantation de légumes et une rotation des cultures adaptées aux conditions locales, compte tenu de leur contribution positive à l'atténuation du changement climatique, à la qualité du sol et de l'eau et à la capacité des agriculteurs à réduire leurs coûts de production.
Les députés demandent à la Commission et au Conseil :
- d'ajouter les investissements dans l'agriculture de précision à une liste facultative de mesures écologiques de l'Union qui feront l'objet de récompenses dans le cadre de la PAC ;
- de promouvoir le recyclage des nutriments (surtout le phosphate et lazote) à partir de flux de déchets, sous réserve de recherches approfondies sur lutilisation qui peut en être faite, du traitement adéquat des substances potentiellement nocives et de contrôles rigoureux ;
- de mieux évaluer limpact de la perte de produits phytosanitaires sur la compétitivité et la durabilité de lagriculture européenne.
Alimentation animale : la résolution souligne la nécessité dintroduire dans la nouvelle PAC des mesures et des instruments pour soutenir les agriculteurs qui cultivent des protéagineux, dautant plus que ceci peut permettre non seulement de réduire le déficit de lUnion en protéagineux ainsi que la volatilité des prix, mais aussi daméliorer les pratiques agricoles et de renforcer la fertilité des sols.
Les députés soulignent que, si laugmentation de la production des cultures de protéagineux présente certains avantages, il est peu probable quelle ait un impact significatif sur les importations dalimentation animale provenant de l'extérieur de l'Union. Ils estiment donc que dautres voies doivent être explorées, à court terme, pour remédier au déficit de lUnion en protéines végétales et soulignent, en particulier, le rôle fondamental des importations de soja. Ils demandent une nouvelle fois à la Commission de soumettre rapidement au Parlement et au Conseil un rapport sur les options qui permettraient d'augmenter la production de protéagineux à l'intérieur de l'Union.
Semences : le Parlement demande à la Commission et aux États membres :
- de conserver, dans le cadre de la refonte à venir du règlement (CE) n° 2100/94 instituant un régime de protection communautaire des obtentions végétales, la possibilité pour les agriculteurs d'utiliser des semences produites et transformées dans leur exploitation, compte tenu des avantages économiques, culturels et environnementaux que cette pratique peut représenter pour la biodiversité agricole;
- de soutenir les projets de recherche qui étudient l'obtention de variétés végétales qui conservent leurs caractéristiques à long terme, tout en promouvant des mesures destinées à stimuler la culture de plantes fourragères locales telles que le lin, le triticale, les fèves (Vicia Lathyroides), etc.
La Commission est invitée à envisager la création dune banque européenne de semences, afin de conserver et de préserver la variété génétique des plantes, de lutter contre la perte de biodiversité et de lier la diversité des cultures au patrimoine culturel des États membres.
Prix des terres et rente foncière : la Commission est invitée à mener une étude sur limpact de la location de terres et de laugmentation des coûts liés à lachat et à la location de terres sur les secteurs agricoles des États membres.
La résolution souligne que les droits au paiement unique par exploitation, lorsquils sont fondés sur des valeurs historiques ou quand ils sont échangeables sans terres, peuvent être rachetés au prix fort par des investisseurs ou des spéculateurs afin de sassurer un revenu constant plutôt que de pratiquer une activité agricole active. Les députés demandent à la Commission, au Parlement, aux États membres et aux régions de veiller à ce que la réforme de la PAC réponde à ces problèmes de manière satisfaisante et que les droits au paiement soient accessibles à tous les agriculteurs à des fins de production active.
Eau : le Parlement invite la Commission à travailler, dans le cadre de la réforme de la PAC et de la directive-cadre sur leau, en faveur de meilleurs systèmes dirrigation, de drainage et daccumulation des eaux destinées à lagriculture, qui utilisent l'eau de manière plus efficiente et qui permettent d'améliorer les capacités demmagasinage des eaux dans le sol, la récupération de leau dans les zones arides et son évacuation dans les zones humides.
La Commission est invitée à élaborer des solutions pour le problème du drainage. Les députés attirent, à ce sujet, l'attention sur la contribution positive de l'agriculture de précision en matière d'utilisation de l'eau (grâce à la surveillance par GPS de l'état des sols et aux prévisions climatiques) et demandent que les investissements dans ces solutions innovantes puissent être couverts par les options écologiques de la future PAC. Ils plaident également pour que la formation des agriculteurs en gestion efficiente des eaux, en drainage et en irrigation soit davantage soutenue.