La commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures a adopté le rapport de Sophia in t VELD (ADLE, NL) sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant des normes pour laccueil des personnes demandant la protection internationale (refonte).
La commission parlementaire a recommandé que la position du Parlement européen arrête sa position en première lecture en tenant compte des recommandations du groupe consultatif des services juridiques du Parlement européen, du Conseil et de la Commission. Elle a toutefois soumis des amendements à la proposition de refonte :
Restriction aux conditions daccueil des demandeurs dasile en cas de mouvements secondaires dans lUE : les députés ne souscrivent pas à la position de la Commission qui, dans sa proposition, envisage une attitude répressive à légard des demandeurs dasile qui tenteraient de se rendre illégalement dans un autre État membre. Ils proposent donc au contraire que lon renforce les mesures dinformation en direction des demandeurs dasile notamment sur les circonstances dans lesquelles les conditions matérielles daccueil pourraient être restreintes et les garanties quils pourraient perdre en pareils cas.
Ils définissent notamment plus précisément les cas où les demandeurs dasile pourraient se rendre dans un autre État membre de manière légale, par exemple pour des raisons médicales ou familiales. Dans ce cas, les États membres devraient fournir aux demandeurs concernés la faculté de se rendre dans un autre État membre grâce à un document de voyage dont la durée serait limitée à lobjet et à la durée de la situation justifiant sa délivrance.
En tout état de cause, toute restriction de la liberté de mouvement dun demandeur ne devrait être adoptée quen dernier recours et être fondée sur une décision des autorités judiciaires qui devrait tenir compte du comportement individuel et de la situation particulière de la personne concernée, y compris de tout besoin spécifique du demandeur en matière daccueil et des principes de nécessité et de proportionnalité.
Le demandeur devrait en outre être dûment informé de la possibilité de présenter un recours contre ces décisions restrictives.
Conditions spécifiques daccueil : les députés rappellent que lobjectif global de la directive est de fixer des normes communes pour les conditions daccueil de sorte à clairement décourager les mouvements secondaires au sein de lUnion. Ils mettent ainsi en évidence la nécessité de garantir aux demandeurs dasile, en toutes circonstances, laccès aux soins médicaux et un niveau de vie adéquat. Les besoins spécifiques de certains dentre eux devraient également être pris en considération comme les besoins des enfants ou des personnes ayant subi des violences sexuelles ou sexistes, dont les femmes (y compris un soutien post-traumatique et une prise en charge psychosociale adaptés).
Les députés modifient également la terminologie employée pour définir lallocation journalière qui doit garantir un niveau de vie adéquat aux demandeurs (et non «digne» comme prévu à la proposition) leur garantissant alimentation, habillement, logement, traitements médicaux et services sociaux nécessaires pour garantir leur bien-être et celui de leur famille.
Conditions demploi accès à lemploi : les députés demandent des règles claires concernant laccès des demandeurs au marché du travail de sorte que cet accès soit effectif, en nimposant pas de conditions, y compris des restrictions sectorielles, des restrictions du temps de travail ou des formalités administratives déraisonnables, empêchant, en réalité, leur accès à lemploi.
Il est précisé que les conditions daccès à lemploi ne doivent pas être telles quelles conduisent à des pratiques de dumping salarial avec les travailleurs des États membres. Ils proposent en particulier que les demandeurs dasile puissent accéder au marché du travail au plus tard dans les 2 mois qui suivent le dépôt de la demande de protection internationale.
A noter toutefois que les demandeurs dasile pourraient, pour des motifs liés à la politique du marché du travail des États membres, se voir refuser un emploi au profit de ressortissants dun État membre, notamment en cas de taux de chômage élevé des jeunes.
Les demandeurs qui se sont vu accorder laccès au marché du travail devraient en outre avoir la possibilité de demander une carte bleue européenne en vertu de la législation de lUnion et avoir la possibilité de demander un permis de séjour à des fins de recherche, détudes, de formation, de volontariat et de programmes déchange délèves ou de projets éducatifs et de travail au pair, en vertu de la législation de lUnion.
Contraintes en cas de risque de fuite : les députés définissent et encadrent mieux les situations de fuite potentielle des demandeurs dasile. Ainsi, lorsquil existe des raisons de croire à un risque de fuite du demandeur, les États membres pourront proposer de manière proportionnée, une obligation de se manifester auprès des autorités compétentes ou de se présenter en personne, soit immédiatement soit à une date précise, aussi fréquemment que nécessaire, mais dans la limite dune fois par jour ouvrable, pour prévenir efficacement sa fuite. Une telle décision pourra faire lobjet dun recours ou de réexamen devant une autorité judiciaire compétente.
Rétention : toute décision imposant la rétention ne devrait être prise quen dernier ressort et devrait envisagée toutes solutions alternatives dans chaque cas. Lorsquun demandeur est placé finalement en rétention, il devrait bénéficier des garanties procédurales nécessaires, telles quun droit de recours et le droit de bénéficier dune assistance juridique et dune représentation gratuites. Cette rétention ne devrait pas avoir un caractère répressif.
Lorsque, à la suite du contrôle juridictionnel, le placement en rétention est jugé illégal, le demandeur devrait être immédiatement libéré.
En outre, si la rétention présente un risque pour lintégrité physique et psychologique, les demandeurs ayant des besoins spécifiques en matière daccueil ne devraient pas être placés en rétention.
Dans le même ordre didées, toute rétention ou isolement denfants, quils soient accompagnés de leur famille ou non accompagnés, devrait être interdit car contrevenant à lintérêt supérieur de lenfant.
Mesures dintégration : les députés rappellent que les connaissances linguistiques sont indispensables pour assurer le niveau de vie adéquat des demandeurs. Lapprentissage de la langue officielle ou de lune des langues officielles de lÉtat membre concerné accroîtrait l'autonomie et les chances dintégration dans la société daccueil et constitue également un facteur dissuasif face aux mouvements secondaires. Un accès effectif à des cours de langue devrait donc être accordé à tous les demandeurs à compter de la date à laquelle leur demande de protection internationale est déposée.
Les États membres doivent en outre sefforcer de proposer aux demandeurs et aux autorités une formation adéquate sur la législation du travail et la non-discrimination (éducation civique) afin déviter lexploitation sur le lieu de travail dans le cadre de pratiques de travail non déclaré et dautres formes de grave exploitation de la main-duvre.
Les députés prévoient en outre laccès des demandeurs dasile à la formation professionnelle.
Garanties procédurales : les députés renforcent les garanties procédurales offertes aux demandeurs dasile. Entre autres choses, ils proposent que lassistance juridique et la représentation gratuites soient fournies par des conseillers juridiques ou d'autres personnes dûment qualifiées, reconnues ou habilitées par le droit national à assister ou à représenter le demandeur et dont les intérêts nentrent pas en conflit avec ceux du demandeur. Il peut notamment sagir dorganisations non gouvernementales agréées en vertu du droit national.
En cas dafflux massif de demandeurs dasile, les États membres devraient établir un plan durgence exposant les mesures planifiées à prendre pour garantir un accueil adapté des demandeurs de protection internationale.
Ils proposent quun financement adéquat du Fonds AMI soit prévu pour la formation du personnel chargé de laccueil, des autorités locales et régionales, des organisations internationales et des organisations de la société civile. Cette formation devrait accorder une attention particulière à lidentification active des besoins spéciaux en matière daccueil (approche en matière dâge, de genre et de diversité) et des mesures appropriées de prévention et de réponse à la violence sexuelle, fondée sur le genre ou sur les préjugés.
Charte des droits fondamentaux : les députés ont plus strictement lié le texte de la proposition de directive à la Charte des droits fondamentaux de lUnion européenne. Ainsi, les États membres devraient appliquer la définition de «membre de la famille» conformément à la Charte des droits fondamentaux de lUE et tenir compte des différentes circonstances de dépendance et de lattention toute particulière à accorder à lintérêt supérieur de lenfant.
Evaluation et rapports : enfin, les députés prévoient une plus grande régularité des rapports de mise en uvre à remettre au Parlement et au Conseil (rapport annuel et non tous les 3 ans).