Aménagement du temps de travail  
2004/0209(COD) - 22/09/2004  

FICHE D'IMPACT DE LA COMMISSION EUROPÉENNE



1-IDENTIFICATION DU PROBLEME : au terme de la deuxième phase de consultation des partenaires sociaux, la Commission propose de réexaminer les dispositions de la directive 2003/88/CE relatives, d'une part, aux dérogations à la période de référence pour l'application de l'article 6 (durée maximale hebdomadaire de travail), et, d'autre part, à la faculté de ne pas appliquer ce même article si le travailleur donne son accord pour effectuer un tel travail (option de non participation ou « opt out »). Elle tient compte de l'interprétation jurisprudentielle de la notion de "temps de travail", en particulier pour la qualification des périodes de garde des médecins selon le régime de la présence physique dans l'établissement de santé (affaires SIMAP et Jaeger).

Pour connaître le contexte de cette problématique, se reporter au résumé complémentaire de la proposition de la Commission COM (2004)0607.

2- OBJECTIFS :

Dans sa communication du 30.12.2003, la Commission considère que l'approche retenue devra : assurer un niveau élevé de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs en matière de temps de travail; donner aux entreprises et aux États membres une plus grande flexibilité dans la gestion du temps de travail; permettre une meilleure compatibilité entre vie professionnelle et vie familiale; éviter d'imposer des contraintes déraisonnables aux entreprises, notamment aux PME.

3- OPTIONS POLITIQUES ET IMPACTS :

Différentes options sont envisagées ainsi que les impacts correspondants pour 4 questions spécifiques :

3.1- Question 1: les dérogations aux périodes de référence : actuellement, pour l'application de la durée maximale hebdomadaire de travail (48 heures/semaine), la directive prévoit une période de référence ne dépassant pas 4 mois. Les États membres peuvent fixer une période de référence de 6 mois pour certaines activités (par exemple, les activités de garde, de surveillance et de permanence). Enfin, les partenaires sociaux nationaux peuvent fixer une période de référence ne dépassant pas un an.

3.1.1- Option 1 : maintien de la situation actuelle : si globalement la situation actuelle ne peut être considérée comme insatisfaisante pour la santé et la sécurité des travailleurs ainsi que pour la flexibilité des entreprises, le fait de ne permettre l'établissement d’une période de référence d’un an que par la négociation collective place les États membres et les entreprises dans des situations différentes.

3.1.2- Option 2 : réduction de la période de référence : cette option pourrait passer par trois modifications: fixation d'une période plus courte que les 4 mois actuels; élimination de la possibilité de dérogation prévue aux différents alinéas de l'article 17 (notamment, suppression de la possibilité de fixer une période de référence de 6 mois); éventuellement, suppression de la possibilité de prévoir une période de référence d'un an par convention collective. Sachant que cette disposition ne semble avoir aucun impact négatif pour la santé et la sécurité des travailleurs mais bien sur la flexibilité réclamée par les entreprises en matière d'aménagement du temps de travail, la réduction de la période de référence est une option qui semble pouvoir être écartée.

3.1.3- Option 3 : extension de la période de référence : cette option passerait par plusieurs modifications : fixation d'une période plus longue que les 4 mois actuels; fixation de périodes plus longues pour les dérogations admises à l'article 17 (6 et 12 mois); fixation d'une période plus longue que les 4 mois actuels, mais sans possibilité de dérogation. Cette extension serait conforme à la tendance visible vers une annualisation du temps de travail. Elle clarifierait également la directive.

3.2- Question 2: l'opt-out individuel (article 22, paragraphe 1) : l’"opt-out" est la faculté pour un État membre de prévoir qu’un travailleur choisisse individuellement de travailler, en moyenne, plus de 48 heures/semaine, sous réserve des conditions prévues par l’article 22, par. 1.

3.2.1- Option 1 : maintien de la situation actuelle : si le statu quo est maintenu, la Commission serait obligée de tirer les conséquences des conclusions auxquelles elle est arrivée après l'évaluation menée sur l’application de cette disposition au Royaume-Uni : des réserves tant sur les mesures nationales de transposition de la directive que sur son application pratique. Donc, au moins en ce qui concerne le Royaume Uni, le statu quo n'est pas possible et des modifications doivent être introduites.

3.2.2- Option 2 : maintien de l'opt-out en renforçant les conditions d'application de façon à consolider sa nature volontaire et à prévenir les abus : cette option viserait à maintenir la flexibilité offerte par l'opt-out, tout en éliminant les possibilités d'abus. Elle devrait permettre de solutionner les problèmes rencontrés et d’utiliser l'opt-out sur une base réellement volontaire dans le chef du travailleur.

3.2.3- Option 3 : opt-out uniquement par convention collective : dans le texte actuel de la directive, l'usage de l'opt-out dépend de l'État membre et de la volonté individuelle du travailleur. La présente option consisterait à donner à la négociation collective un rôle plus actif. En général, cette option n'empêcherait pas les entreprises qui en ont besoin d'avoir recours à l'opt-out (le dialogue social est possible dans la majorité des cas), mais elle imposerait le principe de la négociation collective avec une augmentation inévitable des coûts pour les entreprises par rapport à la situation actuelle.

3.2.4- Option 4 : opt-out uniquement par convention collective lorsque celle-ci existe ou est possible : cette option se distingue de la précédente parce qu'elle permet l'utilisation de l'opt-out individuel comme actuellement quand la convention collective n’est pas envisageable. En revanche, elle ressemble à la solution précédente en ce que le recours à l'opt-out serait conditionné à l'accord des partenaires sociaux au niveau adéquat. L'avantage de cette approche est que le fossé entre pays à forte culture en termes de dialogue social et les autres s’amenuiserait. En tout état de cause là où la négociation collective n’existe pas, l'opt-out individuel continuerait de s’appliquer. Cette option est donc celle qui permet le mieux de combiner le besoin de flexibilité des entreprises avec le respect des traditions nationales en matière de relations industrielles.

3.2.5- Option 5 : suppression graduelle de l'opt-out : cette option, défendue par le Parlement européen, instituerait une période transitoire pendant laquelle l'opt-out individuel pourrait continuer à être utilisé, avec une limite maximale hebdomadaire du temps de travail décroissante, jusqu'à arriver à la règle générale des 48 h/semaine. L'impact de cette option dépendra fortement de la durée de la période transitoire pendant laquelle l'opt-out individuel resterait possible. Plus la période serait longue, plus les entreprises et les travailleurs auraient le temps de s'adapter aux nouvelles conditions.

3.2.6- Option 6 : suppression de l'opt-out : cette option consisterait à supprimer purement et simplement l’opt-out. La question est de savoir si cette suppression serait dommageable à la compétitivité de l'industrie communautaire et en particulier, à celle du Royaume Uni qui a largement utilisé cette disposition, alors qu’il est manifeste qu’elle serait bénéfique pour la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.

3.3- Question 3: la définition du temps de travail : dans la logique de la directive, toute période ne peut être considérée que comme du temps de travail ou du temps de repos, il n'existe pas de catégorie intermédiaire.

3.3.1- Option 1 : maintien de la situation actuelle : la définition du temps de travail, telle qu'interprétée par la Cour de Justice dans les affaires SIMAP et Jaeger, continuerait d'être applicable. Au vu des éléments dont la Commission dispose, cette option n'est donc pas envisageable sous peine d'effets pervers dans les systèmes publics de santé et, probablement, dans d'autres secteurs des services.

3.3.2- Option 2 : exclure le temps de garde de la limite des 48 heures hebdomadaires : selon la jurisprudence de la Cour de justice, le temps de garde doit être considéré entièrement comme du temps de travail au sens de la directive. La présente option consisterait à laisser intacte cette qualification du temps de garde, mais en l'excluant de la comptabilisation de la durée maximale hebdomadaire du temps de travail. Cette option, qui peut être attractive parce qu'elle ne met pas en cause (ou dans une moindre mesure) la jurisprudence SIMAP/Jaeger, serait inévitablement source de conflits et d'incertitudes.

3.3.3- Option 3 : insérer une nouvelle définition dans la directive celle de "période inactive du temps de garde" : cette option consisterait à sortir de la situation dichotomique "temps de travail/période de repos" et à introduire une troisième catégorie, la période inactive du temps de garde. Il est probable que cette option permette aux États membres qui n'ont pas encore modifié leur législation, de la maintenir en vigueur.

3.4- Question 4: compatibilité entre vie professionnelle et vie familiale : la Commission a exprimé son souhait de profiter de l'exercice de réexamen de la directive pour encourager une meilleure prise en compte de cet objectif dans la directive.

3.4.1- Option 1 : maintenir la situation actuelle : une option possible serait de n'ajouter aucune disposition nouvelle, mais de veiller à ce que cette dimension soit mieux prise en compte dans les dispositions existantes dans la directive.

3.4.2- Option 2 : insérer un nouvel article : cette option consisterait à demander aux États membres qu'ils encouragent les partenaires sociaux à tous les niveaux, à négocier des mesures allant dans ce sens.

CONCLUSIONS : selon la Commission, la proposition qui pourrait le mieux remplir ces critères comporteraient les éléments suivants:

- opt-out : les dérogations à l'article 6.2 (temps de travail hebdomadaire) ne seraient possibles que par convention collective ou accord entre les partenaires sociaux  chaque fois que cela est possible ; dans les entreprises n'ayant pas de tels accords ou de représentation des travailleurs, l'opt-out individuel, avec des conditions renforcées, continuerait d’être applicable ;

- définition du temps de travail suite aux arrêts SIMAP/Jaeger : introduction d'une troisième catégorie de temps de travail couvrant la "période inactive du temps de garde", qui ne serait pas considérée comme du "temps de travail" au sens de la directive ;

- dérogations aux périodes de référence : il serait possible de prévoir l'allongement à un an de la période de référence pour le calcul de la durée maximale hebdomadaire du temps de travail par voie législative ou réglementaire ;

- compatibilité entre vie professionnelle et vie familiale : insertion d’un nouvel article allant dans ce sens.

Pour la Commission, seule une approche globale intégrant ces quatre domaines de réexamen serait de nature à permettre de trouver une solution équilibrée.