Le Parlement européen a adopté par 341 voix pour, 281 voix contre et 81 abstentions, une résolution sur la stratégie de l'Union européenne pour l'égalité entre les femmes et les hommes après 2015.
Le Parlement rappelle que l'égalité entre les femmes et les hommes est une valeur de base de l'UE et que l'Union se donne pour tâche spécifique de l'intégrer dans toutes ses activités. Il précise quil nest pas possible de rester attaché à des modèles économiques vidés de leur substance, non viables du point de vue environnemental et basés sur une division du travail entre les sexes caduque et dépassée par l'intégration de la femme dans le marché de l'emploi. Il préconise au contraire un nouveau modèle basé sur la connaissance et l'innovation, durable socialement, qui intègre tout l'éventail des capacités des femmes dans le tissu productif.
Cest dans ce contexte quil fait un certain nombre de recommandations générales qui peuvent se résumer comme suit:
- lélaboration dune nouvelle stratégie en faveur des droits des femmes et de l'égalité femmes/hommes en Europe visant à offrir des opportunités égales et à mettre un terme à toutes les discriminations exercées contre les femmes sur le marché du travail, en matière de salaires, de pensions, de prise de décision, d'accès aux biens et services, de conciliation entre vie familiale et vie professionnelle ainsi qu'à toutes les formes de violences faites aux femmes;
- des mesures visant à supprimer les discriminations à l'égard de l'ensemble des femmes dans leur diversité dans le cadre d'une stratégie anti-discrimination plus vaste et à établir une feuille de route distincte pour les personnes LGBTI;
- la prise en compte du cas particulier des femmes handicapées mais aussi des femmes migrantes et appartenant à une minorité ethnique;
- ladoption dune position commune sur la proposition de directive relative à la mise en uvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de conviction, de handicap, d'âge, de sexe ou d'orientation sexuelle, bloquée depuis son adoption par le Parlement en avril 2009;
- le renforcement, par les États membres, du respect de la négociation collective dans le secteur privé et le secteur public, instrument irremplaçable dans le cadre de la réglementation des relations de travail, dans la lutte contre les discriminations salariales et dans la promotion de l'égalité;
- lévaluation de la mise en uvre de la directive 2004/113/CE mettant en uvre le principe de l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l'accès à des biens et services et la fourniture de biens et services;
- la clarification du rôle que l'Union a sur la scène mondiale et dans le cadre du travail avec les États membres, en faveur de l'égalité hommes/femmes, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des frontières de l'Union, au moyen de différentes mesures ciblées et concrètes;
- lintégration de la dimension de genre et de la lutte contre les violences fondées sur le genre dans la politique étrangère, la politique de coopération au développement et la politique commerciale internationale de l'UE avec lappui dinstruments financiers et de ressources humaines suffisantes.
Le Parlement appelle également la Commission et le Conseil à veiller à ce que l'égalité hommes/femmes soit intégrée dans l'ensemble des programmes, actions et initiatives relevant de la stratégie Europe 2020, en prévoyant linclusion dun pilier spécifique de cette politique dans le cadre du Semestre européen.
Il réclame par ailleurs un suivi des données statistiques ventilées par sexe ainsi que des indicateurs d'égalité des sexes dans tous les domaines d'action et à tous les niveaux de gouvernance.
La Commission est également appelée à rédiger la stratégie sous la forme d'un plan d'action concret, incluant des mesures dans les domaine de la lutte contre la violence faite aux femmes, du travail et du temps, du leadership féminin, des ressources financières, de la santé, de la connaissance, de l'éducation et des médias, de la perspective mondiale, ainsi que des mécanismes institutionnels et de l'intégration de la dimension de genre.
Il insiste tout particulièrement sur la nécessité de présenter des propositions législatives afin de renforcer le cadre juridique en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes.
Plus spécifiquement, des actions sont réclamées dans les domaines suivants :
- violence visant les femmes et violence fondée sur le genre : le Parlement réclame, entre autres choses, une approche renforcée des États membres dans le domaine de la prévention et de l'élimination de toutes les formes de violence à l'égard des femmes et des filles ainsi quun acte législatif utilisant la clause passerelle permettant dadopter à l'unanimité une décision ajoutant la violence fondée sur le genre à la liste des crimes énumérés à l'article 83, par. 1, du traité FUE. Le Parlement demande également que 2016 soit proclamée Année européenne de lutte contre la violence à l'égard des femmes et des filles et que la Commission défende le principe de "tolérance zéro" face à la violence faite aux femmes dans ses campagnes de sensibilisation. Il insiste pour que la Commission examine la possibilité que l'UE adhère à la convention d'Istanbul. Il suggère par ailleurs que les États membres favorisent la reconnaissance légale entière du genre souhaité d'une personne, et notamment le changement de nom, de numéro de sécurité sociale et d'autres indicateurs de genre;
- travail et temps : le Parlement insiste sur l'importance de formes de travail plus flexibles afin que les femmes et les hommes puissent concilier vie professionnelle et vie familiale. Il charge la Commission de coordonner l'échange de bonnes pratiques dans ce domaine et insiste sur la nécessité d'instaurer un congé parental à répartir entre les deux parents avec de fortes incitations pour les pères. Le Parlement insiste par ailleurs sur l'adoption de mesures propres à favoriser l'augmentation du taux d'emploi des femmes, grâce à la mise en place de structures de garde d'enfants à un prix abordable et de congés de maternité adaptés. Il recommande, puisque la composition et la définition des familles évoluent dans le temps, que les législations sur la famille et l'emploi soient plus complètes en ce qui concerne les familles monoparentales et les parents LGBT;
- participation des femmes aux processus décisionnels et à l'entrepreneuriat : le Parlement en appelle à des mesures destinées à favoriser la représentation égale des femmes et des hommes dans les postes de direction. Il encourage les secteurs public et privé à envisager des systèmes volontaires pour promouvoir l'accès des femmes à des postes de direction et prie la Commission d'inclure dans la stratégie, des mesures concrètes en faveur d'une représentation égale des femmes et des hommes dans les postes de direction. Il demande au Conseil dadopter rapidement la directive relative à une représentation équilibrée des sexes dans les conseils d'administration non exécutifs et de soutenir des mesures de représentation plus équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils municipaux, des parlements nationaux/régionaux ainsi qu'au PE;
- ressources financières : une fois de plus, le Parlement déplore l'écart de rémunération existant entre les hommes et les femmes, qui a, à peine diminué ces dernières années il demande dès lors la révision rapide de la directive 2006/54/CE;
- santé : le Parlement prie la Commission d'inclure la santé et les droits sexuels et génésiques dans sa prochaine stratégie de l'Union en matière de santé, en vue de compléter les politiques nationales dans le domaine de la santé et des droits sexuels et génésiques. Il invite également la Commission et les États membres à mettre en uvre des programmes sur l'éducation sexuelle dans les écoles. Il réclame en particulier des services de soins de qualité, adaptés sur le plan géographique et facilement accessibles en matière génésique ainsi que la garantie de la disponibilité de possibilités d'avortement et de dispositifs de contraception légaux et sûrs. Le Parlement appelle également la Commission à encourager les États membres à promouvoir la procréation (médicalement) assistée et à mettre un terme à la discrimination dans l'accès au traitement favorisant la fertilité et à l'aide à la procréation. Il insiste aussi sur l'importance de soutenir l'adoption;
- culture, éducation, médias : le Parlement invite la Commission à soutenir des programmes de sensibilisation face aux stéréotypes, au sexisme et aux rôles traditionnellement dévolus aux femmes et aux hommes dans l'éducation et les médias. Il souligne à cet égard la nécessité de lutter contre le harcèlement et les préjugés à l'égard des personnes LGBTI dans les écoles;
- dimension internationale : entre autres choses, le Parlement réclame l'intégration de la dimension de genre dans tous les éléments de la programmation en matière de sécurité alimentaire (les femmes étant responsables de 80% de l'agriculture en Afrique). Il réaffirme en particulier le droit des femmes à accéder volontairement à des services de planning familial et d'avortement. Il souligne que la fourniture de l'aide humanitaire de l'UE ne doit pas être soumise à des restrictions imposées par d'autres donateurs partenaires en ce qui concerne l'accès à l'avortement sans risque pour les femmes et les jeunes filles victimes de viols dans des conflits armés. Le Parlement insiste également sur la mise en place dune politique d'asile et d'immigration sensible à la dimension de genre. Il souligne à cet égard la nature indispensable d'un droit de séjour individuel.
Enfin, le Parlement réclame un mécanisme institutionnel de surveillance de lintégration de la dimension de genre dans toutes les politiques pertinentes (budget, programmes, législation et gouvernance). Il invite la Commission à collaborer avec le Parlement et le Conseil en vue de lorganisation dun sommet européen annuel sur l'égalité entre les femmes et les hommes et les droits des femmes pour recenser les progrès accomplis et renouveler les engagements.
Á noter quune proposition de résolution de remplacement présentée par le groupe PPE a été rejetée en Plénière.