Résolution sur les déséquilibres de la chaîne d'approvisionnement alimentaire  
2011/2904(RSP) - 19/01/2012  

Le Parlement européen a adopté une résolution sur les déséquilibres de la chaîne d'approvisionnement alimentaire.

Le texte adopté en plénière avait été déposé en tant que résolution commune par les groupes PPE, S&D, ALDE, Verts/ALE et GUE/NGL.

La résolution répond à une communication de la Commission intitulée "Une chaîne d'approvisionnement alimentaire plus performante en Europe" (COM(2009)0591). Elle rappelle que la chaîne d'approvisionnement alimentaire, l'agriculture, le secteur agroalimentaire et la distribution représentent 7% du total des emplois dans l'Union européenne et génèrent 1.400 milliards EUR de revenus par an, soit plus que tout autre secteur manufacturier dans l'Union, et que dans la chaîne d'approvisionnement alimentaire, la part de la valeur ajoutée agricole a chuté, passant, dans l'Union à 25, de 31% en 1995 à 24% en 2005. Dans ce contexte, les députés soulignent que le problème des déséquilibres de la chaîne de distribution alimentaire revêt clairement une dimension européenne et requiert dès lors une solution spécifique au niveau européen.

Soulignant que la solution pouvait passer par l'autorégulation, les députés estiment que ce domaine exige une réglementation et des adaptations de la législation en matière de concurrence. C’est la raison pour laquelle, ils invitent la Commission à proposer une législation communautaire robuste afin de garantir des relations loyales et transparentes entre les producteurs, les fournisseurs et les distributeurs de produits alimentaires, et à mettre en œuvre de manière satisfaisante les dispositions déjà en vigueur.

Les députés constatent que les derniers chiffres d'Eurostat montrent que, depuis 2009, le niveau des revenus agricoles a baissé de 11,6% au niveau européen, tandis que les coûts des intrants des agriculteurs de l'Union ont grimpé en moyenne de près de 40% entre 2000 et 2010. Ils invitent dès lors la Commission et les États membres à poursuivre d'urgence la recherche d'une solution au problème que représente la répartition inégale des bénéfices dans la chaîne alimentaire, en vue tout particulièrement d'assurer aux agriculteurs des revenus adéquats.

Pratiques déloyales : les députés invitent les autorités européennes et nationales de la concurrence et les autres autorités de régulation impliquées dans la production et le commerce à prendre des mesures contre les pratiques d'achat abusives des grossistes et des distributeurs de détail en position dominante, qui placent systématiquement les agriculteurs dans une position d'extrême infériorité dans les négociations. Ils demandent une définition claire, rigoureuse et objective des pratiques abusives et déloyales, en définissant notamment plus précisément les concepts et en les délimitant de façon plus claire, afin de pouvoir les soumettre à une réglementation spécifique, à un contrôle et à des sanctions objectives. Ils proposent à cet effet une liste non exhaustive de pratiques à propos desquelles les producteurs ont exprimé des inquiétudes :

  • en ce qui concerne l’accès aux distributeurs: i) paiement anticipé pour accéder à des négociations ; ii) frais de référencement ; iii) droits d'entrée ; iv) prix du linéaire ; v) imposition de promotions ; vi) retards de paiement ; vii) fixation des taux d'intérêt ; viii) clause du meilleur client.
  • en ce qui concerne les conditions contractuelles déloyales ou modifications unilatérales des clauses du contrat: i) modifications unilatérales et rétroactives des conditions contractuelles ; ii) rupture unilatérale de contrat ; iii) clauses/frais d'exclusivité ; iv) contribution "obligatoire" pour les marques privées ; v) imposition de modèles de contrats types ; vi) pratiques de représailles ; vii) contrats non écrits ; viii) redressement de la marge ; ix) remises impératives ; x) retards de paiement ; xi) paiement obligatoire pour le traitement/l'enlèvement des déchets ; xii) achat groupé/négociation commune ; xiii) enchères inversées ; xiv) conditions de livraison irréalistes ; xv) obligation de recourir à un fournisseur d'emballage ou à un matériel d'emballage (spécifique) ; xvi) paiement destiné à couvrir des promotions (non convenues au préalable) ; xvii) commande excessive d'un produit destiné à la promotion ; xviii) paiement en cas de non-réalisation d'un certain volume de ventes ; ….

Le Parlement réclame également la mise en place d'un cadre destiné à contrôler efficacement ces pratiques, en lançant d’abord une enquête dans l'ensemble du secteur, puis en mettant en place un système d'évaluation et de surveillance opéré par les États membres et coordonné par la Commission, assorti de sanctions dissuasives appliquées avec efficacité et en temps opportun.

En ce qui concerne les paiements, les députés réclament l'amélioration des moyens visant à garantir le respect des délais de paiement, en tenant compte des dispositions de la directive sur les retards de paiement. Ils demandent également la mise en place de nouveaux instruments afin de minimiser et d'harmoniser au niveau européen le délai qui sépare la livraison et la réception effective du paiement par les fournisseurs. Ils soulignent, dans ce contexte, qu'il convient de trouver d'urgence des solutions pour résoudre les problèmes particuliers auxquels sont confrontés les producteurs de denrées périssables ayant une durée de conservation très brève, qui connaissent de sérieux problèmes de liquidités.

Le Parlement appelle également la Commission à :

  • améliorer l'instrument européen de surveillance des prix et à concevoir une interface conviviale, transparente et multilingue qui permette aux consommateurs et aux parties intéressées de comparer les prix des denrées alimentaires à chaque maillon de la chaîne d'approvisionnement alimentaire au sein d'un État membre donné et entre différents États membres ;
  • préciser l'application des règles de concurrence dans l'agriculture, en vue de doter les agriculteurs et leurs organisations interprofessionnelles d'instruments qui leur permettront d'améliorer leur position de négociation ;
  • réaliser une étude approfondie sur les différences d'approche entre les autorités nationales de la concurrence et les politiques existantes et encourager des solutions qui impliquent la participation de tous les partenaires de la chaîne de production alimentaire et qui empêchent les abus de positions dominantes ;
  • lancer une campagne d'information à l'échelle européenne en vue de faire connaître aux agriculteurs leurs droits contractuels et les pratiques contractuelles et commerciales illégales, déloyales et abusives les plus répandues ;
  • mettre en place un médiateur pour le commerce alimentaire qui travaillerait en coopération avec les autorités compétentes en matière de commerce et de concurrence et avec ses homologues dans chaque État membre en vue de coordonner et de partager les informations.

Pour leur part, les États membres devraient promouvoir le développement de meilleures pratiques et/ou de codes de conduite en partenariat avec toutes les parties prenantes, en réunissant les producteurs, l'industrie, les fournisseurs, les détaillants et les représentants des consommateurs, et en tirant le meilleur parti des synergies existantes.