Résolution sur la situation en matière d’état de droit et de lutte contre la corruption dans l’Union, notamment à Malte et en Slovaquie  
2018/2965(RSP) - 28/03/2019  

Le Parlement européen a adopté par 398 voix pour, 85 contre et 69 abstentions, une résolution sur la situation en matière d’état de droit et de lutte contre la corruption dans l’Union, notamment à Malte et en Slovaquie.

Le Parlement a condamné fermement les efforts déployés par un nombre croissant de gouvernements nationaux pour affaiblir l’état de droit, remettre en cause la séparation des pouvoirs et saper l’indépendance de la justice et s’est fortement préoccupé des menaces visant de plus en plus souvent les journalistes et la liberté des médias.

Le Conseil est invité à étudier et à suivre les propositions de la Commission et du Parlement concernant tant les procédures d’infraction que la procédure prévue à l’article 7 du traité UE en adoptant notamment des mesures rapides sur la base de la proposition motivée de la Commission du 20 décembre 2017 relative à la Pologne, en inscrivant en priorité la situation en Hongrie à son ordre du jour et en invitant le Parlement à lui présenter sa proposition motivée concernant la Hongrie.

Enquêtes et respect du droit

Le Parlement a demandé au gouvernement maltais de diligenter une enquête complète et indépendante sur l’assassinat de Daphne Caruana Galizia, et notamment sur les circonstances qui ont débouché sur cet assassinat, sur la réponse apportée par les pouvoirs publics et sur les mesures susceptibles d’être mises en place pour éviter qu’un meurtre de cette nature se reproduise. Il a invité les autorités maltaises compétentes à publier la version intégrale et non expurgée du fameux rapport d’enquête «Egrant», notant que les conclusions disponibles ne confirment pas les allégations établissant un lien entre la propriété d’Egrant Inc. et le premier ministre maltais et son épouse et qu’aucune enquête n’a été ouverte pour identifier le bénéficiaire effectif d’Egrant, point qui reste à éclaircir.

De plus, les députés ont noté que le chef cabinet du premier ministre ainsi que l’actuel ministre du tourisme et ancien ministre de l’énergie sont les seuls hauts responsables gouvernementaux d'un État membre de l’Union reconnus comme étant les bénéficiaires effectifs d'une personne morale impliquée dans l’affaire des «Panama Papers». Ils ont demandé au gouvernement maltais de lancer une enquête sur les révélations des «Panama Papers» et sur les liens de la société 17 Black, enregistrée à Dubaï, avec l’ancien ministre de l’énergie, devenu ministre du tourisme, et le chef de cabinet du Premier ministre.

Le Parlement a invité les institutions et les États membres de l’Union à ouvrir une enquête sur les cas présumés de corruption, de criminalité financière, de blanchiment de capitaux, de fraude et d’évasion fiscale qu’elle a signalés, lesquels impliquent de hauts fonctionnaires et anciens fonctionnaires maltais.

Concernant la Slovaquie, le Parlement s’est félicité de la mise en examen par les autorités slovaques de l’instigateur présumé de l’assassinat de Ján Kuciak et de Martina Kušnírová ainsi que des auteurs présumés de ces assassinats. Il a invité les services répressifs à poursuivre l’enquête et à veiller à ce que tous les aspects de l’affaire soient rigoureusement examinés.

Le Parlement a préconisé d’allouer davantage de ressources à Europol et à Eurojust pour mener ce genre d’enquêtes à l’avenir et d’étendre le mandat d’Europol pour lui permettre de mettre en place des équipes communes d’enquête.

Enjeux constitutionnels à Malte et en Slovaquie

Le Parlement a invité Malte à mettre en œuvre l’ensemble des recommandations de la Commission de Venise, sans aucune exception. Il a également souligné que les dispositions régissant le processus de sélection et de nomination de juges à la Cour constitutionnelle en Slovaquie doivent respecter les normes les plus strictes de transparence, de contrôle et de responsabilité, et a jugé préoccupant que ce processus de sélection n’ait encore enregistré aucun progrès au Parlement slovaque. Il a demandé l’application de règles et de procédures transparentes, univoques et objectives pour la nomination en 2019 du nouveau chef de la police slovaque, afin de garantir l’indépendance et la neutralité de la fonction.

Programmes de citoyenneté et de résidence par investissement et visas

Le Parlement a constaté que les programmes de citoyenneté et de résidence par investissement pratiqués par certains États membres posent certains risques, notamment en ce qui concerne la sécurité, le blanchiment de capitaux, la fraude fiscale et la corruption. Ces programmes permettent l’admission de ressortissants de pays tiers au seul titre d'une accumulation de richesses plutôt que d’une connaissance utile, de compétences ou de considérations humanitaires, et se soldent, dans les faits, par la vente de la citoyenneté de l’Union.

La Commission est invitée à continuer à surveiller l’ampleur et les conséquences des différents programmes de citoyenneté et de résidence par investissement dans l’Union européenne, en mettant particulièrement l’accent sur les procédures de diligence raisonnables, les profils et activités des bénéficiaires, les incidences éventuelles sur la criminalité transfrontière et l’intégrité de l’espace Schengen. Le gouvernement maltais a été invité à :

- publier tous les ans une liste distincte de toutes les personnes qui ont acheté la nationalité maltaise et la citoyenneté de l’Union européenne ;

- faire pleinement la lumière sur les allégations de ventes massives de visas Schengen et de visas médicaux, auxquelles auraient participé d’anciens ou actuels hauts fonctionnaires maltais.

Sécurité des journalistes et indépendance des médias

Le Parlement a demandé au gouvernement slovaque de garantir la sécurité des journalistes, relevant avec inquiétude que la proposition législative actuelle relative à la loi sur la presse risque de limiter la liberté des médias. Il a déploré l’absence de transparence sur la propriété des médias et s’est préoccupé des déclarations de responsables politiques slovaques qui remettent en cause la valeur du journalisme et des médias publics indépendants.

Les députés ont demandé une nouvelle fois aux membres concernés du gouvernement maltais de veiller au retrait, avec effet immédiat, des actions en diffamation à l’encontre de la famille endeuillée de Daphne Caruana Galiza, de ne pas utiliser les lois contre la diffamation pour geler les comptes bancaires des journalistes critiques et de réformer lesdites lois, qui sont utilisées pour entraver les travaux des journalistes.

Réponses de l’Union

Le Parlement a demandé aux institutions de l’Union et aux États membres de combattre résolument la corruption systémique et de concevoir des instruments efficaces de prévention, de lutte et de sanction à l’encontre de la corruption, de lutte contre la fraude et de suivi régulier de l’utilisation des fonds publics. Il a souligné que l’impunité continuelle face à ces dérives graves et persistantes visées à l’article 2 du traité UE a encouragé de nouveaux États membres à suivre la même voie et a déploré la décision de la Commission de reporter à juillet 2019 la publication de sa proposition visant à renforcer le cadre pour l’état de droit.