Le Parlement européen a adopté par 540 voix pour, 66 voix contre et 34 abstentions, une résolution législative modifiant, en première lecture de la procédure de codécision, la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques.
Les principaux amendements sont les suivants :
Objet : selon les députés, la directive devrait s’appliquer à l'hébergement et à l'élevage des animaux utilisés à des fins scientifiques et devrait couvrir toutes les utilisations d'animaux dans des procédures susceptibles de leur causer douleur, souffrance, angoisse ou dommages durables.
Champ d’application : la directive devrait s’appliquer animaux vertébrés non humains vivants, y compris les formes embryonnaires ou fœtales d’espèces de mammifères à partir du dernier tiers de leur développement normal. En revanche, les formes larvaires autonomes devraient être exclues du champ d’application.
Méthodes alternatives : lorsqu’une méthode d'essai ou d’expérimentation existe qui, d'un point de vue scientifique, est une méthode ou stratégie d’expérimentation acceptable pour obtenir le résultat recherché, les États membres devraient veiller à ce que cette méthode alternative soit employée, à condition que la méthode alternative ne soit pas interdite dans l'État membre concerné.
Dans le cadre de la directive, des méthodes d'expérimentation impliquant l'utilisation de cellules embryonnaires et fœtales humaines ne devraient pas être considérées comme des méthodes alternatives, ce qui signifie que s'agissant de l'utilisation de ces méthodes, les États membres peuvent prendre leurs propres décisions éthiques.
Les députés souhaitent également que les États membres assurent le financement de la formation et de la recherche dans le domaine des méthodes ou stratégies d'expérimentation scientifiquement satisfaisantes qui n'impliquent pas l'utilisation d'animaux.
Méthodes humaines de sacrifice : les députés ont introduit une disposition permettant d'appliquer immédiatement les méthodes de sacrifice plus humaines à mesure de leur mise au point, sans devoir attendre plusieurs années que l'annexe V soit actualisée.
Mesures nationales : la directive ne doit pas représenter un obstacle pour les États membres pour l'application ou l'adoption de mesures nationales plus strictes.
Primates non humains (PNH): la proposition interdit l'utilisation des PNH, hormis dans certaines circonstances. Comme la situation particulière des PNH ne peut pas être justifiée de manière probante, les députés estiment que la recherche fondamentale devrait être autorisée, sans limitation à des objectifs spécifiques, dans le domaine de la recherche médicale. Ils jugent également utile de prévoir un réexamen de l'utilisation des PNH dans les procédures effectué tous les deux ans par la Commission.
Utilisation des cadavres, tissus et organes des animaux à des fins de formation : les députés estiment que les cadavres, tissus et organes d'animaux ne peuvent être utilisés, dans l'éducation et la formation supérieures, que s'ils proviennent d'animaux mis à mort conformément aux dispositions du règlement (CE) n° .../2009 du Conseil [sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort.
Animaux élevés en vue d’une utilisation dans des procédures : les députés estiment que la recommandation qui est faite dans la proposition de n'utiliser que des primates non humains provenant de colonies de primates F2 (deuxième génération élevée en captivité) entretenues sans apport extérieur est un objectif louable, mais qu’elle n'est pas réaliste dans les délais envisagés par la Commission. Aussi, la Commission devrait elle procéder, 5 ans après l'entrée en vigueur de la directive, à une étude de faisabilité, avant d'opter pour un approvisionnement qui ne se ferait que dans des colonies F2 stables.
Anesthésie : les États membres devront veiller, le cas échéant, à ce que toutes les procédures s'effectuent sous anesthésie générale ou locale ou en ayant recours à d'autres méthodes susceptibles d'atténuer la douleur ou de réduire au minimum la souffrance.
Classifications de gravité : dans sa proposition, la Commission détermine un certain nombre de classes de gravité - « nulle à légère », « modérée », « sévère » ou « sans réanimation » - régissant les modalités de réalisation des expériences. Toutefois, elle ne définit pas les classifications. Les députés ont souhaité clarifier la situation en introduisant dans le texte une nouvelle Annexe VII bis intitulée « Définitions générales des degrés de gravité ».
Les députés notent également que l'interdiction des procédures « sévères » « prolongées » prévue dans la proposition semble interdire toute procédure de la catégorie « sévère » et pourrait être extrêmement restrictive. C’est pourquoi ils proposent que les États membres veillent à ce que les procédures classées «sévères» soient scientifiquement justifiées et contrôlées sur le plan éthique si la douleur, la souffrance ou l’angoisse est susceptible d’être plus que passagère. De telles procédures doivent être exceptionnelles et faire l'objet d'une analyse dommages/avantages et d'un contrôle particuliers de la part de l'autorité compétente.
Réutilisation : le Parlement soutient le principe de limiter la réutilisation d'animaux dans les expériences mais estiment que la proposition de la Commission pourrait entraîner l'utilisation de beaucoup plus d'animaux dans des expériences. Il propose donc qu’un animal déjà utilisé dans une procédure puisse être réutilisé dans une nouvelle procédure si la procédure précédente était classée comme étant d’une gravité «de nulle à modérée» (plutôt que d’une gravité «nulle à légère»).
En tout état de cause, un animal qui a subi une procédure « sévère » ne devrait pas être réutilisé. En revanche, ceux qui ont subi une procédure « modérée » devraient pouvoir subir une nouvelle procédure « modérée ». La réutilisation d'un animal devrait être accompagnée de visites vétérinaires.
Agrément des personnes : les États membres devraient garantir la reconnaissance mutuelle des qualifications en termes d'éducation et de formation et des procédures d'autorisation pour la réalisation des procédures spécifiées. Lorsqu'un établissement ne satisfait plus aux exigences fixées dans la directive, l'autorité compétente doit être habilitée à décider la suspension ou le retrait de son agrément, à prendre les mesures correctives nécessaires ou à imposer que de telles mesures soient prises. Des procédures appropriées doivent être prévues pour que les titulaires d'autorisation puissent faire appel de telles décisions.
Tout établissement d'élevage, établissement fournisseur et établissement utilisateur devrait veiller à ce qu'il y ait à tout moment au moins une personne qualifiée disponible pour veiller au bien-être des animaux.
Tâches de la structure permanente d’examen éthique : les députés estiment judicieux de prévoir un examen annuel de tous les projets classés « sévères », alors que pour d'autres projets, un examen tous les 3 ans serait approprié. Les États membres doivent attacher une attention particulière à la collecte et à la publication des archives relatives à des projets classés « sévères » ou concernant des primates non humains.
Stratégie d’élevage des primates non humains : les obligations devraient concerner les établissements d’élevage et les établissements fournisseurs de primates non humains de l'Union européenne uniquement. Lorsque l'utilisation de primates non humains est autorisée, la Commission et les États membres devraient prendre toutes les mesures nécessaires en vue de garantir des conditions de transport appropriées.
Suivi des inspections : la Commission devrait procéder à des contrôles de l'infrastructure et du déroulement des inspections nationales et de l'application correcte des classifications de sévérité dans les États membres. À cette fin, la Commission devrait mettre en place un système visant à opérer un suivi des inspections et de l'application de la directive dans chaque État membre, tous les trois ans en moyenne, de façon à assurer l'harmonisation des pratiques concernant le traitement et les soins des animaux utilisés ou destinés à être utilisés dans des procédures scientifiques.
Autorisation des projets : les députés estiment que l'autorisation préalable, requise dans la proposition, pour tous les projets, devrait être limitée aux projets classés « modérés » ou « sévères » ou tous ceux concernant des primates non humain. Tous les autres projets devraient être notifiés préalablement à l'autorité compétente, après l'évaluation éthique par la structure permanente d'examen éthique.
Appréciation rétrospective : si une évaluation éthique rétrospective est requise, ce devrait être à un comité d’éthique de statuer sur cette nécessité. C’est à ce comité de statuer en fonction de critères objectifs et ce quelle que soit l’espèce concernée.
Octroi de l’autorisation du projet : les autorisations devraient être octroyées pour une période n’excédant pas 5 ans (au lieu de 3 ans).
Partage des données : les États membres devront veiller à partager les données générées par les procédures, y compris celles qui ont eu lieu dans l'Union européenne avant l'entrée en vigueur de la directive. Toute personne souhaitant exploiter des données détenues par une autre devra contribuer, le cas échéant, aux coûts de la production de ces données.
Centre européen pour la validation de méthodes alternatives (CEVMA) : les députés suggèrent que le mandat du CEVMA soit élargi pour y inclure la coordination et la promotion du développement et de l'utilisation de méthodes de substitution à l'expérimentation animale, y compris la recherche biomédicale et vétérinaire appliquée et fondamentale et les essais réglementaires, par exemple en coordonnant la recherche visant à promouvoir le développement de méthodes de substitution à l'expérimentation animale au sein des centres nationaux ou en mettant en place des bases de données pour faciliter l'échange d’informations.
Chaque État membre devra en outre désigner un centre chargé de soutenir l'élaboration, la validation et la promotion de méthodes de substitution à l'expérimentation animale effectuée à des fins réglementaires, et des installations visant à élaborer et promouvoir l'utilisation de méthodes de substitution à l'expérimentation animale effectuée à d'autres fins, comme la recherche biomédicale et vétérinaire fondamentale et appliquée.
Réexamen thématique : le Parlement demande que la Commission procède à un réexamen thématique de l'utilisation d'animaux dans des procédures. Ce réexamen serait mené tous les deux ans, et pour la première fois deux ans après l'entrée en vigueur de la directive. Il étudiera les conséquences de l'évolution des connaissances en matière technique et scientifique ou se rapportant au bien-être des animaux et fixera des objectifs pour la mise en œuvre de méthodes de substitution validées.
Dans le cadre des réexamens périodiques, la Commission devra accorder la priorité à la réduction et à l'élimination des procédures dans lesquelles la douleur, la souffrance, l'angoisse ou les dommages durables atteignent le niveau maximum admissible, et de celles qui ne sont pas conçues pour remédier à des troubles cliniques mettant en danger la vie ou la santé des êtres humains, avec pour but l'élimination de toutes les procédures.
Dans les examens périodiques, la Commission devra tenir compte de l'évolution de l'opinion publique sur l'utilisation des animaux dans les procédures.